Le chef du gouvernement sortant, Nagib Mikati (c), présidant une réunion de son équipe ministérielle au Grand Sérail, le 5 décembre 2022. Photo Dalati Nohra
Le cabinet sortant de Nagib Mikati s'est réuni lundi matin en Conseil des ministres au Grand sérail à Beyrouth, pendant environ trois heures, au cours desquelles il a approuvé, entre autres, des aides sociales et médicales dans un Liban en pleine crise, et ce, malgré le boycott de plusieurs ministres du camp aouniste ou qui lui sont proches.
Dimanche, les ministres Abdallah Bou Habib, Henri Khoury, Maurice Slim, Amine Salam, Hector Hajjar, Walid Fayad, Walid Nassar, Georges Bouchikian et Issam Charafeddine (proche du leader druze Talal Arslane) ont affirmé, dans un communiqué conjoint, qu'ils boycottaient la réunion du Conseil des ministres, estimant qu'elle constitue une "violation de la Constitution".
Cette annonce a fait craindre l'impossibilité de tenir la séance gouvernementale, faute de quorum, mais elle a finalement eu lieu, MM. Bouchikian et Hajjar s'étant rendus au Grand sérail lundi matin, ce qui a favorisé la tenue du Conseil avec la présence de 17 ministres sur un total de 24.
Election d'un président
"La séance d'aujourd'hui est extraordinaire. Je n'aurais pas convoqué les ministres si ce n'était pour les questions relatives à la santé", a affirmé au début de la séance M. Mikati. "Si certains prennent la Constitution et le vivre-ensemble pour prétexte, nous estimons que ces deux questions ne peuvent se concrétiser au détriment de la vie des gens. Cela n'aura pas lieu sous mon mandat", a-t-il ajouté.
"Aujourd'hui, nous ne pouvons plus dépenser pour venir en aide aux malades cancéreux et ceux nécessitant une dialyse", a souligné le chef du gouvernement sortant, avant de poursuivre : "Veulent-ils qu'on commette un crime collectif ? Si c'est ce qu'ils demandent, que chacun assume ses responsabilités". "Nous continuerons à assumer nos propres responsabilités en faisant face aux difficultés", a insisté M. Mikati, qui a "appelé à élire rapidement un président de la République afin d'en finir avec ce problème", dans une référence aux réunions extraordinaires de son cabinet qui enclenchent un débat avec le camp aouniste sur les prérogatives du Premier ministre sortant.
"Laissons la politique de côté, le peuple souffre", a encore dit le Premier ministre lors d'une discussion avec des journalistes à la fin de la réunion. Il a en outre expliqué que certains points à l'ordre du jour n'ont pas fait l'unanimité des présents et n'ont donc pas été approuvés. "Personne n'essaie de s'approprier les prérogatives du président de la République. S'ils (le camp aouniste) veulent régler cette question, qu'ils élisent un président", a lancé M. Mikati.
Boycott aouniste
Le boycott ministériel intervient après que le Courant patriotique libre (CPL) a indirectement envoyé samedi un ultimatum aux ministres proches de ce groupe aouniste pour s'abstenir de participer à la réunion. L'ancien président Michel Aoun avait également estimé dimanche que la convocation du gouvernement par M. Mikati est une "tentative d’accaparer le pouvoir et d’imposer sa volonté aux Libanais contrairement à ce que dicte la Constitution".
Mais les ministres Hajjar et Bouchikian, qui sont considérés comme gravitant dans l'orbite aouniste, n'ont donc pas respecté cet appel.
M. Hajjar, qui a fini par se rendre à la réunion, en est sorti avant sa fin, afin de marquer son désaccord. "J’aurais préféré que cette rencontre ne se poursuive pas", a-t-il dit. "Un mois après la fin du mandat de Michel Aoun, la question est de savoir comment diriger le pays jusqu’à la prochaine présidentielle, en respectant la Constitution", a-t-il ajouté. "Laissons la question de l'élection présidentielle au Parlement qui doit élire un chef de l'Etat", a-t-il ajouté.
"Nous respectons le choix des ministres, qu’ils aient décidé de se rendre à la réunion ou de la boycotter", a assuré pour sa part Moustapha Bayram, ministre du Travail proche du Hezbollah, dont la formation est soupçonnée d’avoir fait pression sur les ministres récalcitrants. "L’ordre du jour de cette réunion concernait la situation exceptionnelle du pays. Nous n’avons fait pression sur personne pour se rendre à cette réunion", a souligné M. Bayram devant les journalistes.
Même son de cloche du côté de Ali Hamiyé, ministre des Transports également proche du Hezbollah, qui a assuré que son camp "n’a contacté personne" avant la réunion. "Nous avons rejeté un point sur la TVA et un autre sur les nouveaux prix du pétrole. Nous avons également décidé que les sociétés en charge des dés déchets ménagers continueront de travailler jusqu’à l’année prochaine", a-t-il indiqué.
Décisions du gouvernement
A l’issue de la réunion, le gouvernement sortant "a accepté (entre autres décisions, NDLR) une demande adressée à la Banque du Liban pour débloquer 35 millions de dollars (par mois, pour les trois prochains mois), et qui serviront à acheter des médicaments et du lait pour enfants", a affirmé, de son côté, le ministre sortant de l’Information, Ziad Makary, dans une déclaration lue après la levée de la séance. "Le gouvernement a également approuvé une aide sociale pour les militaires et les retraités estimée au double de leur salaire", a-t-il encore dit.
commentaires (7)
Très bien, je ne soutiens pas particulièrement M. Mikati mais il a eu raison de faire ce qu'il a fait. Quand on est à un poste de responsabilité, on est responsable.
K1000
20 h 52, le 05 décembre 2022