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Nos Lecteurs ont la Parole

J’étouffe...

Ce n’est pas le manque d’oxygène seul qui m’étouffe.

L’injustice, l’inégalité, la pauvreté, l’anarchie, l’absence de liberté font que j’étouffe.

Preuve en est, notre vie au Liban, ou plutôt notre enfer libanais.

J’étouffe de l’injustice et de l’inégalité de certains/nes juges haut placés qui ont juré dans leur serment au nom de Dieu : honnêteté et honorabilité et qui ne font que servir des « zou3amas ».

J’étouffe de l’anarchie de certains/nes députés appartenant à des partis politiques enterrés dans le confessionnalisme et la corruption ne votant pas des lois dans l’intérêt public.

J’étouffe de la corruption qui ne disparaîtra jamais avec des gouvernements formés par certains/nes ministres spécialistes du vol et du détournement de la loi.

J’étouffe de l’absence de liberté, qui ne sera jamais préservée tant que des poursuites sont engagées contre des avocats libres de pensée et d’esprit.

J’étouffe des citoyens/nes qui se plaignent de la situation actuelle, alors qu’ils ont voté durant les dernières élections pour les mêmes partis politiques.

J’étouffe de ceux/celles qui me disent : nos années ont été plus difficiles comme si c’est de notre sort de vivre toujours dans un pays misérable.

J’étouffe de ceux et celles qui me disent que les droits de la femme ne sont pas une priorité et que le mariage civil est la fin de la famille – comme si avec le mariage religieux le taux de divorce est plus bas !

J’étouffe de cette haine avec laquelle certains/es traitent les minorités, les travailleurs étrangers, les émigrés et certaines communautés – et non je ne parle pas de communautés religieuses!

J’étouffe de la légèreté avec laquelle certains/nes traitent des questions relatives à l’environnement, aux animaux et à la nature.

J’étouffe de cet aéroport, devenu synonyme de larmes et d’adieu pour nos amis et proches qui veulent construire un avenir dans des pays qui les valorisent et leur accordent les droits et libertés fondamentaux.

J’étouffe à la vue de la richesse de certains hommes religieux alors que toutes les religions appellent à la modestie, l’amour et l’aide des plus démunis.

J’étouffe à la vue de nos routes et rues toujours en deuil le soir, qui nous volent nos jeunes à cause des accidents qui pourraient être évités si des irresponsables politiciens avaient réparé les failles sur ces routes.

J’étouffe à la vue de ce vieillard qui attend aux portes des banques pour retirer quelques centimes de son propre épargne, résultat de ses années de travail honnête acharnées alors que certains/nes politiciens, banquiers, commerçants, responsables ont transféré des sommes vertigineuses à l’extérieur du pays d’un jour à l’autre alors que le peuple se révoltait dans une « sawra » qui a fait trembler toute une cleptocratie.

Et je me demande où pouvoir respirer dans tout cet étouffement ?

Peut-être dans cette belle nature printanière, ou dans ce Beyrouth qui n’a jamais cessé de reprendre vie, ou dans ces sublimes montagnes peintes de vert, ou dans ces lieux de culte où l’on prie Dieu jour et nuit pour qu’il nous donne la force de continuer à combattre, ou dans les livres de politique ou d’histoire qui me prouvent que la misère d’un peuple n’est jamais éternelle, ou dans les chansons de Zaki Nassif, Wadih es-Safi, Sabah et Feyrouz, et bien d’autres qui me dessinent cette image de paradis au Liban, ou dans des créations artistiques de Caracalla, de Nadine Labaki et de Georges Khabbaz qui me rendent fière d’être libanaise, ou dans les robes de Élie Saab, Zuhair Murad et Reem Acra qui nous enfilent dans le monde féerique ?

Tout cela est bon pour me donner une dose d’oxygène, mais certainement pas suffisant pour m’empêcher d’étouffer.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Ce n’est pas le manque d’oxygène seul qui m’étouffe. L’injustice, l’inégalité, la pauvreté, l’anarchie, l’absence de liberté font que j’étouffe. Preuve en est, notre vie au Liban, ou plutôt notre enfer libanais.J’étouffe de l’injustice et de l’inégalité de certains/nes juges haut placés qui ont juré dans leur serment au nom de Dieu : honnêteté et...

commentaires (1)

C’est triste tout ce que vous dites mais c’est la vérité merci Sandra Geha. Je connais votre famille depuis les années 50 et 60

Eleni Caridopoulou

17 h 49, le 09 juin 2023

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Commentaires (1)

  • C’est triste tout ce que vous dites mais c’est la vérité merci Sandra Geha. Je connais votre famille depuis les années 50 et 60

    Eleni Caridopoulou

    17 h 49, le 09 juin 2023

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