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Moyen-Orient - FOCUS

Une chaîne d’opposition turque dans le viseur d’Ankara

Le rédacteur en chef de Tele1, Merdan Yanardag, est accusé par les autorités du pays de « propagande kurde ».  

Une chaîne d’opposition turque dans le viseur d’Ankara

Merdan Yanardag, rédacteur en chef de Tele1. Capture d'écran - Compte Twitter de Merdan Yanardağ, @merdanyanardag

Un acte de plus contre la liberté d’expression et la liberté des médias en Turquie. Jeudi, l'organisme turc des médias a ordonné à la chaîne d’opposition Tele1 de suspendre ses programmes pendant une semaine. Elle est accusée d’avoir diffusé sur son antenne de la « propagande terroriste ». Son rédacteur en chef, Merdan Yanardag, avait été arrêté et placé en détention provisoire le 26 juin dernier pour avoir fait « l’apologie de criminels » et a été accusé de « propagande du Parti des travailleurs du Kurdistan (classé terroriste par Ankara) ».

Dans une émission diffusée le 21 juin dernier sur la chaîne, Merdan Yanardag aurait critiqué la gestion par le pouvoir de la question kurde, mentionnant le manque de transparence du gouvernement, en répondant à des propos du député de l’AKP (Parti de la justice et du développement, actuellement au pouvoir) Galip Ensarioglu. Le journaliste s’est également interrogé sur les conditions de détention sévères d’Abdullah Öcalan, cofondateur du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), capturé par les forces turques en 1999, et toujours maintenu à l'isolement sur une île-prison dans la mer de Marmara. D’autant plus que le pouvoir aurait, selon le journaliste, ouvert des discussions avec le chef charismatique des Kurdes. Quelques jours plus tard, la police turque l’a arrêté.

La chaîne Tele1 et les avocats du rédacteur en chef affirment que ses propos ont été sortis de leur contexte. Ils accusent les cercles nationalistes du parti Iyi ainsi que des députés et dirigeants d’Istanbul d’avoir voulu créer la polémique en diffusant sur Twitter des vidéos erronées, tronquant les propos de Merdan Yanardag et laissant croire qu’il demandait la libération d’Abdullah Öcalan.

Surveillance accrue des journalistes

Dès le 25 juin, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (RTÜK) a annoncé qu'il ouvrait une enquête visant la chaîne Tele1. L’agence de régulation, dominée par l'alliance au pouvoir – AKP et MHP (d’extrême droite, NDLR) – a également imposé jeudi une amende à la chaîne, équivalant à 5 % de ses revenus publicitaires du mois de juin.

Le parquet d’Istanbul a de son côté ouvert une enquête judiciaire contre le journaliste pour « propagande en faveur du PKK ». Merdan Yanardag a été arrêté dans les studios de la chaîne après avoir réalisé une émission dans laquelle il expliquait le détournement politique de ses propos sur les réseaux sociaux.

Tele1, chaîne d’opposition classée à gauche sur l'échiquier politique turc, fait partie des quatre médias condamnés à payer une amende pour leur couverture des élections présidentielle et législative turques de mai 2023.

Le Parti républicain du peuple (CHP), dont le chef Kemal Kilicdaroglu a obtenu 47,8 % des voix au second tour de l'élection présidentielle turque le 28 mai dernier, a demandé la libération du journaliste, critiquant l’action du gouvernement turc. « Désormais, il est clair que l'intention n'est pas de faire taire, mais de verrouiller tous les canaux donnant à la société accès aux bonnes informations », a affirmé vendredi le porte-parole du parti Faik Oztrak.

« Depuis que le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan a été reconduit, en mai dernier, nous observons une surveillance judiciaire accrue des journalistes, qui continuent, comme Merdan Yanardag, d’adopter un ton libre. La distorsion volontaire de ses propos par le pouvoir et les milieux nationalistes ont conduit à son incarcération. Nous demandons sa libération immédiate ainsi que la fin d’une inacceptable instrumentalisation de la législation antiterroriste à des fins politiques », a réagi Erol Onderoglu, représentant de l’ONG Reporters sans frontières en Turquie.

Selon RSF, 32 représentants des médias prokurdes ont été emprisonnés dans le pays depuis juin 2022. Depuis le 16 mai, onze d’entre eux ont été remis en liberté, certains après plus d’un an de détention préventive.

Un acte de plus contre la liberté d’expression et la liberté des médias en Turquie. Jeudi, l'organisme turc des médias a ordonné à la chaîne d’opposition Tele1 de suspendre ses programmes pendant une semaine. Elle est accusée d’avoir diffusé sur son antenne de la « propagande terroriste ». Son rédacteur en chef, Merdan Yanardag, avait été arrêté et placé en...

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