
Certaines infrastrucutures publiques sont délaissées depuis des années. Photo M.A.
C’est à l’occasion d’une journée de débat autour du thème « L’État : un choix incontournable » organisée dans ses locaux que l’institut Basil Fuleihan, rattaché au ministère des Finances, a présenté hier une nouvelle étude sur les dégâts provoqués par la crise que traverse le Liban se focalisant sur le secteur public. Intitulée « Enhancing Budget Transparency, Accountability and Inclusiveness in Lebanon-II », elle doit être publiée la semaine prochaine sur le site de l’institut. L’ambassadrice de France au Liban Anne Grillo, présente à la conférence, a confirmé, lors de son discours « qu’il n’y aura pas de Liban sans État n’en déplaise à ceux qui l’ont investi pour mieux le faire disparaître, ceux qui voudraient le mettre au pluriel pour mieux se l’approprier, et ceux qui voudraient le mettre aux enchères pour se rembourser de leurs propres errements. Ils se reconnaîtront, ils appartiennent au même syndic de faillite ».
« À bout de souffle », plus de la moitié (54,5 %) des administrations et institutions du pays ont déclaré ne pas être en mesure de maintenir leurs services au-delà de 12 mois, avec les répercussions que cela implique en termes d’eau, d’électricité et de sécurité. Déjà, 53 % d’entre elles ont estimé ne pas avoir pu maintenir leur offre de services, en raison également de la situation délétère du matériel informatique.
De plus, les administrations et institutions font face à des « fuites de leurs talents », et en particulier les plus qualifiés comme les médecins, les enseignants, les ingénieurs et les informaticiens, rendant alors une éventuelle reprise économique plus difficile. Ainsi, 55,8 % des entités interrogées ont indiqué que les demandes de congé sans solde se sont multipliées. L’institut Basil Fuleihan précise que les démissions en série, l’absentéisme en hausse – atteignant 80 % en moyenne –, la perte du pouvoir d’achat et la migration des compétences sont des facteurs qui rendent difficile la gestion de la crise.
L’économiste en chef et directrice de la coopération et des partenariats au sein de l’institut Basil Fuleihan, Sabine Hatem, hier à la conférence à Beyrouth. Photo M.A.
Défaillances en chaîne
L’institut met aussi la lumière sur le risque de réactions en chaîne provoquées par certaines défaillances. En ce qui concerne par exemple la commande publique, l’institut note que le manque de planification a « perturbé les cycles d’approvisionnement », avec plus de 50 % des institutions (52,3 %) qui ont partiellement respecté leurs plans d’achat, alors que 23,1 % n’ont même pas pris la peine de planifier leurs achats. Les contrôles internes et les audits externes de chaque administration et institution ne sont effectués que dans 21,4 % des cas.
Les problèmes de planification, combinés à la crise, se sont répercutés au niveau budgétaire, avec 53,8 % des entités sondées qui affirment avoir subi des coupes de plus de 20 % de leurs dépenses de fonctionnement. Sans oublier qu’en l’absence de budget 2021 et 2022 – le premier n’ayant pas été adopté par le Parlement, et le second toujours à l’étude par la commission des Finances et du Budget –, les administrations et les institutions publiques fonctionnent avec « moins de 10 % du budget 2020 (en raison de la dépréciation de la livre), alors que leurs besoins ont augmenté », a rappelé l’économiste en chef.
En l’absence de budget, l’État finance ses dépenses selon la règle du douzième provisoire, dictée par une interprétation très extensive de l’article 86 de la Constitution, dont les dirigeants avaient déjà abusé par le passé. Dans ce contexte, Sabine Hatem précise que seules 27 % des administrations et institutions publiques ont eu accès à un financement externe avec lequel elles ont pu combler une partie de leur manque de moyens. Autre conséquence de l’absence de planification : 24,5 % des administrations et institutions ont décidé ou se sont trouvées contraintes de recourir à des contrats de gré à gré pour leurs achats, se rabattant sur les offres disponibles au détriment de la concurrence.
Cette gestion chaotique de la commande publique a créé dans 67,7 % des cas des pénuries de certains biens « de première nécessité », comme le carburant ou encore le matériel informatique, et elle est en partie la cause d’une accumulation d’arriérés de paiement allant de 1 à 12 mois pour 55,3 % des institutions. Cette situation, cumulée au fait que les entreprises fournisseuses de biens ou services à l’État ont demandé à être payées en espèces, voire en devise, a poussé certaines entités à moins travailler avec le secteur privé, relève encore Sabine Hatem. Cette situation provoque aussi des problèmes au niveau des finances publiques, entre autres conséquences débattues au cours des échanges de la journée organisée par l’institut.
L’amélioration de la gouvernance et la lutte contre la corruption dans le secteur public sont deux axes de réforme exigés par le Fonds monétaire international à qui le Liban a sollicité une aide. Le FMI, qui a consenti à conclure un accord préliminaire le 7 juin, a prévu de dépêcher ses équipes dans un futur proche pour effectuer un diagnostic de la gouvernance dans le pays.
ces constats n'ont rien de nouveau, ça fait des années qu'on nous rabache les mêmes vérités (voir par ex. le rapport McKinsey commandé par le gouvernement libanais et publié en 2018 avec moult chiifres et évidences sur ce qu'on savait depuis des lustres.) mais en bons moutons de panurge, nous continuons à soutenir un système basé sur le communautarisme et les religions pour notre asservissement collectif. et pour encore mieux assurer la conitnuité du système et de notre descente aux enfers, nous avons majoritairement voté pour les mêmes assassins et mafieux qui entretiennent le système depuis 1975. au lieu de regretter un leader mort ou de réver d'un futur leader illusoire, soyons chacun notre propre leader. mais ça demande à chacun de nous de prendre ses responsabilités. pour ça, il faudrait du courage...
14 h 44, le 18 juin 2022