Au cours des deux dernières décennies, la publication de caricatures et de films controversés visant l'islam et le prophète Mohammad a déclenché des protestations enflammées et des affrontements violents dans le monde entier, y compris au Liban.
Le 29 juin dernier, Salwan Momika, un réfugié irakien chrétien de 37 ans, a déchiré et mis le feu à des pages du livre saint de l'islam à Stockholm au cours d'une manifestation autorisée par la police, alors que les musulmans célébraient la fête de l'Adha.
L'incident, qui s'est déroulé devant la mosquée centrale de Stockholm, a suscité nombre de condamnations et protestations dans l'ensemble du monde musulman, notamment des critiques de la part de personnalités religieuses et de partis libanais.
Le 7 juillet, quelques dizaines de personnes, dont des dignitaires religieux, se sont rassemblées devant la mosquée al-Amine, dans le centre de Beyrouth, pour exprimer leur mécontentement face à cet acte provocateur.
Mercredi, un mini-rassemblement a été autorisé par la police suédoise, où le Coran a été piétiné mais non brûlé comme prévu. Dès le lendemain de cet incident, le secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah a appelé à l'expulsion de l'ambassadrice de Suède au Liban et à des manifestations. Plusieurs centaines de personnes ont répondu vendredi à cet appel à manifester dans la banlieue-sud de Beyrouth.
Nous examinons ci-après les réactions libanaises indignées face aux caricatures danoises controversées représentant le prophète Mohammad en 2006, ainsi que les réactions suscitées par le film Innocence of Muslims en 2012 et les caricatures provocatrices de l'hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo en 2015.
2006 : les caricatures danoises controversées
En 2006, le Liban a été le théâtre d'émeutes et de violences à la suite de la publication de caricatures danoises controversées représentant le Prophète.
Quelques mois plus tôt, le 30 septembre 2005, le journal danois Jyllands-Posten avait publié une série de 12 caricatures, considérées comme offensantes par de nombreux musulmans en raison de l'enseignement islamique qui interdit les représentations graphiques du Prophète.
Des manifestants en colère ont protesté au Liban le 5 février 2006 pour exprimer leur indignation. Le consulat du Danemark à Beyrouth a même été incendié. L'incident a débouché sur de violents affrontements avec les forces de sécurité libanaises et des dégâts matériels ont été observés dans plusieurs quartiers de Beyrouth.
La marche pacifique dans le centre de Beyrouth s'est rapidement transformée en troubles lorsqu'un groupe dissident s'est dirigé vers un immeuble abritant les missions autrichienne et danoise.
Scandant des slogans anti-danois offensants, les manifestants se sont livrés à des actes de vandalisme, visant des voitures, des bureaux et même une église maronite située à proximité.
Les forces de sécurité libanaises ont tenté de disperser la foule à l'aide de gaz lacrymogènes, mais une faction a réussi à franchir les lignes de sécurité et à atteindre le bâtiment abritant la mission danoise. Ce groupe a alors brisé des fenêtres et mis le feu au bâtiment, provoquant la mort d'une personne qui tentait d'échapper à l'incendie.
La violence a continué à s'intensifier, les manifestants se sont heurtés aux policiers et ont mis le feu à plusieurs camions de pompiers.
La situation est devenue incontrôlable et a conduit à la démission du ministre libanais de l'Intérieur de l'époque, Hassan al-Sabeh, en raison de sa gestion de la crise.
2012 : le film Innocence of Muslims suscite l'indignation
En 2012, le Liban a de nouveau été le théâtre de vastes manifestations et d'affrontements violents, cette fois à cause du film anti-islam "Innocence of muslims", qui dénigre l'islam et le Prophète.
Le film avait suscité la fureur des musulmans dans tout le Moyen-Orient, entraînant des manifestations et des attaques contre des ambassades et des symboles américains, notamment à Benghazi en Libye, où le consul américain Christopher Stevens a été tué.
Le numéro un du Hezbollah Hassan Nasrallah a condamné le film, exhortant les musulmans et les chrétiens à rester vigilants et à éviter de sombrer dans la discorde. Il a tenu les États-Unis pour responsables de la montée des tensions entre les communautés religieuses et appelé à des manifestations au Liban.
"Prophète de Dieu, nous nous offrons nous-mêmes, notre sang et celui de nos proches au nom de votre dignité et de votre honneur", avait clamé Hassan Nasrallah à ses partisans qui scandaient "mort à Israël" et "mort à l'Amérique", au cours d'une manifestation dans la banlieue-sud de Beyrouth. "Les États-Unis devraient comprendre que s'ils diffusent le film dans son intégralité, ils s'exposeront à des répercussions très dangereuses dans le monde entier", avait-il dit.
À la suite du discours du secrétaire général du Hezbollah, des manifestations avaient éclaté dans tout le pays, notamment dans la ville côtière de Tyr, au Liban-Sud, et à Hermel, dans la Békaa.
L'agence Reuters rapportait que les forces de sécurité libanaises avaient ouvert le feu après que des manifestants ont incendié un fast-food à Tripoli, dans le nord du Liban, et jeté des pierres sur un bâtiment administratif en criant des slogans anti-américains.
Malgré la colère généralisée, les manifestations au Liban sont restées relativement contrôlées par rapport à d'autres régions, la visite simultanée du pape Benoît XVI dans le pays ayant joué un rôle dans le maintien d'un sentiment d'unité et de retenue.
2015 : controverse sur les caricatures de Charlie Hebdo
En 2015, des manifestations avaient également éclaté dans plusieurs régions du Liban en réponse à la publication par l'hebdomadaire satirique français Charlie Hebdo d'une caricature représentant le prophète Mahomet sur sa couverture.
Le 7 janvier 2015, des terroristes islamistes ont attaqué le siège de Charlie Hebdo à Paris, tuant 12 personnes.
Le 16 janvier, dans la capitale libanaise, une centaine de personnes se sont rassemblées pour dénoncer cette caricature. La police a pris des précautions en bloquant une route menant à l'ambassade de France, anticipant ainsi des troubles.
À Saïda, dans le sud du Liban, des manifestants palestiniens s'étaient rassemblés devant une mosquée pour exprimer leur opposition à la représentation du Prophète par le magazine français. Les forces de sécurité se sont déployées en masse dans plusieurs quartiers de la ville, en particulier à l'extérieur du centre culturel français.
À Tripoli, au Liban-Nord, des dizaines de manifestants s'étaient également rassemblés pour dénoncer la caricature. L'armée libanaise a dispersé les manifestations en raison des menaces pesant sur la sécurité de la ville et empêché toute nouvelle escalade des tensions.
Selon le New York Times, Hassan Nasrallah a critiqué les extrémistes qui tuent ceux qu'ils considèrent comme des infidèles au nom de l'islam, "sans dénoncer explicitement la tuerie de Paris".
Le Hezbollah avait également publié une déclaration condamnant la caricature controversée. "Une telle action est absolument rejetée", avait souligné le parti chiite, qualifiant l'illustration de "grande provocation pour les sentiments de plus d'un milliard et demi de musulmans dans le monde, qui croient tous aux messages du ciel et sont avides de dialogue et de valeurs communes".
Début janvier 2023, Charlie Hebdo a publié des caricatures représentant le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei. Le Hezbollah a réagi en critiquant ces caricatures controversées, les jugeant insultantes.
commentaires (6)
Les caricaturistes s’en prennent à toutes les religions. Ni le christ, ni bouddha ou moïse n’ont été épargnés .. Combien d’églises, de synagogues et temples ont été saccagés et de fidèles en pleine prière ont été massacrés ?
Hitti arlette
22 h 26, le 22 juillet 2023