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Culture - Rencontre

Chez Caracalla, on danse de nouveau !

Installée à Londres depuis un an, la chorégraphe Alissar Caracalla n’a qu’une envie, rentrer au pays pour rejoindre ses élèves – qui ont déjà repris le chemin des studios – et redonner de l’espoir à la jeune génération.

Chez Caracalla, on danse de nouveau !

Alissar Caracalla : « Mon cœur est à Beyrouth. » Photo DR

À l’université de Californie à Los Angeles (UCLA), dans un amphithéâtre qui regorge d’élèves attentifs, le professeur d’ethnographie, voulant expliquer l’importance du lien qui relie la culture aux communautés, donne l’exemple de la compagnie de danse Caracalla au Liban. Un exemple qui laisse complètement indifférents les 200 auditeurs, mis à part une étudiante de 22 ans qui tremble de joie et d’émotion. « Cette compagnie, explique le professeur, a su être fidèle à la culture de son pays, à ses racines, à son héritage ancestral, elle donne au Liban une identité artistique authentique. » À la fin du cours, la jeune femme se dirige vers la chaire du professeur et lui dit : « Monsieur, c’est de la compagnie fondée par mon père que vous parlez. »

Cela faisait plus de deux décennies qu’Alissar Caracalla habitait l’étranger. « Il est temps, se dit-elle, une fois mes études terminées, de rentrer au pays. » Et c’est ainsi qu’elle honore sa promesse et prend le chemin qui la ramène à ses origines pour d’abord rejoindre la troupe de son père et ensuite créer une école de danse. « Moi qui avais habité la Californie où à chaque carrefour se trouvait un centre de danse, j’ai réalisé que le Liban avait des lacunes. J’ai alors pensé : si je ne trouve pas l’école de danse qu’il me faut, il va falloir la créer ! »

En 2002, Alissar Caracalla réalise son rêve. Son nouvel espace bouge aux rythmes variés du street jazz, de la danse contemporaine, du ballet classique pour adultes et enfants et de la danse orientale.

Performance de ballet contemporain à l’école de danse Caracalla. Photo DR

Mon cœur est à Beyrouth

Lorsque la guerre civile libanaise éclate en 1975, la petite Alissar a deux ans et son père envoie toute la famille s’installer à Londres pour les éloigner de l’enfer. Lui, c’est Abdel Halim Caracalla, natif de la région de Baalbeck, attaché à ses racines et à sa terre natale et qui a su ériger une danse folklorique traditionnelle libanaise en forme artistique complète présentée sur les scènes les plus prestigieuses du monde. Lui qui a démarré avec une troupe de dix personnes se retrouve à la tête d’une compagnie de plus de 70 danseurs. Alors que Saïd Akl disait de la compagnie Caracalla qu’« elle est la septième colonne de Baalbeck », bien plus tard Saad Hariri déclarera en parlant de son créateur : « Il a réussi à bâtir des ponts là où la politique a eu des difficultés à réaliser des percées aussi significatives. La richesse et l’immunité de notre pays résident dans ses citoyens créatifs, pionniers et uniques. »

Aujourd’hui, face à un pays qui sombre, Alissar, maman d’un petit garçon de cinq ans, est partie s’installer à Londres pour scolariser son fils. « Mon père nous avait offert la chance de vivre loin des affres de la guerre, il me fallait à mon tour protéger mon fils. » « Mon cœur cependant est à Beyrouth, ma ville me manque, mes élèves me manquent, l’école me manque », ajoute-t-elle, avec beaucoup d’émotion dans la voix.

Performance de ballet contemporain à l’école de danse Caracalla. Photo DR

Promesse tenue

« À chaque retour à Beyrouth, confie la chorégraphe, les jeunes danseurs que j’avais laissés derrière moi me confirmaient l’urgence de rentrer et de reprendre les rênes.

Je les écoutais parler de Caracalla et de la place importante que l’école a dans leur vie, j’avais le sentiment d’un devoir qui m’incombait et duquel je ne pouvais guère me détourner, je pouvais encore leur apporter du bonheur. Il me fallait refaire démarrer cette école qui fait partie de l’image que le Liban projette à l’étranger. Tout comme j’ai une responsabilité envers mon fils, j’ai une responsabilité envers cette institution que j’ai créée il y a 20 ans et qui a été en quelque sorte ma vie et ma deuxième famille. Après 24 ans à l’étranger, je ne me suis sentie jamais ni citoyenne britannique ni citoyenne américaine. Aujourd’hui, ce qui fait que le Liban est encore debout, ce sont les individus qui, à titre personnel, entreprennent des actions pour que le pays ne sombre pas. Je fais partie de ces individus qui peuvent faire une différence. Les artistes, les journalistes, les galeristes, les écrivains, ce sont eux les poumons du Liban. »

Si Alissar Caracalla s’est retrouvée plus dans le domaine de la chorégraphie que dans celui de la danse, « c’est parce que, dit-elle, j’ai beaucoup plus à donner en tant que chorégraphe et ma carrière peut être beaucoup plus longue. Quand il me faut créer un mouvement, cela vient très naturellement, je suis toujours très inspirée et je préfère m’exprimer en tant que chorégraphe. Je suis capable de reproduire l’esprit Caracalla avec ce mélange entre Orient et Occident, un langage qui a pour base le folklore avec la technique moderne, et un style féminin que j’ai ajouté sans toutefois m’éloigner de la base. C’est vrai que les jeunes aiment le hip-hop et toute sortes de danses modernes, mais c’est très important de rester attaché à sa culture et de préserver cette identité. »

Alissar Caracalla a tenu sa promesse. Depuis septembre 2022, l’école accueille à nouveau les élèves pour des cours et des niveaux très variés en attendant que la fondatrice de cette institution retrouve à son tour ses élèves. Et à la question de savoir : « Si vous n’aviez pas été danseuse vous auriez été quoi ? » C’est sans hésiter qu’elle répond : « Misérable ! »

À l’université de Californie à Los Angeles (UCLA), dans un amphithéâtre qui regorge d’élèves attentifs, le professeur d’ethnographie, voulant expliquer l’importance du lien qui relie la culture aux communautés, donne l’exemple de la compagnie de danse Caracalla au Liban. Un exemple qui laisse complètement indifférents les 200 auditeurs, mis à part une étudiante de...

commentaires (1)

Il me semble que les libanais sont champions du monde en danse ...

Stes David

10 h 38, le 11 octobre 2022

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Commentaires (1)

  • Il me semble que les libanais sont champions du monde en danse ...

    Stes David

    10 h 38, le 11 octobre 2022

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