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Lifestyle - Rencontre

Youmna Bou Hadir, la Voix

Révélée dans la comédie musicale « Chicago »  adaptée pour la première fois en arabe en mai 2023, Youmna Bou Hadir s’impose à 30 ans dans la peau d’une Mama Morton plus vraie que nature. Rencontre avec une voix profonde qui s’aligne parfaitement avec cette jeune femme toute en nuances.

Youmna Bou Hadir, la Voix

Youmna Bou Hadir dans Chicago bel Arabeh , un coup d'essai et un coup de maître. Photo Chicagoarabia

Lorsqu’elle apparaît sur la scène du Casino du Liban en mai dernier, fondue dans un noir profond, le silence se fait. Youmna Bou Hadir en jette immédiatement et le public est impressionné, séduit. Une présence, un timbre qui apparaissent même s’ils sont cachés derrière la timidité des premières fois. Mais qui est donc cette jeune femme encore méconnue du public et qui trouve instantanément sa place dans la comédie musicale Chicago ِِِِBel Arabeh ?

Dans ce café urbain, c’est sur la pointe des pieds qu’elle débarque pour se confier en toute pudeur et toute émotion et parler d’abord de son « cœur qui était à Broadway depuis ma tendre enfance ». Un rêve auquel elle croyait malgré les nombreuses réticences de sa famille. « Pour nous épargner des déceptions, confie-t-elle, la plupart des parents confinent leurs enfants dans une zone de confort et leur conseillent de rêver "en petit" et ne pas déployer leurs ailes. Chez moi, c’était mon frère aîné qui avait du talent et une voix vibrante et affirmée. » La petite sœur l’accompagnait discrètement durant les réunions familiales pendant que l’enfant en elle attendait de grandir et se faire entendre un jour sur de grandes scènes. « Au Liban, le système éducatif dans le domaine de l’art est limité », déplore-t-elle. C’est à Hong Kong, où la famille s’installe en 2007, qu’elle fait des auditions et qu’on la remarque. Chaque jour après l’école, Youmna Bou Hadir court prendre des cours de chant, de solfège, de théâtre, apprend à écrire des compostions et surtout découvre son potentiel vocal.

Les accidents de la vie

Dès son plus jeune âge surtout, après le décès de son père alors qu’elle n’avait que 11 ans, l’artiste qu’elle tente de devenir doit se battre quand sa mère devient le pilier de la famille avec quatre enfants mineurs à sa charge, mère courage prête à déplacer des montagnes pour leur assurer des études sans toutefois pouvoir leur offrir des activités périscolaires. Mais c’était compter sans son tempérament de guerrière qui, tous les jours après les cours de littérature anglaise qu’elle suivait à la LAU, prend le bus pour rejoindre Leila Dabaghi, professeure de chant classique qui croit en elle et lui offre son enseignement gratuitement. Tout au long de sa jeunesse, des envies se bousculent. Toujours dans l’action, sa tête foisonne de projets et de belles idées.

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Parallèlement aux ateliers d’écriture qu’elle anime, la jeune femme publie deux histoires courtes ainsi qu’un recueil de poèmes. Une touche-à-tout qui s’est même lancée dans le marketing et le journalisme, et se dit partante pour « toute opportunité qui me permet d’apprendre ». Aujourd’hui, elle préfère se tourner vers des occupations qui engagent de la passion et de la créativité, parmi lesquelles l’écriture de chansons, de séries télévisées et de récits à thèmes, tel celui du changement climatique qu’elle accompagne d’une pause musicale en interprétant des morceaux de jazz, blues ou même gospel. « Ce n’est pas toujours une question de performance. Je privilégie un échange émotionnel avec les spectateurs », confie-t-elle.

Mama Dunia (Youmna Bou Hadir), Nancy Nar (Cynthya Karam) et Mirva Kadi (Salma Fehmi), un trio réussi. Photo Chicagoarabia

Une expérience bouleversante

Et de revenir sur sa participation dans Chicago bel Arabeh, qu’elle qualifie de « la plus grande expérience et (du) tournant décisif de mon parcours artistique ». La jeune femme connaissait le chorégraphe Roy el-Khouri et avait collaboré en tant que free-lance copywriter dans l’agence de communication et marketing numérique de Nayla el-Khoury. Cette dernière la contacte quelques années plus tard et lui propose le rôle de Mama Morton dans la comédie musicale qu’elle envisageait de produire. Youmna éclate en sanglots et accepte sans même discuter des détails administratifs. « La soirée d’ouverture du spectacle était un des plus beaux jours de ma vie. » Bou Hadir évoque le trac qu’elle sent dans toutes les situations. « Une petite scène, un café ou un opéra, tout m’émeut. » Et évoque la panique qui l’a habitée au moment de la lecture collective du scénario, intimidée par « ces artistes si talentueux ». Tout se noue entre eux dès cette première rencontre. « Ce sont de belles personnes positives qui m’ont énormément encouragée », confie-t-elle. Parmi eux, Cynthya Karam, « une immense actrice » qui me répétait tous les soirs : « Tu es aussi grande que l’univers. N’aie pas peur de t’ouvrir et de t’approprier la scène. »

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Le 5 mai à 21 heures, lorsque le rideau de la salle des Ambassadeurs du Casino du Liban se lève, la première note s’échappe timidement avant que Youmna Bou Hadir ne se lâche et s’efface presque naturellement pour laisser toute la place à Mama Morton/Mama Dunia. Derrière un grain de voix grave et chaud, dont le timbre correspond à la tessiture alto, le public ressent ses fêlures et ce supplément d'âme qu’elle dégage. « Mama Morton est une femme forte, féminine, sensuelle et intelligente. Elle profite des filles qui sont en prison, mais en même temps, elle les aime et les protège. J’ai pris le caractère du vilain parce que c’est un rôle vrai, complexe et profond, comme je l'aime », révèle-t-elle.

La comédie musicale débarque au Festival de Beiteddine les 2, 3 et 5 août. Photo Chicagoarabia

Alors que les répétitions de la comédie musicale iconique Chicago, qui s’est jouée à guichets fermés au Casino du Liban, ont repris de plus belle, Bou Hadir, Cynthya Karam, Mirva Kadi, Roy el-Khouri, Fouad Yammine et Matteo el-Khodr seront sur les planches du Festival de Beiteddine les 2,3 et 5 août en compagnie des acteurs, danseurs, chanteurs et musiciens. Un défi de taille pour la jeune artiste qui a déjà mis la barre haut et sait qu’elle doit travailler dur pour « continuer à convaincre ». À travers son univers musical et sa personne qui mériteraient d’être connus et reconnus.

Lorsqu’elle apparaît sur la scène du Casino du Liban en mai dernier, fondue dans un noir profond, le silence se fait. Youmna Bou Hadir en jette immédiatement et le public est impressionné, séduit. Une présence, un timbre qui apparaissent même s’ils sont cachés derrière la timidité des premières fois. Mais qui est donc cette jeune femme encore méconnue du public et qui trouve...
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