La grève des enseignants des écoles privées au Liban, qui devait commencer à partir du mardi 23 janvier, n'aura finalement pas lieu, a indiqué lundi à L'Orient-Le Jour le ministère de l'Éducation, contacté par notre correspondante Hoda Chédid.
Un accord a en effet été trouvé entre les enseignants et les écoles privées, concernant les salaires des professeurs à la retraite, durement affectés par l’effondrement de la livre libanaise en quatre ans de crise. Il a été signé lors d'une réunion qui s'est tenue lundi à 17h entre les établissements éducatifs privés et le syndicat des enseignants. Ce dénouement était attendu par le bureau du ministre qui avait annoncé dans un communiqué plus tôt dans la journée que cet « accord d'entente » allait être signé.
Avant 17h, le secrétaire général des écoles catholiques, le père Youssef Nasr, à la tête du regroupement des institutions éducatives privées, avait déclaré à la chaîne LBCI qu'il participerait à cette réunion et que l'accord prévoyait notamment de verser « un certain montant, par élève, dédié aux enseignants retraités », sans plus de détails sur le mécanisme choisi.
Le président du syndicat des enseignants Nehmé Mahfoud n'était, lui, pas satisfait par certaines dispositions initalement annoncées. Il considérait notamment que le montant consacré aux retraités et s'élevant à 900.000 LL par élève (environ 10 dollars au taux du marché parallèle), au lieu d'1.000.000 LL (environ 11 dollars), comme convenu précédemment, ne permettrait pas de réunir les 60 milliards de livres requis pour multiplier les salaires des retraités par 6.
Dans la copie de l'accord diffusé après qu'il ait été signé, il semble que le syndicaliste ait finalement décidé d'accepter le montant de 900.000 LL par élève, inscrit au premier article et qui sert de base au calcul d'une somme qui sera versée en trois fois entre le 15 février et le 15 juin de cette année. Les fonds devront être versés sur un compte en livres libanaises "fresh", et non pas sur l'un des anciens comptes sur lesquels s'appliquent des restrictions bancaires sur les retraits - une distinction née avec la crise qui a éclaté en 2019.
Le dossier des enseignants retraités suscite des remous depuis le 15 décembre 2023, date de l'adoption par le Parlement d'une loi multipliant par six la retraite mensuelle des enseignants et imposant aux établissements privés de verser à la Caisse des retraites des enseignants un montant qui représente désormais 8 % du salaire de chaque enseignant (contre 6 % précédemment), aides en dollars comprises. De leur côté, les enseignants devront verser à la caisse 8 % de leur salaire versé en LL (contre 6 % précédemment). Les établissements ont aussi l'obligation, notamment, de présenter un quitus de la Caisse des retraites prouvant qu'ils se sont bien acquittés de leur contribution.
Des salaires entre 17 et 33 dollars
« Je comprends tout à fait les demandes des enseignants, ils ont le droit à une retraite digne et il faut faire quelque chose pour améliorer leurs conditions. Le seul problème, avec toutes ces grèves, c'est que les élèves n'arrivent plus à se concentrer. Les enfants ne sont plus sérieux, il y a un relâchement généralisé », a commenté Carine Khalil, mère de famille dont les enfants sont scolarisés dans un établissement catholique.
Le 16 janvier, un accord de principe avait été trouvé à l'issue d'une réunion chez le ministre Halabi, en présence de Nehmé Mahfoud et du père Youssef Nasr, ainsi que des représentants des comités de parents d’élèves, avant de tomber à l'eau. Les enseignants avaient ensuite décidé d'entamer une grève le 23 janvier, après que les institutions scolaires aient fait marche arrière.
Avec cette grève, le syndicat des enseignants entendait « protester contre les institutions qui continuent de priver plus de 4.000 enseignants retraités de leur gagne-pain, les laissant à leur sort avec un salaire de trois millions de livres libanaises par mois, après 40 ans de service dévoué à l'éducation ».
Formellement rejetée par les écoles privées lors de son adoption, la loi votée le 15 décembre avait poussé le Secrétariat général des écoles catholiques à déclarer une grève fin décembre, avant de la suspendre début janvier.
Les enseignants, eux, réclament que le sort des retraités de l’enseignement privé soit amélioré, car leurs mensualités ne valent plus rien depuis l’effondrement de la livre libanaise, oscillant entre un million et demi et trois millions de livres libanaises, soit entre 17 et 33 dollars au taux du marché.
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23 h 54, le 22 janvier 2024