Un projet de loi vise à freiner l’utilisation abusive de l’eau par l'Arabie saoudite en Arizona

« L’eau et les cultures de l’Arizona appartiennent à l’Arizona, pas à l’Arabie saoudite », fustige le représentant démocrate de cet État du sud-ouest américain à la Chambre des représentants, Ruben Gallego, qui a présenté au Congrès un projet de loi visant à réduire la surconsommation en eau des entreprises non-américaines. Déjà en difficulté à cause de la sécheresse, l'Arizona loue ses terres à des entreprises saoudiennes, très gourmandes en eau.

Le projet de loi sur la protection des eaux domestiques de 2023 prévoit de taxer à hauteur de 300 % les ventes des cultures trop gourmandes en eau à des entreprises étrangères. Les fonds issus de ces taxes seraient utilisés pour lutter contre la sécheresse.

Dans le communiqué de presse présentant le projet de loi, l'Arabie saoudite est directement pointée du doigt. « Alors que nos communautés en Arizona ressentent les effets intenses de la crise climatique et de la sécheresse prolongée, nous sommes simultanément dépouillés par des entreprises saoudiennes de notre ressource la plus précieuse, notre eau », affirme le député démocrate et co-signataire de la loi, Raúl Grijalva.

Mise en cause par les deux législateurs, la filiale Fondomonte - une exploitation agricole appartenant au géant laitier saoudien Almarai Company - loue des terres agricoles à l'Arizona pour cultiver de la luzerne, une plante exportée pour nourrir les vaches au Moyen-Orient, car sa culture est interdite en Arabie saoudite, justement du fait de ses forts besoins en eau.

Trois millions de dollars

Selon le communiqué de M. Gallego, le département des terres de l’Arizona rapporte que la société utilise jusqu'à 22 millions de mètres cubes d'eau par an, soit une quantité suffisante pour alimenter 54 000 foyers. S'ajoute à cela le fait que Fondomonte ne paie que 25 dollars par acre (4000m2) pour l’eau qu’elle utilise, soit un sixième du prix du marché pour le terrain, rapportait Middle East Eye en 2022.

Un manque à gagner et un coût sociétal qui pèse sur l’État. L'estimation du prix de la consommation d'eau de l'entreprise par an serait de 3 à 3,9 millions de dollars. « Nous ne pouvons pas nous permettre de donner franchement notre eau à qui que ce soit, et encore moins aux Saoudiens », a déclaré la procureure générale (démocrate) de l'Arizona, Kristin Mayes, qui décrie leur utilisation de « millions et millions de précieux gallons d’eau souterraine ».

Les dirigeants de l’État du sud-ouest ont récemment signalé leur intention de mettre fin à leur accord avec Fondomonte. Au-delà du royaume saoudien, la société des Émirats arabes unis Al-Dahra cultive 30 000 acres (12000 hectares) de luzerne, d’ail et d’oignon en Arizona et en Californie, indique le site Web de l'entreprise.

Un rapport de 2020 du Département des ressources en eau de l’Arizona, a révélé que les niveaux des eaux souterraines du bassin de Willcox, dans le sud-est de l’État, avaient chuté d’environ 2,5 mètres par an dans certaines régions de 2008 à 2018. Alors que les entreprises saoudiennes et émiraties continuent de pomper l’eau des aquifères, le Middle East Eye indique que les scientifiques craignent qu'elles puisent dans les ressources à un rythme tel qu'elles ne pourront pas être reconstituées.