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Timothée de Fombelle : Le petit livre qui accompagne toute une vie, c’est mon rêve !

Que ce soit à travers de grandes sagas telles que Tobie Lolness, Vango, ou aujourd’hui Alma ou des textes plus courts (Capitaine Rosalie, Le Livre de Perle…), Timothée de Fombelle est l’une des figures phares de la littérature jeunesse contemporaine.

Timothée de Fombelle : Le petit livre qui accompagne toute une vie, c’est mon rêve !

Vous avez d’abord eu une pratique de l’écriture pour le théâtre. Comment s’est imposée ensuite pour vous l’écriture romanesque pour la jeunesse ? L’écriture pour la scène a-t-elle toujours une place dans votre manière d’écrire des romans aujourd’hui ?

Oui, je viens du théâtre un peu comme Antoine de Saint-Exupéry disait : « Je viens de mon enfance comme d’un pays » ! Le théâtre est le pays où j’ai appris à écrire, à fabriquer des histoires, à tenter de garder des spectateurs dans la salle… Enfant et adolescent, j’ai créé des troupes de théâtre qui étaient mon laboratoire d’écriture. Dans mes romans, il en reste forcément quelque chose. Au théâtre, le dialogue, par exemple, ne peut pas être décoratif : il agit. Le meilleur enseignement de la scène a été d’une part le plaisir du jeu, d’autre part celui de penser toujours à créer un espace concret dans mes romans : le lieu, les sensations, les corps, les voix, l’émotion…

Tobie Lolness, Vango et maintenant Alma. Vous travaillez souvent sur de grandes fresques. Quel est selon vous le plaisir particulier de l’écriture sur des formats longs ?

Étrangement, j’ai une passion pour les formats courts et j’ai bien l’intention d’en écrire. Le petit livre qui accompagne toute une vie, c’est mon rêve ! Mais j’aime la générosité de la saga qui permet de passer son temps à faire des promesses au lecteur et d’être ensuite obligé de les tenir. La forme longue est donc une manière de me dépasser, d’être imprudent. Je suis incapable de faire des personnages secondaires, je me retrouve donc souvent avec cinquante personnages principaux… Par ailleurs, il y a un aspect que les auteurs évoquent rarement mais qui compte aussi : je cherche l’endroit où je peux être utile, mon savoir-faire particulier, ce que j’espère faire un tout petit peu mieux que la moyenne. Je le dis parfois à des jeunes lecteurs que je rencontre, qui cherchent leur métier et qui pensent seulement à se demander ce qu’ils aiment. Moi, je sens que, indépendamment du plaisir, ces fresques en un, deux ou trois volumes sont le type d’écriture pour lequel j’ai une boîte à outils que j’ai le devoir d’utiliser.

Vous travaillez actuellement sur une trilogie, Alma, explorant le thème de l’esclavage, et dont deux tomes sont d’ores et déjà sortis. Cet ancrage dans une lourde réalité a-t-il changé votre manière d’écrire ? Quelle place pour la fiction, le souffle de l’aventure, dans un tel projet ?

C’est vrai que pour la première fois, j’écris avec la préoccupation de témoigner, de raconter ce crime de la traite des esclaves. C’est un sujet qui m’habite depuis l’adolescence. Mais j’ai tout de suite senti que le meilleur moyen d’embarquer avec moi d’autres personnes que les gens déjà sensibles à cette mémoire, c’était d’oser la fiction, l’imaginaire. J’ai donc ressorti cette boîte à outils dont je parlais. Je sentais que je devais sortir cette tragédie d’un récit purement mémoriel ou documentaire pour l’intégrer à notre imaginaire commun. Le roman permet cela. Le seul moyen pour moi est d’être toujours d’une précision historique absolue sur ce que je décris, pour pouvoir à d’autres moments prendre le large et rappeler les vies, les amours, les héroïsmes, qu’il y a derrière chacun des presque quinze millions d’Africains déportés pendant plusieurs siècles vers l’Amérique.

Est-ce la première fois que vous visitez le Liban ?

Les deux dernières fois où j’ai espéré venir, le voyage a été annulé à cause de différents événements, alors vous imaginez mon bonheur de découvrir enfin le Liban ! Oui, c’est ma première visite. Mais j’ai l’impression d’être familier de ce pays depuis très longtemps, grâce aux Libanais que j’ai rencontrés toute ma vie.

Propos recueillis par Ralph Doumit

Alma (tome 1) : Le Vent se lève de Timothée de Fombelle, Gallimard jeunesse, 2020, 400 p.

Alma (tome 2) : L’Enchanteuse de Timothée de Fombelle, Gallimard jeunesse, 2021, 432 p.

Timothée de Fombelle au festival :

Le grand atelier de Timothée de Fombelle, dimanche 8 octobre à 11h, ESA, Grande Scène.

Tobie Lolness, la série animée !, projection du premier épisode de la série tirée de l’œuvre de Timothée de Fombelle, dimanche 8 octobre à 12h30, ESA, Auditorium Fattal.

Vous avez d’abord eu une pratique de l’écriture pour le théâtre. Comment s’est imposée ensuite pour vous l’écriture romanesque pour la jeunesse ? L’écriture pour la scène a-t-elle toujours une place dans votre manière d’écrire des romans aujourd’hui ?Oui, je viens du théâtre un peu comme Antoine de Saint-Exupéry disait : « Je viens de mon enfance comme d’un...

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