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Nos Lecteurs ont la Parole

Le choix de l’effondrement

Ce qui me gêne le plus dans la direction que prend le pays, c’est qu’on s’enfonce chaque jour un peu plus. Même au fond du trou, on continue de creuser avec acharnement. On n’a rien appris. Et crétiniser est devenu un sport national. Se crétiniser serait la garantie pour devenir ministre ou député et le rester. Il s’agit de tout mettre en œuvre pour mener l’effondrement à son terme. Ce qui m’impressionne le plus, c’est la déconstruction systématique de tout ce qui fait qu’un pays est vraiment un pays. C’est surtout le nombre de décisions qu’on n’a pas prises, les choix qu’on n’a pas faits pour sauver ce qui mérite d’être sauvé. En fait, le choix, c’est le non-choix, dans l’attente du jour d’après. Et après l’effondrement ? Effritement total et vide ? Mais le vide n’est jamais vide. C’est ce qui reste quand on a enlevé tout ce qui nous fait vivre. Et ce ne sont pas les calculs d’épiciers sur la distribution des pertes ou les promesses farfelues sur la restitution des dépôts ou la prédation maquillée en plans de relance qui vont sauver le pays. Ce qu’il nous faut, c’est inventer des solutions pour sauver l’essentiel : imaginer un futur pour un pays qui a perdu son rôle économique et financier, dont l’épargne nationale a été volée et dont la vraie élite est en train de s’éloigner sans regarder derrière elle. Et le pire, c’est que les responsables de l’effondrement sont toujours là, avec leur captation du pouvoir à durée perpétuelle, leur air méprisant de vainqueurs en sursis, leurs mots, inchangés, sûrs d’eux-mêmes et qui continuent d’agir comme si rien n’avait changé. Pour eux, l’effondrement est le seul moyen de remettre les compteurs à zéro après avoir broyé des milliers de vies utilisées comme seule variable d’ajustement économique. Face au mépris des gens d’en haut, on oppose le déni de ceux d’en bas, de nouveaux pauvres, milliardaires en livres libanaises ou en dollars libanais, qui ont l’impression d’être des citoyens de seconde classe, dépourvus de leurs droits fondamentaux et de leur qualité d’êtres humains. Qui veulent que tout change, mais sans rien changer de leurs certitudes ni de leurs vies minuscules. Et l’absence d’émotion et d’énergie partout, dans une ambiance de fin du monde atroce, sous l’ombre étouffante d’une colonisation religieuse rampante, mais réversible.

L’effondrement est un choix, avec ses idiots utiles, qui s’apprêtent à quitter le pouvoir, en lambeaux, après avoir joué par aveuglement, cupidité, arrogance ou simplement par ignorance le rôle parfait de boucs émissaires d’une faillite programmée par avance et qui se serait produite avec ou sans eux. Qui pour remplir le vide ? Surtout pas celui que vous croyez. Mais un(e) président(e) pour donner un cap, pour définir les grands choix du pays, pour inventer, pour imaginer. Un(e) créateur(trice), un(e) visionnaire, un(e) chef(fe) d’État, un(e) vrai(e). Dans l’attente de jours meilleurs, on continue de creuser.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique Courrier n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, L’Orient-Le Jour offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires ni injurieux ni racistes.

Ce qui me gêne le plus dans la direction que prend le pays, c’est qu’on s’enfonce chaque jour un peu plus. Même au fond du trou, on continue de creuser avec acharnement. On n’a rien appris. Et crétiniser est devenu un sport national. Se crétiniser serait la garantie pour devenir ministre ou député et le rester. Il s’agit de tout mettre en œuvre pour mener l’effondrement à son...
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