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Politique - Décryptage

Hochstein, une courte visite et des questions sans réponses

Il a fallu quelques heures à l’émissaire présidentiel américain Amos Hochstein pour montrer les limites de sa troisième visite au Liban depuis le 7 octobre 2023. On le disait porteur d’une proposition sérieuse pour un règlement de la situation explosive au Sud, mais, lors de ses entretiens avec les responsables libanais, Nabih Berry et Nagib Mikati essentiellement, il a surtout insisté sur la nécessité de trouver un arrangement sur le long terme, indépendamment de la conclusion ou non d’une trêve entre le Hamas et les Israéliens pour le mois de ramadan.

Selon des sources proches de Aïn el-Tiné et du Sérail, Amos Hochstein a bien essayé d’alterner le bâton et la carotte, mais l’essentiel de son discours portait sur la nécessité de trouver « une solution durable » qui permettrait aux habitants des localités frontalières des deux côtés de retourner chez eux et de vivre en toute sécurité. Dans ce contexte, il n’a pas été question de la trêve qui pourrait être conclue, car elle ne serait pas en mesure d’assurer un calme durable qui pousserait les habitants à réparer leurs maisons détruites par les attaques des deux côtés de la frontière, ceux-ci ayant en effet besoin de garanties sérieuses pour retrouver une vie normale.

La trêve qui pourrait être conclue à Gaza n’a donc été évoquée par Hochstein que dans le cadre des menaces proférées à l’intention du Hezbollah, lorsqu’il a dit qu’elle pourrait ne pas s’étendre au front du Liban. La réponse libanaise a été immédiate et elle s’est résumée ainsi : le Hezbollah a déclaré à plusieurs reprises que si une trêve est conclue à Gaza, il arrêtera de facto ses opérations à partir du Sud. Par contre, si les Israéliens continuent d’attaquer le Liban, il sera contraint de riposter. En d’autres termes, le Liban a jeté la balle dans le camp israélien.

Toutes les propositions de l’émissaire américain se sont ainsi heurtées au même point de départ : le front du Liban est destiné à soutenir celui de Gaza, et par conséquent, son sort dépend de celui de cette bande. Une fois qu’une solution durable sera trouvée, on pourra parler d’un tel scénario pour le sud du Liban. Pour le Liban, les États-Unis et leurs alliés se sont soudain réveillés au sujet de l’application de la résolution 1701, lorsque les Israéliens ont commencé à craindre une extension de la guerre de Gaza au front du Liban. Sinon, de 2006 à 2023, il n’a pas été vraiment question de changer l’équation en place, même si les dispositions de la résolution 1701 (qui avait mis fin à la guerre de 2006) n’ont pas été entièrement appliquées des deux côtés de la frontière, notamment un déploiement plus important de l’armée libanaise dans la région au sud du Litani. Il y avait bien eu, notamment en 2023, une tentative d’élargir la mission de la Finul, lors du renouvellement de son mandat en août dernier, mais sur le terrain, rien n’avait pratiquement changé. Pourquoi, dans ce cas, ce sujet est-il devenu soudain primordial, si ce n’est parce que les Israéliens veulent des garanties ? Et, toujours dans la logique des autorités libanaises, si les Israéliens veulent aujourd’hui des garanties pour l’application de la 1701 et l’instauration d’un calme de longue durée des deux côtés de la frontière, indépendamment des développements à Gaza, n’est-ce pas essentiellement pour ne pas avoir d’inquiétude au sujet du front du Liban et pouvoir ainsi se concentrer sur la guerre contre les Palestiniens ? C’est d’ailleurs pour cette raison que le Hezbollah (qui reste le principal concerné, tout en se tenant derrière les responsables libanais) a lié le sort du front du Sud à celui des développements à Gaza.

De son côté, l’émissaire américain, qui considère qu’une de ses grandes réalisations dans la région est l’accord sur le tracé de la frontière maritime entre le Liban et Israël, a mis en avant cette « réussite » en essayant de proposer un arrangement du même genre pour la frontière terrestre. Un tel accord serait, selon lui, de nature à créer une situation de stabilité de longue durée, utile pour les deux parties. Mais là aussi les responsables libanais sont restés sceptiques. En effet, dans cet accord conclu juste avant la fin du mandat présidentiel de Michel Aoun en septembre 2022, le Liban n’a pas tiré les bénéfices annoncés. Israël a pu commencer à extraire le gaz et le pétrole des champs maritimes qui lui ont été reconnus dans le cadre de cet accord, alors que le Liban continue à se débattre dans des questions techniques et n’a même pas encore commencé les travaux de prospection. C’est peut-être de sa faute, mais des parties libanaises sont aussi convaincues que les États-Unis, qui étaient en quelque sorte le négociateur direct, n’ont pas fait ce qu’il fallait pour que le processus avance. Autrement dit, cet accord, qu’on avait annoncé comme étant la clé d’une page nouvelle de prospérité pour le Liban, n’a pas jusqu’à présent tenu ses promesses. Ce qui a d’ailleurs poussé certaines parties à critiquer le Hezbollah.

Pour toutes ces raisons, le Liban officiel est resté plutôt circonspect face aux propositions de l’émissaire américain, craignant qu’une fois de plus, celles-ci servent les intérêts des Israéliens. Certes, le Liban a clairement déclaré à Hochstein qu’il ne veut pas de l’élargissement de la guerre, mais il ne peut pas non plus faire des cadeaux gratuits aux Israéliens afin qu’ils puissent se concentrer sur leur projet destructeur à Gaza. Le plan en trois étapes de Hochstein pourrait être acceptable, mais de nombreuses questions sont encore sans réponses. Selon des sources proches des parties libanaises qui ont rencontré Hochstein, les discussions ont eu le mérite d’être franches et profondes, mais pour qu’elles puissent aboutir à un accord, il faudrait qu’elles ne soient pas uniquement destinées à servir les intérêts israéliens et que le Liban puisse en tirer des bénéfices.

Il a fallu quelques heures à l’émissaire présidentiel américain Amos Hochstein pour montrer les limites de sa troisième visite au Liban depuis le 7 octobre 2023. On le disait porteur d’une proposition sérieuse pour un règlement de la situation explosive au Sud, mais, lors de ses entretiens avec les responsables libanais, Nabih Berry et Nagib Mikati essentiellement, il a...

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L,ARMEE NATIONALE SEULE FORCE SUR TOUT LE SOL NATIONAL. PAS MEME UNE BALLE EN DES MAINS HORS DE L,ARMEE. UNIQUE SOLUTION VIABLE, OU LE PAYS SERAIT DES PAYS...

LA LIBRE EXPRESSION

14 h 37, le 06 mars 2024

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Commentaires (5)

  • L,ARMEE NATIONALE SEULE FORCE SUR TOUT LE SOL NATIONAL. PAS MEME UNE BALLE EN DES MAINS HORS DE L,ARMEE. UNIQUE SOLUTION VIABLE, OU LE PAYS SERAIT DES PAYS...

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 37, le 06 mars 2024

  • Mon Dieu quel bla bla pour ne rien dire

    Lecteur excédé par la censure

    09 h 01, le 06 mars 2024

  • Bonne analyse ( comme toujours). Bien sûr Honstein est complètement partial et d'après ces rencontres toutes récentes avec les membres du front des irréductibles anti-Hizb, il diminue ses chances d'être un médiateur "neutre", statut essentiel pour tout "Middle Men". Il va devoir soit attendre longtemps, soit être remplacé. Il est souvent perçu comme un oiseau de mauvaise augure..

    Raed Habib

    08 h 48, le 06 mars 2024

  • "Le Liban n’a pas tiré (de l’accord maritime) les bénéfices annoncés". Annoncés par qui? A part Aoun qui, dans son rêve, voyait déjà le Liban faire la nique aux monarchies pétrolières, personne (du moins personne de compétent) ne voyait les (modestes) bénéfices apparaître avant une dizaine d’année, et vu l’impéritie de nos "responsables", plus probablement pas avant la saint Glinglin. Et si "le Liban (...) n’a même pas encore commencé les travaux de prospection", ce n’est la faute, ni d’Israël ni de l’oncle Sam, mais tout simplement, de l’impéritie précédemment citée.

    Yves Prevost

    07 h 12, le 06 mars 2024

  • "Les dispositions de la résolution 1701 n’ont pas été entièrement appliquées"/ Un bel euphémisme. La clause la plus importante (retrait et désarmement du Hezbollah, conjointement à un renforcement de la présence de l’armée au Sud) a été totalement ignoré, d’où la situation actuelle. "Le Hezbollah a lié le sort du front du Sud à celui des développements à Gaza" et, dans ce cadre, a confié aux habitants de la région la délicate mission de recevoir sur la tête les obus et missiles israéliens!

    Yves Prevost

    06 h 56, le 06 mars 2024

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