Le patriarche maronite, Béchara Raï, a affirmé samedi que "toutes les données politiques indiquent qu'un plan est en place contre le Liban", alors que le pays est secoué depuis 2019 par une crise économique sans précédent, à laquelle s'ajoute une crise politique. Aucun président n'a en effet été élu depuis le départ de Michel Aoun le 31 octobre, et le gouvernement actuel n'est chargé que de l'expédition des affaires courantes.
Dans son message adressé à la population à la veille de Noël au siège du patriarcat à Bkerké, Mgr Raï a également insisté une nouvelle fois sur la nécessité de tenir une conférence internationale sur le Liban, sous l'égide des Nations unies, afin de le sortir de cette double impasse.
"Pourquoi détruisez-vous l'Etat ?"
"Toutes les données politiques indiquent qu'un plan est en place contre le Liban, pour instaurer une vacance présidentielle à laquelle s'ajoute un vide constitutionnel, compliquant de plus en plus l'élection présidentielle", a lancé le patriarche maronite. Il n'a toutefois pas précisé qui serait à l'origine d'un tel plan.
Dans ses homélies, le prélat s'en prend régulièrement à l'ensemble de la classe politique libanaise, notamment le Hezbollah, mais de manière implicite, et n'a pas manqué de s'y employer de nouveau pour Noël. "Ils empêchent notre État de se doter d'un président de la République au nom d'arrière-pensées personnelles, confessionnelles et étrangères", a fait valoir Mgr Raï, sans nommer les forces qu'il accuse.
"Pourquoi vous vengez-vous du Liban, pourquoi détruisez-vous l'État ?", a demandé le dignitaire religieux. Rappelant que l'élection présidentielle est selon lui la priorité absolue, il a dénoncé le fait que "quelqu'un souhaite un président qui lui appartienne, avec un projet qui lui appartienne, pas un président pour le projet historique libanais". "Mais nous ne permettrons pas cela", a-t-il prévenu.
Le pays "n'est pas la propriété d'un camp sans l'autre", a-t-il poursuivi, alors que l'élection présidentielle n'aboutit pas et se polarise autour de deux camps à l'Assemblée nationale : les députés du Hezbollah et leurs alliés (les mouvements Amal et Marada, le Courant patriotique libre) votent généralement blanc, et ne se sont toujours pas mis d'accord sur un candidat. Face à cela, des députés de l'opposition comme ceux des Forces libanaises, de la contestation ou certains indépendants, ne parviennent pas non plus à se mettre d'accord. Certains votent pour le député de Zghorta Michel Moawad, mais sans parvenir à lui apporter un nombre de voix suffisant pour l'emporter.
Geagea et la priorité présidentielle
De son côté, le leader des Forces libanaises (FL) Samir Geagea a rappelé la priorité que représente l'élection présidentielle et accusé de nouveau "l'autre camp", celui du Hezbollah et de ses alliés, d'entraver ce scrutin. "Nous l'avons dit et répété : même si un candidat de l'autre camp réussit à rassembler 65 voix au Parlement, il est probable que nous nous absentions d'une ou deux séances électorales. Mais nous n'empêcherons pas l'élection présidentielle d'avoir lieu", a-t-il indiqué, sachant que les députés FL votent pour Michel Moawad.
"Malheureusement, je ne vois pas mon espoir pour l'élection présidentielle se réaliser d'ici les deux ou trois prochaines semaines", a poursuivi le leader chrétien, selon lequel sa formation "suivra toujours la même direction" dans cette élection.
Le cardinal Raï a mis l'accent en outre, une nouvelle fois, sur une proposition qu'il avait récemment lancée : tenir une conférence internationale sur le Liban, sous l'égide des Nations unies. Ce samedi, il a réaffirmé cette idée, "pour que notre pays soit neutre face à tout conflit militaire et que la situation reste sous contrôle, dans cette période d'inconnu dans la région". Cette suggestion a divisé la classe politique locale, certains estimant que seule la souveraineté du Parlement est à même de trouver une issue à la crise. Selon certains analystes, même la communauté internationale, notamment le Vatican, ne seraient pas favorables pour le moment à une telle conférence.
"Crime politique" de Aaqibiyé
"Un crime politique a été commis à Aaqibiyé, l'assassinat d'un soldat irlandais des gardiens de la paix, et c'est comme si c'était un événement passager !", a également affirmé Mgr Raï, faisant référence à l'attaque qui a coûté la vie à un soldat irlandais des Casques bleus, le 14 décembre dans ce village du Liban-Sud, une région où le Hezbollah pro-iranien est fortement implanté. Une enquête est en cours, et ses premiers résultats ont permis d'identifier des suspects et de montrer que l'incident était prémédité.
commentaires (8)
Ras le bol de tous les religieux .
Elias
15 h 26, le 27 décembre 2022