Rechercher
Rechercher

Économie - Entrepreneuriat

NutNut passe les noix torréfiées libanaises à l’heure espagnole

L’enseigne a réinventé pour le marché européen ce savoir-faire traditionnel libanais.

NutNut passe les noix torréfiées libanaises à l’heure espagnole

Les cofondateurs de NutNut, Dany Sarrouf (à g.) et Marwan Riachi (à d.). Photo DR

Prenez deux amis libanais en quête d’un projet, torréfiez des noix avec une technique centenaire, assaisonnez-les de saveurs espagnoles et vous aurez la recette d’une réussite à la libanaise.

Fondée en 2018 par Dany Sarrouf et Marwan Riachi, NutNut réinvente les traditionnels délices salés dont les Libanais raffolent pour un marché espagnol peu familier des noix et de leurs dérivés. La greffe semble avoir pris puisque cette année le chiffre prévisionnel de vente de l’entreprise s’élève à 50 tonnes de noix et devrait même doubler l’an prochain, souligne Dany Sarrouf.

À l’occasion d’un séjour au Liban, L’Orient-Le Jour a rencontré l’entrepreneur libanais. Il revient sur le parcours atypique de NutNut qui a permis à l’entreprise de conquérir les tables espagnoles.

Une boutique de NutNut à Madrid. Photo DR

Une genèse surprenante

Tout est parti d’un dîner entre amis et d’une remarque sur des noix rapportées du Liban : « Si seulement nous avions de tels produits en Espagne. » Cette petite phrase sera le signe qu’attendaient Dany Sarrouf et Marwan Riachi, alors en quête d’une idée d’entreprise, mais que rien ne destinait à suivre cette voie si particulière.

« Je suis né au Liban et j’y suis resté jusqu’à mes trois ans. J’ai ensuite vécu en France et nous avons déménagé en Californie lorsque j’avais 6 ans », raconte Dany Sarrouf. Âgé de 50 ans et diplômé aux États-Unis en business et économie, il part en Espagne pour soutenir son père dans son entreprise de fabrication de matériel médical pendant vingt ans. Cette expérience lui a permis de maîtriser « la logistique et le cadre légal autour des normes d’hygiène ».

À 37 ans, Marwan Riachi a, pour sa part, appris la technique de torréfaction au Liban. Un domaine qui n’a rien à voir avec sa spécialisation d’origine de conseiller financier, notamment sorti des bancs de l’Université américaine de Beyrouth (en 2010) et de l’Instituto de Empresa (IE Business School) à Madrid.Une fois la gestion et le savoir-faire réunis, l’opération pouvait enfin être lancée. Ce qui ne se révélera pas être une mince affaire : « Notre investissement initial était de 250 000 euros tirés de nos fonds privés. » Un montant conséquent pour un projet audacieux d’autant qu’un tel marché n’existait pas en Espagne, souligne-t-il.

La torréfaction des noix dans la boutique de NutNut. Photo DR

Un marché à construire

Le concept d’une marque spécialisée exclusivement dans les noix et les produits complémentaires était encore étranger aux consommateurs espagnols. NutNut fait ainsi figure de précurseur en la matière en se développant au-delà des épiceries fines qui peuvent, entre autres, proposer une offre qui y ressemble bien que plus limitée.

« La principale difficulté a été d’introduire nos produits (sur le marché). Les deux premières années ont été les plus dures. » Le public s’interrogeait sur ces produits qu’il ne connaissait pas. Ce qui se traduisait par des achats limités, 100 grammes pour le client moyen, raconte-il. Aujourd’hui, la moyenne tourne autour « d’un demi-kilo, voire un kilo ». « Comme au Liban ! » se félicite Dany Sarrouf. Les noix ne sont par ailleurs pas les seuls produits proposés. Dans un souci « d’élargir la clientèle », explique-t-il, NutNut propose également « du chocolat et des fruits secs ». L’enseigne fournit également les bars chics et les hôtels de luxe de Madrid, comme le Four Seasons ou le Ritz.

L’enseigne profite aussi de sa situation d’exclusivité relative sur le marché espagnol. En effet, ses principaux rivaux libanais, Al Rifaï et Castania, n’y ont pas de points de vente même s’ils jouissent d’une forte présence sur internet par leur offre d’exportation mondiale. Ces marques plus anciennes ont, en outre, depuis longtemps acquis une clientèle fidèle et proposent des offres correspondant au marché arabe.

C’est cette trop forte compétition sur ce marché qui a découragé NutNut de se tourner vers le Liban ou les pays arabes. Castania possède par exemple quatre usines et est en mesure de produire 12 000 tonnes de noix torréfiées par an auxquelles s’ajoute une couverture internet plus importante grâce à un site en anglais, plus accessible que celui de la marque libano-espagnole qui n’est pas traduit.

Des créations originales

Dans le but de s’adapter au marché local, NutNut a dû développer une offre qui corresponde à la demande. Les créations proposées sont ainsi sensiblement différentes de celles qui emplissent les étagères libanaises, à l’exception évidente du zaatar (thym). Wasabi, parmesan, truffe, moutarde et miel font partie des goûts peu communs proposés pour repenser le concept même de la noix. « Nous voulons offrir une expérience gourmande pour faire goûter à notre clientèle les saveurs du Liban avec notre touche d’originalité », confie Dany Sarrouf.

Le bouche-à-oreille fonctionne bien pour l’enseigne, car chaque point de vente devient rentable « au bout de six mois » et le retour sur investissement se fait « en deux ou trois ans ». Les créations sont propres à NutNut. « La seule chose que nous ne produisons pas sont les noix, s’amuse-t-il d’ailleurs. Nous avons nos propres recettes d’épices et nos propres machines spécialement fabriquées au Liban. »

Expansion continue

L’enseigne s’est déjà largement agrandie. Trois boutiques ont rejoint la première à Madrid, renforcées par le lancement d’un site internet avec un service de commande en ligne. L’enseigne, maintenant bien installée, prévoit de renforcer sa présence par de nouveaux points de vente à Madrid, en Espagne et dans le monde. « D’ici à six mois, nous aurons fini le portfolio pour accorder des franchises, tant en Espagne qu’en dehors. Nous avons déjà des demandes alors que nous n’avons pas encore lancé l’appel d’offres », confie Dany Sarrouf.

Par ailleurs, NutNut continue de croître et a même « triplé en termes de volume de production » depuis sa création. L’entreprise compte en outre douze salariés aujourd’hui, ce qui n’empêche pas les deux cofondateurs de mettre quotidiennement la main à la pâte. Plus généralement, des pistes sont explorées afin encore d’élargir l’offre, notamment autour du café et des barres énergétiques, sans trahir le produit original. « Les noix sont notre produit phare, nous voulons leur faire honneur et ne pas dénaturer l’identité de notre entreprise », affirme-t-il.

Dany Sarrouf se veut optimiste « d’ici à un an ou deux, nous espérons avoir des franchises de NutNut dans d’autres pays européens. À long terme, nous visons les États-Unis ». En attendant, l’enseigne prévoit de doubler sa quantité vendue l’an prochain pour atteindre 100 tonnes de noix.

Prenez deux amis libanais en quête d’un projet, torréfiez des noix avec une technique centenaire, assaisonnez-les de saveurs espagnoles et vous aurez la recette d’une réussite à la libanaise.Fondée en 2018 par Dany Sarrouf et Marwan Riachi, NutNut réinvente les traditionnels délices salés dont les Libanais raffolent pour un marché espagnol peu familier des noix et de leurs dérivés....

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut