Des visuels percutants, comme cette grande main rouge percée d’un œil, encadrée par les mots « Starve your ego, feed your soul ». Photo DR
Le streetwear contemporain est généralement influencé par les styles sportifs génériques et les lignes athlétiques épurées. Aux premiers temps de la mode sportswear, la féminité était généralement exprimée par des lignes plus épurées et des silhouettes plus minimales. Plus tard, les volumes audacieux ont commencé à se développer dans les vêtements de sport, les tissus high-tech et les approches old-school ont été utilisés dans le stylisme. D’une manière générale, le streetwear se définit par des silhouettes décontractées, des formes épurées, peu d’ornements et un sentiment général de sophistication, malgré tout. Dans les années 1990, le sweat à capuche est devenu un symbole d’isolement, tout en appartenant au monde scolaire et académique. Cette ambiguïté a séduit l’industrie de la mode qui a constaté l’attirance de toute une génération pour ce vêtement. C’est au Royaume-Uni que la récupération du sweat à capuche s’est développée à cette époque, car sa popularité a augmenté auprès du groupe démographique spécifique duquel il a émergé. Les jeunes hommes, souvent des skateurs ou des surfeurs, arborant le sweat à capuche, en ont répandu la tendance dans l’ouest des États-Unis, plus particulièrement en Californie.
La collection Eternal Rave qui se veut inspirée de l’esprit de la musique underground. Photo DR
UrbnGround, de Beyrouth à la jeunesse du monde
Né de la rue, son inspiration et son terroir naturel, le streetwear a décidément de beaux jours devant lui, dans la mesure où il incarne l’appartenance urbaine avec ses cultures et ses sous-cultures. Tout comme le graffiti qui est aussi un art de marquer un territoire, les tee-shirts à messages, le tracksuit, le chino et autres blousons véhiculent des signes d’appartenance. Dans un Beyrouth où la jeunesse est en ébullition face à un pouvoir et une société incapables de répondre à ses revendications et ses frustrations, le vêtement exprime des exigences permanentes à travers des visuels puissants. Parce que les mots s’envolent, les créatifs irrigués de l’énergie de la ville les fixent sur cette toile mouvante que peut être une chemise et les laissent vivre leur vie en transportant une philosophie fédératrice. UrbnGround est une marque de streetwear libanaise née à Beyrouth en 2020.
Une casquette qui affiche le mot « hated » (haï), comme le talisman d’une différence assumée. Photo DR
Créée par des jeunes pour les jeunes, elle s’est donné pour mission de sélectionner méticuleusement les vêtements de tous les jours, mêlant art, confort et tendances, avant de les livrer à ceux qui s’y retrouvent. « UrbnGround vient des profondeurs », soulignent ses fondateurs qui ajoutent, exagérant à peine : « Nous sommes la lumière qui guide chaque personne dans la nuit. » C’est que la nuit fait peur et qu’elle est multiple. Elle peut être la nuit noire des rues de la capitale, dangereuse et sans repères. Elle peut être absence d’horizon, chômage, perte de l’estime de soi, sentiment de solitude et d’échec permanent.
Des modèles UrbnGround de la collection Eternal Rave. Photo DR
« Nous transformons lentement le monde »
UrbnGround se donne, à cet égard, l’objectif de provoquer un changement positif à travers la construction d’une communauté locale qui rejoint une vaste communauté générationnelle porteuse de revendications communes en termes de libertés, d’affirmation de soi, de fluidité des genres, de diversité et d’inclusion, à travers un streetwear qui offre à la fois confort et graphismes significatifs avec de hautes exigences de qualité au niveau des matériaux et des finitions qui en assurent la durabilité. « Nous transformons lentement le monde », affirment les fondateurs qui, décidément, croient ferme en une mission cathartique qui dépasse largement la création de vêtements. « Dès le départ, nous avons voulu créer un style qui pourrait être une traduction transparente de l’identité de chaque personne. Avec des pièces sans genre et sans limites, nous avons construit une grande communauté au Liban, ainsi qu’à l’international, d’artistes et de DJs habillés en Urbn », lancent les créateurs qui poursuivent : « Chaque motif reflète la vie, les émotions et les sentiments de la personne.
UrbnGround s’est fait un nom au Liban en rejoignant la famille du streetwear et en proposant des créations qui reflètent la vie de chacun. »
L’un des modèles les plus spectaculaires, un soleil stylisé sur fond noir, avec : « If you dance like raindrops, there will always be sunshine. ». Photo DR
« Affame ton âme »
Sur leur site web urbnground.com, on peut découvrir la collection Eternal Rave qui se veut inspirée de l’esprit de la musique underground. L’esprit de Beyrouth, sa culture, son passé, rejaillissent sur des tee-shirts qui reprennent des paroles du célèbre tube Le temps des fleurs, lié à l’âge d’or de la ville, ou affichent des visuels percutants, comme cette grande main rouge percée d’un œil, encadrée par les mots Starve your ego, feed your soul (Affame ton ego, nourris ton âme). Parmi les toiles ambulantes que sont les tee-shirts, on trouvera aussi un collage d’une tête en céramique brisée, paupières closes, à travers laquelle percent des fleurs des champs, soulignée par les mots Awakening the blind (réveiller les aveugles). L’un des plus spectaculaires, un soleil stylisé sur fond noir, annonce : If you dance like raindrops, there will always be sunshine (si tu danses comme les gouttes de pluie, il fera toujours soleil). Ainsi de suite, tous de la même eau psychédélique et désenchantée, se déclinent des sweat-shirts, des pantalons de survêtement, des tee-shirts manches courtes ou longues et même une casquette qui affiche le mot hated (haï), comme le talisman d’une différence assumée, ou peut-être de l’impossibilité d’être aimé dans un monde qui s’obstine à rejeter ceux qui n’entrent pas dans ses moules.
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