L'émissaire de l’Élysée pour le Liban, Jean-Yves Le Drian, a espéré mardi, depuis le Grand sérail, que l'initiative lancée par le président de la Chambre, Nabih Berry, pour tenter de débloquer la présidentielle au Liban constituera « un début de solution ». Fin août, le chef du Législatif s’était engagé à tenir des séances électorales ouvertes au Parlement, à condition qu’elles soient précédées d’un dialogue élargi qui réunirait les chefs des groupes parlementaires à l’hémicycle pendant sept jours. Saluée par le Hezbollah et le Courant patriotique libre, son initiative a été critiquée par l’opposition. Le chef de l'Eglise maronite Béchara Raï a, lui, indirectement encouragé les députés à participer au dialogue.
Arrivé la veille à Beyrouth, Jean-Yves Le Drian a entamé ce matin sa troisième tournée auprès des protagonistes locaux, axée sur l'impasse présidentielle, alors que le pays connaît une vacance à la magistrature suprême depuis bientôt onze mois. Après une réunion avec le Premier ministre sortant Nagib Mikati, l'émissaire français a également rencontré le président Berry. Il s'est ensuite entretenu avec le commandant en chef de l'armée, le général Joseph Aoun. Les deux hommes ont discuté de la situation sécuritaire dans le pays et des défis auxquels l'institution militaire est confrontée, qu'il s'agisse de ceux liés à l'entrée clandestine de migrants syriens au Liban ou à la situation explosive des (réfugiés) palestiniens installés depuis 1948. Jean-Yves Le Drian a assuré que « la France continuait de soutenir l'armée pour renforcer ses capacités ».
Plus tard dans la soirée de mardi, M. Le Drian a rencontré le chef du parti Marada, Sleiman Frangié, candidat à la présidence soutenu par le Hezbollah et le mouvement Amal. M. Frangié a reçu l'émissaire français, ainsi que le nouvel ambassadeur de France Hervé Magro au domicile de son fils, le député Tony Frangié, à Beyrouth.
Le parti Marada a indiqué dans un communiqué que, « la situation politique actuelle et les moyens de mener à bien les élections présidentielles ont été examinés pendant la réunion, à la lumière de toutes les crises pressantes et urgentes. L'importance du dialogue a été réaffirmée en tant qu'élément fondamental et nécessaire pour parvenir à élire un président le plus tôt possible ».
Jean-Yves Le Drian a également rencontré le chef du Courant patriotique libre (CPL), Gebran Bassil.
Solution consensuelle
Prenant la parole lors d'un point presse mardi, la porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Anne-Claire Legendre, a précisé que l'objectif de la visite de M. Le Drian est de faire émerger « une solution consensuelle au Parlement pour sortir de la vacance institutionnelle ». « Je ne vais pas préjuger des résultats d'une mission qui vient tout juste de commencer », a-t-elle par ailleurs ajouté, rappelant que l'émissaire était arrivé lundi soir.
« Nous espérons que les dirigeants libanais entendent l'urgence qui est exprimée par la France », a-t-elle ajouté, ajoutant que Jean-Yves Le Drian travaillait « en coordination » avec les partenaires dans la région. « Dans le prolongement des contacts noués lors de ses premières missions, il s'entretiendra une fois encore avec tous les acteurs politiques représentés au Parlement, et qui ont la responsabilité d'élire le président de la République », a également déclaré Mme Legendre.
Depuis des mois, la France réaffirme qu'il y a « urgence à élire un président, première étape de la remise en marche des institutions politiques », a ajouté la porte-parole. Elle a également regretté « l'affaiblissement préoccupant des institutions publiques » avec l'absence de gouverneur à la Banque du Liban et « un Parlement qui ne se réunit plus pour voter les lois indispensables au redressement du pays ».
Le Drian « poursuit sa mission »
A son arrivée à Beyrouth, l'émissaire français s'était d'abord entretenu avec Nagib Mikati, en présence du nouvel ambassadeur de France au Liban, Hervé Magro. Selon le Grand Sérail, le chef du gouvernement sortant a souligné que « l'élection d'un nouveau président au Liban et la mise en place de réformes économiques, notamment les projets entre les mains du Parlement, visant à mettre le pays sur les rails du redressement, constituent un début de solution à la crise actuelle au Liban ». De son côté, Jean-Yves Le Drian a affirmé, selon la présidence du Conseil, qu'il est « revenu au Liban pour poursuivre sa mission », notant qu'il ne fera pas de déclaration avant de poursuivre ses réunions et contacts aujourd'hui. Il a aussi espéré que « l'initiative du président de la Chambre Nabih Berry sera un début de solution ».
Jean-Yves Le Drian s'est par la suite concerté avec le président du Parlement. Il doit également rencontrer le chef du Courant patriotique libre (CPL) Gebran Bassil et le leader des Marada Sleiman Frangié. Il se concertera mercredi avec le chef des Forces libanaises Samir Geagea, des Kataëb Samy Gemayel, l'ex-candidat à la présidentielle Michel Moawad, des députés de l'opposition et le chef de l'Eglise maronite Béchara Raï.
La nouvelle visite de M. Le Drian intervient dans un contexte marqué par l’échec des initiatives visant à réunir un dialogue national autour de la présidentielle préalablement au scrutin, qu’il s’agisse de la sienne ou, dernièrement, de celle du président de la Chambre Nabih Berry.
Plusieurs composantes de l’opposition ont déjà exprimé leur refus de répondre par écrit au questionnaire envoyé en amont et censé paver la voie à un dialogue avec le Hezbollah autour de cette échéance. Selon les informations de notre journal, ce camp a mandaté le député Michel Moawad, qui a donné une réponse officielle orale (via l’ambassade de France à Beyrouth) aux questions de l’ex-chef de la diplomatie française.
commentaires (21)
Hélas, cela nous fait bien réaliser que le Liban ne peut plus s’en sortir sans aides extérieures, c'est bien triste....
Vero M
07 h 52, le 14 septembre 2023