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Lifestyle - Vent de paraître

Ce que les femmes pré -MLF confiaient à leur journal intime, parfois juteux, souvent exutoire 

« On ne naît pas femme, on devient femme. » Faisant écho à cette pensée de Simone de Beauvoir extraite de l’ouvrage « Le Deuxième Sexe », retour en ce début du mois de la femme sur quelques figures réunies dans un ouvrage « Secret Voices: A Year of Women’s Diaries ».

Ce que les femmes pré -MLF confiaient à leur journal intime, parfois juteux, souvent exutoire 

Duos célèbres, de gauche à droite : la reine Victoria et le prince Albert, Virginia Woolf et son père Sir Leslie Stephen, Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre. Photos Creative Commons/Montage L’OLJ

« Mon très cher Albert a lui-même mis mes bas. Puis, je suis entrée chez lui et je l’ai vu en train de se raser  ; un grand plaisir pour moi ! » Albert n’est autre que le prince Albert de Saxe-Cobourg-Gotha, et néanmoins époux de la reine Victoria d’Angleterre et prince consort. Ces détails extrêmement personnels sont tiré d’une anthologie publiée la semaine dernière en concordance avec le début de mars, mois de la femme. Son titre : Secret Voices: A Year of Women’s Diaries (« Voix secrètes : une année de journaux intimes de femmes »). Elle porte la signature de l’auteure et journaliste américaine Sarah Gristwood qui a regroupé 1 200 passages de journaux intimes de femmes, riches en confidences souvent inattendues.  Elle les a placées sur les 365 jours d’une année, leur donnant ainsi l’aspect d’un journal annoté quotidiennement. Au fil des dates et des mois, se retrouvent les instantanés de la vie de quelque 100 femmes, originaires de plus de 20 pays et ayant appartenu à des époques étalées sur les quatre derniers siècles. Faisant écho aux hasards de la vie, ces pages révèlent comment l’expérience de ces femmes vis-à-vis des hommes et des enfants, du sexe et du shopping, a changé à travers le temps. L’ouvrage contient un riche mélange de chroniqueuses de renom et d’autres moins connues.

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Un mélange classique et moderne

« Souvent, fait remarquer l’historienne et auteure Alison Weiri, les voix qui montaient tout au long des siècles ont une étrange résonance actuelle. Unies à travers le temps, ces voix de femme ouvrent les portes de mondes perdus et les rendent familiers, constituant ainsi un ensemble à la fois classique et moderne. » Arrêt sur deux impressions retenues par deux célébrités, l’une française et l’autre britannique. La première, Simone de Beauvoir, illustre auteure du Deuxième Sexe, parle de sa découverte de l’Amérique : « Ce qui rend la vie quotidienne si agréable en Amérique, c’est la bonne humeur et la convivialité des Américains. L’optimisme est nécessaire à la paix sociale et à la prospérité économique du pays. » De son côté, l’écrivaine et féministe avant l’heure Virginia Woolf n’a pas apprécié qu’un médecin lui ait rappelé son âge. Elle écrit : « L’oculiste m’a dit cet après-midi: “Peut-être vous n’êtes plus aussi jeune qu’avant.” C’est la première fois qu’on me le dit et c’est une déclaration étonnante. Il semble que maintenant, aux yeux d’un étranger, on ne ressemble plus à une femme mais à une femme âgée. Oui, même si je me suis sentie ridée et vieillie pendant une heure, j’ai fait la moue à la manière d’une grande veuve. Puis j’ai quand même oublié et je suis devenue encore une femme. » 

Dans ce panorama, on retrouve surtout des femmes cherchant à imposer avec difficulté, parfois en vain, leur personnalité et leurs aspirations, telle Lady Anne Clifford, mariée deux fois et qui en ce XVIIe siècle fut une importante mécène littéraire, laissant derrière elle de précieux écrits, lettres et journaux qu’elle a tenus de 1603 à 1616 et qui révèlent ces souffrances. Figurent également l’écrivaine britannique Joan Wyndham et Anne Frank (à peu près au même moment, mais dans des contextes très différents) décrivant leurs premières expériences sexuelles. Au XXe siècle enfin, c’est la chroniqueuse Anne Lister explorant ses aventures amoureuses avec des femmes, aux côtés d’Alice Walker dans la Californie de l’époque.


La couverture de l’ouvrage paru en février 2024.

Coquetterie féminine, angoisse et politique

La légendaire coquetterie féminine n’est pas absente, avec la nouvelliste Barbara Pym achetant de la lingerie audacieuse et Virginia Woolf savourant sa nouvelle coupe de cheveux. On apprend également qu’il n’y a pas très longtemps, l’actrice britannique Emma Thompson a affronté toutes sortes de difficultés lors du tournage du film Sense and Sensibility, en 1995 : « Je n’arrêtais pas de trébucher sur ma robe et de jurer sur le tournage . » Certains passages offrent un aperçu personnel d’événements historiques majeurs. Le jour de l’armistice en 1918, Londres a éclaté dans un « pandémonium » de bruits et de réjouissances. Pourtant, l’Anglaise Beatrice Webb (sociologue, économiste et militante) sentait le début de quelque chose de plus : « Dans combien de temps le courant de la révolution rattrapera-t-il le courant de la victoire ? Est-ce que ce sera six mois ou un an ? » Deux décennies plus tard, lorsque les Allemands envahissent la Pologne, le 1er septembre 1939, Virginia Woolf a exprimé un malaise similaire : « Je ne sais pas pourquoi j’écris ceci, ni ce que je ressens ou ressentirai. Tout plane sur nous. » 

L’historienne britannique Alice Loxton juge ainsi cette anthologie : « Ce n’est pas un livre à lire d’une traite, du début à la fin, mais un compagnon vers lequel on revient au fil de l’année. Et que l’on chérit dans les moments de solitude ou de tristesse, pour le réconfort ou l’inspiration. Qui plus est, l’ouvrage est magnifiquement présenté. Il y a quelque chose de presque liturgique dans sa couverture cartonnée de couleur vert foncé, les inscriptions orange, le ruban de lecture et les pages crème aux larges bordures. »

Ces héroïnes du passé évoquées dans leurs tourments secrets ignoraient toutes les batailles qui allaient restaurer leurs droits égalitaires, pour les porter plus tard vers le statut du women empowerment.

« Mon très cher Albert a lui-même mis mes bas. Puis, je suis entrée chez lui et je l’ai vu en train de se raser  ; un grand plaisir pour moi ! » Albert n’est autre que le prince Albert de Saxe-Cobourg-Gotha, et néanmoins époux de la reine Victoria d’Angleterre et prince consort. Ces détails extrêmement personnels sont tiré d’une anthologie publiée la semaine...

commentaires (1)

Le livre paraît intéressant, l'article beaucoup moins.

F. Oscar

10 h 07, le 10 mars 2024

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Commentaires (1)

  • Le livre paraît intéressant, l'article beaucoup moins.

    F. Oscar

    10 h 07, le 10 mars 2024

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