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Culture - GOD SAVE THE PUNKS 2/3

Squid, le poulpe le plus surprenant d’outre-Manche

Dans ce deuxième opus de notre série autour de la très foisonnante scène musicale londonienne underground, « Squid », un groupe originaire de Brighton, empruntant des sonorités du rock progressif, du post-punk britannique, de la new wave et du krautrock allemand.

Squid, le poulpe le plus surprenant d’outre-Manche

Les 5 amis brightonais du groupe Squid. Photo Studio UJ Facebook Squid

Dans un champ à côté de Brighton, petite station balnéaire au sud de Londres. Au détour d’un chemin, une silhouette se dessine entre les collines anglaises. 

La pochette d’un album – la vitrine ou l’apéritif de l’œuvre en quelque sorte – porte souvent en elle des indices sur la ou les genres de musique(s) qu’elle propose. Celle de Squid, groupe de post-punk anglais originaire de Brighton, ne fait pas exception. Dans ce Bright Green Field (champ clair et vert), une ambiance sonore se dessine, elle provient des tréfonds de la mémoire. Cette musique est semblable à la silhouette aperçue, difficilement identifiable. Ces notes, on les reconnaît, mais dur de se rappeler leur provenance, de revenir à leur source.



La pochette du premier album du groupe Bright Green Field. Photo DR

Empruntant des sonorités du rock progressif, du post-punk britannique, de la new wave et du krautrock allemand, comme beaucoup de groupes anglais contemporains, difficile de dire avec précision le mouvement auquel ce groupe appartient. Squid compte 5 membres : Ollie Judge en voix principale et à la batterie, Louis Borlase à la basse le plus souvent, Arthur Leadbetter au clavier et autres percussions, Laurie Nankivell à la guitare et Anton Pearson en percussionniste, bassiste, guitariste et voix secondaire. Ce joyeux petit monde commence à jouer ensemble en 2015 avec, à ses débuts, des sonorités très jazzy. L’alchimie se créée entre les musiciens et ils décident en 2017 qu’il est temps de passer à l’étape supérieure. Fans de Beak, ils s’en inspirent pour se donner un nom. « J’étais obsédé par Beak à l’époque, confie Ollie dans une interview pour Télérama en 2019, on cherchait un nom similaire, monosyllabique, sur un thème animal. Arthur a alors crié : Squid ! (calmar). »


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Le groupe s’éloigne alors du jazz pour se concentrer sur le punk. Un tournant qui inscrit le groupe, au même titre que Black Country, New Road et King Krule sur la scène post-punk londonienne. Ollie, tout comme Phil Collins des Genesis, est un batteur/chanteur, cela rend ses performances sur scène extrêmement impressionnantes. Une caractéristique retrouvée dans les groupes originaires d’Angleterre. Alors que les artistes américains et australiens produisent des albums à la chaîne, chez les Brits, on préfère les performances et des sorties plus espacées dans le temps. Attention ! Rapidité ne rime pas avec médiocrité. L’exemple de King Gizzard and the Lizzard Wizzard nous prouve bien qu’on peut sortir deux à trois albums par an et rester constant dans la qualité musicale apportée. Cependant, force est de constater que la nouveauté et la diversification des titres et des performances ne se font pas en un an.



Des influences britanniques… mais surtout allemandes

Pour comprendre d’où vient cette sonorité si particulière, il faut se tourner vers la scène de prog-rock anglais et du krautrock allemand. Bien que le groupe ne l’ait jamais avoué en interview, l’inspiration King Crimson se ressent. Écoutez donc Documentary Filmmaker de l’album Bright Green Field et comparez-la à Discipline de l’album éponyme, sorti en 1981, de King Crimson. L’inspiration dans la rythmique et le choix de la gamme est assez flagrante. Les influences majeures du groupe tentaculaire restent les punks allemandes. Avec Kraftwerk, Can et Neu !, pour citer les plus connus. Ollie cite comme influence majeure des groupes moins connus comme Amon Düül II. Dans une interview pour la plateforme 3voor12, Arthur cite DUDS comme leur plus grande influence musicale. Squid est un groupe soudé, leurs musiques sont toutes composées et enregistrées avec tous les membres du groupe présent. Un esprit de camaraderie qui se ressent dans leur album et dans leurs singles.



Bright Green Field et le début de la « fame »

Affirmer que le début de la popularité des 5 amis brightonais débute avec « BGF » serait omettre le succès médiatique de Houseplants. Ce single n’a pourtant rien à envier à son petit frère. C’est sur les bases de cette chanson que se construit le début de leur premier album. Le message véhiculé par ce premier petit succès pose les bases de leur combat. « On veut dire à tout le monde que tout ira bien, mais avec colère. » Confidence faite à Studio Brussel par Ollie et son groupe. Bright Green Field est à notre avis « un patchwork » de ce qui se fait de mieux en matière de musique anglaise en ce moment. L’album s’ouvre sur Resolution Square et G. S. K., jusque-là tout va bien, ce sont des sonorités que l’on retrouve dans le rock post-progressif agrémentées de cette voix résonnante qui plait décidément beaucoup au public londonien. Et là, arrive Narrator. Tout se passe bien au début de la musique, le genre est respecté, le post-prog est assumé. À 2 min 38, s’installe l’ambiance expérimentale qui ravit les fans de « BGF ». La voix de Martha Skye Murphy, douce, presque inaudible plonge l’auditeur dans un univers sonore saturé. Un Horror Vaccui (peur du vide) peu commun dans le post-punk actuel. Un rythme mécanique et « aquatique », comme le définit Ollie qui charme et emmène dans la dimension du groupe. La batterie reste simple, le chanteur/batteur avoue qu’il est difficile pour lui de jouer en concert un rythme complexe et de chanter en même temps. Une marge de progression est donc encore possible pour ce groupe qui n’a pas fini de surprendre.


Squid au Wide Awake festival de 2021. Les concerts live de Squid sont le meilleur moyen de cerner la « vibe » électrique et mécanique du groupe de post-punk londonien. Photo Creative commons

Ce qui est intéressant avec ces joyeux enragés, c’est leur lieu de concert pendant leurs tournées au Royaume-Uni. Ils sont habitués à jouer dans des petits villages, bien que ces derniers ne soient pas forcément habitués à ce genre de musique. Une manière pour eux de démocratiser le genre en dehors de la capitale. Squid est en tournée européenne depuis le 11 juin, avec un premier concert à Bristol, ils seront sur la scène de Montmartre à Paris le 25 septembre. Comme le dit si bien le groupe, « c’est important de mettre un visage sur un nom ».

Dans un champ à côté de Brighton, petite station balnéaire au sud de Londres. Au détour d’un chemin, une silhouette se dessine entre les collines anglaises. La pochette d’un album – la vitrine ou l’apéritif de l’œuvre en quelque sorte – porte souvent en elle des indices sur la ou les genres de musique(s) qu’elle propose. Celle de Squid, groupe de post-punk...

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