Du tourbillon « hypnotique » du Britannique Anish Kapoor à la lune fantasmée du Chinois Mao Tao, du street art californien à des créations vidéo corses ou marseillaises, Bonifacio, à l’extrême sud de l’île méditerranéenne, accueille sa première biennale internationale d’art contemporain.
« Au total, une quinzaine d’artistes français, marocain, américains, britanniques, brésilien, néerlandais, turque et chinois exposent leurs œuvres, explique à l’AFP Dominique Marcellesi, 30 ans, l’un des deux créateurs de cette biennale. Ils étaient pour la plupart restés fermés au public jusqu’à présent. »
Dans cette cité de 3 000 habitants qui accueille deux millions de visiteurs annuels, notamment l’été, cette première exposition, baptisée « Rouge Odyssée », fait référence à l’Odyssée d’Homère qui est passée par Bonifacio et plonge le visiteur, à travers vidéos, installations et graffitis, dans la Méditerranée et les thèmes de l’exil, du déracinement, des mouvements migratoires ou de l’esclavage.
« Nous souhaitions amener dans un espace rural et insulaire une offre culturelle habituellement cantonnée aux grands espaces urbains et mondialisés », tout en mettant « aussi en lumière la production artistique corse », commente Dominique Marcellesi.
L’exposition a été pensée en trois parties, la première évoquant « le mouvement des éléments, du temps, de la nature », détaille-t-il.
Le parcours débute à la microchapelle Saint-Roch, qui n’ouvre habituellement ses portes qu’une fois par an, pour une messe, avec Lavezzi, un film de l’artiste corse Mélissa Epaminondi montrant une mer Méditerranée filmée au ras de l’écume, calme ou déchaînée, puis parée d’un filtre rouge évoquant « autant le désir que le danger », pointe Prisca Meslier, cofondatrice de la biennale.
« Hypnotique »
Puis, dans le jardin du bastion, le regard glisse du panorama époustouflant des falaises blanches de calcaire plongeant dans le bleu de la Méditerranée à l’œuvre Descension du célèbre plasticien britannique Anish Kapoor : un tourbillon de liquide noir de trois mètres de diamètre qui semble disparaître dans le sol, à l’infini, dans un bruit d’ogre.
Déjà exposée, notamment à Versailles et New York, « cette œuvre est la plus emblématique de l’exposition, elle a nécessité une énorme ingénierie pour l’intégrer à l’architecture bonifacienne qui est protégée », souligne Prisca Meslier.
« C’est impressionnant, effrayant au départ et totalement hypnotique, on a du mal à s’extraire », s’enthousiasment auprès de l’AFP Nathalie et Xavier Sulmont, deux architectes lyonnais en vacances.
Pour la deuxième partie de l’exposition, sur « le mouvement des corps, des individus dans l’espace », la déambulation à travers la ville haute mène jusqu’à l’ancien cinéma, fermé en 1965, qui accueille les créations de deux artistes : le film The Leopard du Britannique Isaac Julien sur l’exil migratoire et l’œuvre visuelle de la féministe turco-française de 84 ans Nil Yalter, née au Caire et élevée à Istanbul : « La Méditerranée, c’est elle », résume la curatrice.
Pour la troisième partie, qui scrute « l’étape de la rencontre », direction la caserne Montlaur, fermée depuis la fin des années 80. Le site accueille six artistes.
Brille notamment la jeune Marseillaise Sara Sadik, avec deux œuvres dont un film, projeté sur écran géant, qui puise dans l’univers graphique des jeux vidéos et raconte les aspirations de Zine, jeune homme des quartiers populaires de la cité phocéenne.
Figure également le Chinois Mao Tao avec Fishing the Moon, une mise en valeur lumineuse et liquide d’une lune noire au bout d’un couloir où « deux haut-parleurs diffusent la fréquence de sept hertz qu’émet la terre dans l’univers, ainsi que l’esprit humain en phase de méditation », explique la fondatrice.
(En soirée jusqu’au 6 novembre 2022, www.derenava-art.com)
Maureen COFFLARD/AFP
commentaires (0)
Commenter