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Société - Éducation

Les élèves les plus brillants de la génération Z veulent-ils rester au Liban ?

« L'Orient Today » a assisté au siège de l'Escwa à une séance de simulation de l'ONU (Model UN) par des élèves qui s'apprêtent à être diplômés dans un pays en pleine crise et en guerre.

Les élèves les plus brillants de la génération Z veulent-ils rester au Liban ?

Des étudiants pris en photo au siège de l'Escwa à Beyrouth, le 24 février 2024, dans le cadre d'une séance de simulation de l'ONU. Photo João Sousa/L'Orient Today

La salle de conférence remplie de lycéens, vêtus de leurs plus belles tenues professionnelles, se tait, suite aux ordres de la vice-présidente du comité de simulation de l'ONU, elle-même une camarade de classe. Elle veut qu'ils s'en tiennent au sujet traité : les sanctions économiques imposées par les États-Unis.

La Corée du Nord, représentée par une jeune fille à lunettes vêtue d'une blouse violette, aurait soumis le sujet de discussion inscrit au programme du jour : « Étudier l'efficacité des sanctions américaines dans la gestion des conflits régionaux ».

Une jeune fille représentant, elle, la Syrie au sein du comité de simulation de l'ONU se lève pour déchirer une résolution en cours de débat, la jugeant « absurde ». La Lettonie, peut-être plus diplomatique, suggère qu'une clause « devrait être supprimée parce qu'elle ne résout aucun problème ». La Palestine demande officiellement à aller aux toilettes.

À l'extérieur des murs des sessions de simulation de l'ONU qui se sont tenues au siège de l'Escwa (Commission économique et sociale des Nations unies pour l'Asie occidentale - Cesao) dans le centre-ville de Beyrouth, une guerre (également réelle) fait rage dans le sud du Liban et plus loin à Gaza, une menace pour la région à laquelle les jeunes ici vont bientôt devoir faire face.

Simulation d'une réunion de la Commission économique de l'ONU dans le bâtiment de l'Escwa à Beyrouth, le 24 février 2024. Photo João Sousa/L'Orient Today


Simulation d'une réunion de la Commission économique de l'ONU dans le bâtiment de l'ESCWA à Beyrouth, le 24 février 2024. Photo João Sousa/L'Orient Today

Mais aujourd'hui, les adolescents se contentent de s'entraîner. À l'intérieur de leur simulation de conférence des Nations unies, organisée par l'American Community School (ACS), une école privée de Beyrouth, la majorité des participants sont des enfants de l'élite libanaise et internationale. Ils sont ici pour s'entraîner à résoudre le problème du trafic mondial de drogue, à s'attaquer à l'intelligence artificielle et à réformer le système abusif de la kafala (garantie) pour les travailleurs étrangers. Il y a même une simulation de génocide à la Cour internationale de justice, centrée sur la guerre en Ukraine.

Les décisions qu'ils ont prises ce week-end dans le cadre de la simulation de l'ONU pourraient donner une idée de ce qui attend la génération Z du Liban, née entre la fin des années 1990 et 2010 environ. À l'exception d'un seul, tous les jeunes qui ont participé à la simulation de l'ONU et avec lesquels L'Orient Today s'est entretenu ont indiqué qu'ils prévoyaient d'obtenir leur diplôme universitaire en dehors du Liban et de commencer leur carrière à l'étranger également. Léa el-Hage, élève de terminale, responsable presse de l'événement, explique qu'elle attend les réponses des universités auxquelles elle a postulé, toutes situées dans les régions de Boston et New York.

Léa el-Hage, élève de terminale, responsable presse de la simulation de l'ONU organisée par l'American Community School (ACS) à l'Escwa, le 24 février 2024. Photo João Sousa/L'Orient Today

« Je crois que je vais débuter ma carrière aux États-Unis, mais je veux revenir ici et peut-être y travailler à l'avenir », dit-elle. Andy Economakis, 14 ans, est trop jeune pour s'inscrire à l'université, mais il dit vouloir étudier et poursuivre une carrière dans la finance aux États-Unis, « de préférence sur la côte est ».

Selon le chef d'établissement, l'Américain Tom Cangiano, les deux tiers des quelque 1 000 étudiants de l'AEC sont titulaires d'un passeport libanais, y compris d'une double nationalité. Nombre d'entre eux appartiennent à des « groupes socio-économiques supérieurs » en raison des frais de scolarité élevés de l'école et poursuivent des études d'économie, de finance et de commerce, bien que certains se dirigent également vers les arts et le design, comme l'ancien étudiant et célèbre acteur canado-américain né à Beyrouth Keanu Reeves.

Une affiche lors d'une simulation des Nations unies organisée par l'American Community School (ACS) dans le centre-ville de Beyrouth, le 24 février 2024. Photo João Sousa/L'Orient Today

Une carte affichée dans le couloir de l'école, à l'extérieur du bureau de M. Cangiano, montre la répartition des anciens élèves à travers le monde – le plus grand nombre, 2 229, se situant au Moyen-Orient, tandis que les États-Unis et le Canada arrivent en deuxième position avec 2 189 anciens élèves.

Durant ces quatre dernières années, le pays a traversé une grave crise économique, le port de la capitale a connu une explosion et le risque d'une guerre ouverte avec Israël est bien là. Autant d'éléments qui dissuadent les jeunes diplômés de rester au Liban. Les professionnels qualifiés et éduqués qui ont les moyens de partir ont émigré en masse.

Yousser el-Dabbagh, élève de troisième, assiste à une simulation des Nations unies organisée par l'American Community School (ACS) dans le centre-ville de Beyrouth, le 24 février 2024. Photo João Sousa/L'Orient Today

Résultat : près des deux tiers des jeunes Libanais âgés de 18 à 29 ans affirment vouloir émigrer, selon une étude réalisée en 2020-2022 par l'Arab Barometer.

Rouqaya Mansour, la jeune fille qui a joué le rôle de la Syrie déchirant la résolution de l'ONU le week-end dernier, espère se retrouver en Floride après avoir obtenu son diplôme, ayant de la famille dans la région de Tampa. Cependant, elle n'a que 16 ans et n'est qu'en classe de première, elle n'a donc pas encore fait de demande d'inscription à l'université. Elle espère étudier aux États-Unis et travailler dans les ressources humaines.

Qu'est-ce qui a poussé une jeune fille de 16 ans, passionnée de romans de science-fiction, à embrasser une carrière dans le domaine des ressources humaines ? « J'aime être une meneuse de troupes », dit Rouqaya Mansour.

Pendant ce temps, les enfants, dont les familles n'ont pas les moyens de payer les frais de scolarité dans le secteur privé, ont de moins en moins d'options. Le gouvernement n'a approuvé qu'un tiers du budget total demandé par le ministère de l'Éducation pour l'année scolaire 2023-2024, qui a commencé avec des semaines de retard, sacrifiant ainsi un temps d'apprentissage précieux. La plupart des élèves libanais ont maintenant un ou deux ans de retard par rapport à leur niveau scolaire, a constaté Human Rights Watch en 2023. D'autres ne vont tout simplement plus à l'école depuis quelques mois, en raison des frappes israéliennes dans le sud du Liban.

Jamal Jamal, 15 ans, assiste à une simulation des Nations Unies organisée par l'American Community School (ACS) dans le centre-ville de Beyrouth, le 24 février 2024. Photo João Sousa/L'Orient Today

Lorsque ces enfants parviennent à obtenir leur diplôme, ils sont confrontés à un marché du travail où le taux de chômage est de 29,6 %, selon les derniers chiffres publiés par l'Administration centrale de la statistique du gouvernement. S'ils travaillent dans le secteur public, dans l'armée ou dans le secteur informel, ils gagneront leur vie en livres libanaises, alors que la monnaie nationale a perdu plus de 98 % de sa valeur depuis le début de la crise économique en 2019.

Les élèves du groupe de simulation de l'ONU se disent conscients de ces problèmes.

Lorsqu'on lui demande quel est le plus grand défi du Liban aujourd'hui, Yousser el-Dabbagh, élève de troisième qui veut devenir architecte, n'hésite pas : « La crise économique sans doute. » « La crise financière, le problème des banques », répond pour sa part Léa el-Hage. « L'économie », estime Andy Economakis, le futur banquier d'affaires.

Valéria Bkassini, qui représente la Chine à l'Assemblée générale fictive et qui n'avait que neuf ans lorsque la crise économique a commencé, estime que le plus gros problème est le « manque de liberté d'expression ». « Ce qui se passe au Liban, c'est que tout le monde prend parti, personne ne s'écoute, ajoute Jamal Jamal, 15 ans. C'est une très mauvaise chose. » Yousser el-Dabbagh, pour sa part, ne sait pas comment elle pourrait résoudre les crises du pays.

La salle de conférence remplie de lycéens, vêtus de leurs plus belles tenues professionnelles, se tait, suite aux ordres de la vice-présidente du comité de simulation de l'ONU, elle-même une camarade de classe. Elle veut qu'ils s'en tiennent au sujet traité : les sanctions économiques imposées par les États-Unis. La Corée du Nord, représentée par une jeune fille à lunettes vêtue...

commentaires (2)

Rappel : La génération Z c'est la génération ZOMBIES : Ceux rivés sur leurs smartphones dans la rue, chez eux et partout. Déjà le Z est péjoratif :)

LE FRANCOPHONE

17 h 51, le 02 mars 2024

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Commentaires (2)

  • Rappel : La génération Z c'est la génération ZOMBIES : Ceux rivés sur leurs smartphones dans la rue, chez eux et partout. Déjà le Z est péjoratif :)

    LE FRANCOPHONE

    17 h 51, le 02 mars 2024

  • Intéressant... surtout qu'aucun de nos jeunes ne semble avoir mentionné les assassinats qui ont fait taire des voix et des penseurs phares de l'avenir, tel que Lokman Slim, Gebran Tueni, et beaucoup d'autres.

    Wlek Sanferlou

    15 h 47, le 02 mars 2024

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