Les joueurs de Sepahan quittant la pelouse du Naghsh-e-Jahan Stadium en raison de la suspension de la rencontre entre al-Ittihad en Ligue des champions asiatique qui était censée avoir lieu le 2 octobre. Morteza Salehi/AFP, via Tasnim Agence iranienne d’information
La réconciliation avait été tonitruante. Signée le 10 mars sous l’égide de Pékin, la normalisation surprise entre l’Arabie saoudite et l’Iran présageait d’une baisse des tensions entre les deux puissances régionales. Et les gestes symboliques se sont enchaînés, de la réouverture des ambassades respectives aux visites ministérielles. Sans oublier le domaine du soft power, avec le premier match de football le 19 septembre d’un club saoudien sur le sol iranien depuis la rupture des relations diplomatiques entre les deux pays en 2016. A l’occasion de cette rencontre dans le cadre de la Ligue des champions asiatique, Cristiano Ronaldo avait été accueilli en héros à Téhéran avec l’équipe saoudienne d’al-Nassr, qui l’a signé fin décembre 2022. Le président du club adverse, le Persepolis FC, avait même demandé à ce que des cartes SIM spéciales soient distribuées aux joueurs étrangers pour leur permettre d’accéder à l’internet sans restrictions. De quoi afficher une chaude réconciliation. Du moins en façade.
Car la rencontre footballistique prévue lundi entre les clubs saoudien d'al-Ittihad et iranien de Sepahan et comptant aussi pour la Ligue des champions d’Asie a quant à elle été annulée. « En raison de circonstances inattendues et qui n'avaient pas été anticipées », a annoncé sans plus de détail la Confédération asiatique (AFC). En cause, selon un responsable de l’équipe saoudienne, la présence sur les abords du terrain de bustes à l’effigie du général Kassem Soleimani, chef des opérations extérieures des Gardiens de la révolution iranienne, assassiné à Bagdad par une frappe américaine en janvier 2020. « C'est juste un match de football et la présence de ce buste est tout à fait inappropriée », a-t-il déclaré à l'AFP. « Nous leur avons demandé de le déplacer avant de rentrer sur le terrain pour l'échauffement mais ils ne l'ont pas fait. L'équipe est donc retournée dans les vestiaires. »
L’agence de presse semi-officielle iranienne Tasnim a pour sa part montré des vidéos de l’équipe d’al-Ittihad, où évoluent notamment Karim Benzema, Fabinho et N'Golo Kanté, s’entraînant la veille sur le bord du terrain, à proximité des bustes du général assassiné. Après l’annulation du match, le directeur général de l'équipe de Sepahan, Mohammed Reza Saket, a immédiatement annoncé à la télévision d'Etat iranienne son intention de déposer plainte auprès de l'AFC à propos de cet incident. « La demande du club d'al-Ittihad allait au-delà des coutumes sportives et contre les usages habituels », a-t-il estimé. Le stade d'Ispahan, où devait avoir lieu la rencontre, « a accueilli des dizaines de matches internationaux dans la même configuration », a-t-il fait valoir, alors que les tribunes se sont vidées des spectateurs venus en masse pour assister au match.
Mais Kassem Soleimani avait déjà été à l’origine d’un mini incident diplomatique lors du premier déplacement du ministre saoudien des Affaires étrangères à Téhéran à la mi-juin. Selon plusieurs médias, les membres de la délégation de Fayçal ben Farhane, auraient demandé aux Iraniens de changer de salle pour une conférence de presse conjointe entre les deux chefs de la diplomatie, en raison de la présence au mur d’un portrait du général assassiné. Une requête à laquelle avaient accédé leurs interlocuteurs. Chef des forces al-Qods, le tout-puissant militaire était en effet responsable de la coordination avec les supplétifs de Téhéran dans la région, notamment les rebelles houthis du Yémen, qui ont revendiqué de nombreuses attaques de missiles et de drones sur le territoire saoudien. L’arrêt de ces agressions est aujourd’hui une priorité du rapprochement saoudo-iranien, qui a conduit l’Iran a accepté de suspendre l’envoi d’armes et de munitions au groupe rebelle, selon des responsables américains et saoudiens cités par le Wall Street Journal - ce qu’il avait pourtant toujours nié.
commentaires (2)
Comme déjà dit: cette soi disant paix est contre nature. Il y a beaucoup plus d’atomes crochus entre les israéliens et leur vision du futur avec MBS que les saoudiens avec les intégristes islamistes d’iran. Tout comme l’accord contre nature du CPL majoritairement chrétien dont les électeurs voyagent , étudient et bossent en occident dont les USA … et le Hezbollah fermé, borné dans ses idées obtues et islamistes. Cet accord irano saoudien est conclu en marche forcée mais aucune conviction et confiance de part et d’autre.
LE FRANCOPHONE
14 h 58, le 03 octobre 2023