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Nos Lecteurs ont la Parole

Tâchons de prendre le temps de penser

Vivre constamment sur ses nerfs est nuisible à la santé physique et morale. Cependant, nombre de gens ne connaissent que deux façons de combler les heures de loisirs dont ils disposent : travailler ou s’amuser, et, dans l’un ou l’autre cas, ils se donnent à fond. Nous songeons rarement à consacrer des moments de répit à une autre activité : cette précieuse faculté de l’esprit qui s’appelle « bien penser ».

Ne nous est-il jamais arrivé de voir un homme tranquillement assis dans un hall d’un parloir ou chez lui, dans son salon, et en ayant l’air de ne s’intéresser à rien ? Il n’a ni livre ni plume entre les mains. Il semble perdre son temps à ne rien faire. Quelle serait alors notre réaction ? Nous penserions tout de suite que cet homme attend quelqu’un et, à le voir ainsi s’ennuyer, nous aurions probablement envie de le plaindre. Il ne nous viendrait jamais à l’esprit que, en dépit de son désœuvrement apparent, ce faux oisif fait cependant une chose à la fois importante et agréable : il laisse sa pensée errer et s’émerveiller ; il se détache entièrement de son cadre naturel, s’ouvre en un mot à un raisonnement réfléchi.

Penser, c’est se rafraîchir et se reposer. C’est emmagasiner de l’énergie pour l’avenir, c’est assurer à la vie de l’équilibre et de la souplesse. La pensée profonde nous amène souvent à considérer sous un autre angle les richesses de l’âme humaine, et développe nos facultés intellectuelles et psychologiques.

Aucune règle spéciale, aucune technique définie ne préside à la pensée profonde. Il s’agit simplement de rendre la liberté à son esprit et de le laisser errer en paix au-delà des objectifs matériels et des contingences « pratiques » du présent. Oui, laissons carrément notre pensée partir en vacances. Laissons-la s’élever au-dessus des tristes réalités de la vie quotidienne. C’est si facile ! Nous connaîtrons ainsi l’état d’esprit où l’on se trouve automatiquement plongé quand on écoute de la belle musique ou qu’on est en présence d’un splendide coucher de soleil. Notre émerveillement ne connaît pas d’impatience ; il n’est pas nécessaire de préparer à l’avance ni de forcer notre recueillement. Nous n’avons besoin d’aucune aide matérielle. Peu importe le cadre qui nous entoure, nous avons vite fait de l’oublier une fois que nous avons pris l’habitude de réfléchir. Cependant, le calme, la beauté du décor qui nous environne influent de façon certaine sur la réflexion.

Un ami grand éducateur recommandait à ses élèves en classe de philosophie d’assister fréquemment aux offices religieux. « Prenez l’habitude de vous rendre dans ces endroits calmes et propres à la prière et à la méditation, leur disait-il ; cela aidera votre faculté de jugement à conserver toute sa lucidité. » Il leur faisait la comparaison suivante : « En allant à l’église, vous faites un peu comme cet homme ballotté au milieu d’une foule en marche qui réussit à la dominer en montant sur un banc. Ayant reconnu le sens du courant, il peut alors se fondre de nouveau dans la masse pour s’y frayer un chemin. »

Il aurait très bien pu utiliser la même image en parlant de l’art de penser qui nous élève au-dessus des petitesses de la vie et nous permet de distinguer l’essentiel de l’accessoire. Ainsi, le sens spirituel de nos épreuves nous apparaît clairement.

Comment se préparer à la réflexion ?

Aiguillons tout simplement notre pensée sur la bonne voie. Dès le départ, nous devons en effet tendre à élever notre esprit vers l’universel et l’impersonnel plutôt que de le laisser s’abîmer dans des réflexions égocentriques.

Las de concevoir des idées pratiques et positives, rassasié des sujets-précis et déterminés, l’esprit se libère des pensées mesquines avec une facilité surprenante. Prenons l’habitude de nous concentrer quelques instants sur une idée générale ou abstraite, comme l’essence de la beauté, le sens de la vérité, l’analyse du courage, la destinée humaine, l’immortalité ou l’une quelconque des vérités éternelles de la religion. Ou encore, prenons comme point de départ une citation propre à nous inspirer et laissons-la reposer dans notre esprit avec l’idée qui en découle. Il nous viendra peut-être alors une interprétation nouvelle ; n’a-t-on pas dit que toute citation mystique prêtait à mille et une versions ? Dès que nous aurons lancé notre pensée dans la bonne direction, laissons-nous entraîner par le courant et nous mener où il voudra. Contentons-nous d’être spectateurs.

Quand nous traverserons des moments difficiles, que nous serons en proie à une forte anxiété ou à quelque autre émotion, sachons qu’il n’y a pas de plus sûre méthode pour retrouver la sérénité. Nous ne connaissons d’ailleurs aucune façon de reprendre le contrôle de notre raison et de notre jugement avec une telle économie de temps et d’énergie. En tant que moyen de combler nos moments de loisirs, la méditation est accessible à chacun de nous, quels que soient notre âge et notre expérience personnelle. Méditer, c’est déjà vivre en sage.

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Vivre constamment sur ses nerfs est nuisible à la santé physique et morale. Cependant, nombre de gens ne connaissent que deux façons de combler les heures de loisirs dont ils disposent : travailler ou s’amuser, et, dans l’un ou l’autre cas, ils se donnent à fond. Nous songeons rarement à consacrer des moments de répit à une autre activité : cette précieuse...

commentaires (1)

Bien chanceux ceux qui peuvent laisser leur esprit errer...Cela m'est tout simplement impossible! Lire, résoudre une grille de mots croisés ou tout simplement bavarder au téléphone, oui. Mais rêver ??? Non, c'est pour moi de l'oisiveté. Est-ce dû au fait que j'ai enchaîné des études et nombreux diplômes rien que pour le plaisir, avec pour conséquence, je l'avoue, de délaisser ma famille? En tout cas, c'est une habitude définitivement acquise.

Lilou BOISSÉ

21 h 11, le 08 mai 2023

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Commentaires (1)

  • Bien chanceux ceux qui peuvent laisser leur esprit errer...Cela m'est tout simplement impossible! Lire, résoudre une grille de mots croisés ou tout simplement bavarder au téléphone, oui. Mais rêver ??? Non, c'est pour moi de l'oisiveté. Est-ce dû au fait que j'ai enchaîné des études et nombreux diplômes rien que pour le plaisir, avec pour conséquence, je l'avoue, de délaisser ma famille? En tout cas, c'est une habitude définitivement acquise.

    Lilou BOISSÉ

    21 h 11, le 08 mai 2023

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