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Économie - Focus

Entre Covid et tensions, les relations commerciales sino-US en pleine tempête

Entre Covid et tensions, les relations commerciales sino-US en pleine tempête

La Chine pourrait ne pas terminer 2022 au rang de premier partenaire commercial des États-Unis, pour la deuxième fois seulement depuis 2008. Photo AFP

Divorce durable ou simple effet Covid ? La Chine pourrait ne pas terminer 2022 au rang de premier partenaire commercial des États-Unis, pour la deuxième fois seulement depuis 2008, conséquence de tensions d’une intensité rare. Les données du commerce extérieur sur l’ensemble de l’année ne sont pas encore connues, mais celles publiées début janvier pour novembre par le ministère américain du Commerce le confirment : les importations de produits en provenance de Chine ne se font plus au même rythme.

Certes, 2022 devrait battre le record d’importations chinoises aux États-Unis, mais sur les onze premiers mois de l’année, le pays nord-américain aura importé plus, en valeur, depuis l’Union européenne que depuis la deuxième économie mondiale.

À part en 2019, lorsque la guerre commerciale entre les deux pays battait son plein, cela ne s’était plus produit depuis 2008. « On observe un réalignement de la mondialisation depuis 2018 », analyse Robert Koopman, maître de conférences à l’American University, basée à Washington.

« Les entreprises cherchent à diversifier leurs approvisionnements afin d’éviter les tensions géopolitiques sino-américaines, les effets de la pandémie, mais aussi les ruptures provoquées par les risques climatiques » sur une zone géographique spécifique, détaille-t-il. Après deux années de baisse, en 2019 et 2020, sous l’effet de la guerre commerciale puis de l’arrêt du commerce mondial avec la pandémie, les importations chinoises étaient pourtant reparties de plus belle en 2021, sans pour autant revenir à leur niveau antérieur.

Une forme de substitution

Surtout, selon une étude du cercle de réflexion Peterson Institute for International Economics (PIIE), elles ont repris sur un rythme plus lent qu’avant le début de la guerre commerciale, à l’opposé des importations provenant du reste du monde. « Il y a clairement une forme de substitution qui se met en place, de la Chine vers d’autres pays. C’est en partie financé par des investisseurs chinois, qui délocalisent par exemple au Vietnam, mais pas seulement. Pour beaucoup, il s’agit de multinationales qui veulent se rapprocher du marché américain », estime ainsi Mary Lovely, chercheuse au PIIE.

Au Salon de la tech CES de Las Vegas, début janvier, une entreprise chinoise d’électronique, Etech, n’hésitait ainsi pas à mettre en avant ses usines installées au Vietnam.

En progression constante depuis une vingtaine d’année, les exportations vietnamiennes ont d’ailleurs connu un véritable coup d’accélérateur depuis 2018, avec une multiplication par plus de deux en valeur, devenant ainsi l’un des principaux partenaires commerciaux des États-Unis.

Plus largement, les importations en provenance d’autres pays asiatiques progressent fortement : Taïwan, Corée du Sud ou encore Malaisie gagnent des parts de marché.

Des signes de découplage ?

Mais s’agit-il des premiers signes d’un découplage entre les économies américaines et chinoises ? Le sujet divise les experts, qui manquent encore de recul dans la mesure où le plein effet de la politique tarifaire américaine a été affecté par la crise sanitaire et ses conséquences sur l’économie mondiale.

Les Américains, une fois les confinements levés, « ont dépensé beaucoup d’argent pour des produits qui sont généralement importés », souligne ainsi Ryan Sweet, chef économiste pour les États-Unis chez Oxford Economics. Mais « désormais, ils dépensent plus en services, ce qui a un impact sur la demande de biens et donc les importations ».

Un avis que rejoint en partie Emily Benson, chercheuse au Centre des études internationales et stratégiques, basé à Washington, pour qui « même si la pandémie n’est pas terminée, les acteurs économiques et les gouvernements commencent à agir comme si c’était le cas et le commerce revient à des niveaux normaux ».

Cependant, l’une des conséquences de la « réorganisation du commerce mondial » et de la « diversification géographique (...) est de voir des chaînes d’approvisionnement ne plus débuter en Chine mais en Asie du Sud-Est ou plus proche des États-Unis », ajoute-t-elle.

Dans le même temps, « les lois comme l’IRA (le grand plan climat du président Biden, NDLR) ou le Chips Act (qui vise à ramener une partie de la production des semi-conducteurs aux États-Unis) montrent une réelle volonté de l’administration Biden d’accélérer le découplage avec la Chine », souligne Robert Koopman.

Pour autant, l’imbrication des deux économies est telle que cela semble compliqué à réaliser, même dans un contexte de tensions géopolitiques.

« Les tensions se renforcent entre les États-Unis et la Chine, admet Ryan Sweet, mais ça ne signifie pas que les États-Unis cesseront d’importer des produits chinois. Sur le temps long, on va observer une diversification des approvisionnements, surtout parce que les industriels ne placeront plus tous leurs œufs dans un même panier. »

Erwan LUCAS et Beiyi SEOW/AFP

Divorce durable ou simple effet Covid ? La Chine pourrait ne pas terminer 2022 au rang de premier partenaire commercial des États-Unis, pour la deuxième fois seulement depuis 2008, conséquence de tensions d’une intensité rare. Les données du commerce extérieur sur l’ensemble de l’année ne sont pas encore connues, mais celles publiées début janvier pour novembre par le ministère...

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