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Politique - Éclairage

La ferveur électorale de la diaspora aura-t-elle un effet contagieux ?

Les Libanais de l’étranger ont appelé massivement leurs compatriotes de l’intérieur à se mobiliser dimanche prochain pour le changement.

La ferveur électorale de la diaspora aura-t-elle un effet contagieux ?

Des Libanais de la diaspora votant à Dubaï, dimanche 8 mai 2022. Karim Sahib/AFP

« C’est un spectacle qui fait chaud au cœur. L’espoir est de retour. » C’est par cette phrase érigée en leitmotiv que nombre de Libanais, résidant au pays ou à l’étranger, ont décrit le spectacle qui s’est offert à eux vendredi et surtout dimanche, alors que près de 130 000 électeurs de la diaspora se sont rendus aux urnes. Le taux de participation, aux alentours de 60 %, n’est pas beaucoup plus élevé qu’il y a quatre ans (56%), mais le nombre d’inscrits a triplé entre-temps.

Surtout, l’enthousiasme était au rendez-vous. Peut-il désormais être contagieux ? L’appel des émigrés, renouvelé aux quatre coins du monde à l’adresse de l’électorat libanais l’invitant à aller exercer son devoir, a-t-il des chances d’être entendu dimanche prochain lors du scrutin organisé dans les 15 circonscriptions libanaises ? S’il est difficile pour l’heure de prédire l’humeur électorale qui prévaudra le jour J, il n’en reste pas moins que la dynamique enclenchée vendredi dernier et surtout dimanche pourrait bien se répercuter positivement sur les Libanais de l’intérieur qui vivent toutefois une réalité foncièrement différente de celle de leurs compatriotes à l’étranger. « Nous avons réussi à créer une véritable tendance, une nouvelle dynamique qui pourrait bien changer l’équation », commente Diane Assaf, de Kulluna Irada, un groupe de pression libanais proche de la contestation. Les vidéos des Libanais de l’étranger qui ont fait la queue des heures durant pour déposer leur bulletin de vote ou ceux qui sont arrivés aux bureaux de vote en dernière minute, traînant derrière eux leurs valises, ont énormément circulé. « Ce qu’on a vu à la télé nous a renvoyé une image citoyenne du processus électoral dont on doutait encore et l’a crédibilisé », commente un électeur libanais averti.

L'édito d'Elie Fayad

Voter... même en se bouchant le nez

L’organisation en amont sur le terrain par une armée de volontaires principalement issus de la contestation, les énergies déployées par des activistes qui se sont constitués en réseau – c’est le cas pour le TLDN, The Lebanese Diaspora Network – pour informer, sensibiliser et rassembler un électorat qui avait besoin d’encadrement et d’orientation, ont répercuté une image rassurante d’une diaspora qui reste farouchement attachée à son pays et avide de le ressusciter de ses cendres.

C’est aussi le cas de Sawti, une initiative d’Impact Lebanon, née dans le but de promouvoir la citoyenneté active, mettre l’accent sur les partis alternatifs et encourager les Libanais du monde entier à participer au processus politique. Les jeunes volontaires de Sawti, notamment son cofondateur Georges Khoury, ont été déjà mobilisés pour inciter la diaspora à l’enregistrement et, ces derniers mois, pour les encourager à effectivement voter. Pour ce faire, Sawti a produit des vidéos didactiques expliquant pas à pas la loi électorale, le processus de vote et l’importance de chaque voix de la diaspora. Ils ont également ouvert une hotline à travers Instagram pour aider et guider les électeurs. Les efforts de Sawti ont été couronnés par une forte participation notamment au Royaume uni où vivent la plupart des volontaires du réseau.

Certes, une grande majorité d'électeurs était constituée de jeunes dont la plupart ont récemment émigré et qui sont par conséquent d’autant plus animés du désir de changer qu’ils ont témoigné des multiples tragédies et misères qui se sont succédé au Liban depuis 2019. À leur tête, l’explosion au port de Beyrouth le 4 août 2020. « Parmi les électeurs hier se trouvaient près de 100 000 inscrits qui font partie de la dernière vague d’immigration », indique Nancy Stephan, membre fondateur de la TLDN. Un chiffre approximatif que confirme Hadi Hachem, le responsable du service des émigrés au sein du ministère des Affaires étrangères. « Après le sentiment qu’une nouvelle génération est en train de réécrire l’histoire du pays, après ce moment intense politiquement et émotionnellement qu’ils ont vécu durant la révolte du 17 octobre, la défaite et la chute ont été aussi intenses et aussi rapides que l’euphorie durant la révolution », note Ziad Majed, universitaire et chercheur, pour expliquer le sentiment d’apathie qui semble au contraire dominer au Liban.

Une situation dont les Libanais de la diaspora sont conscients et qu’ils souhaitent inverser par un effet de contagion qu’ils espèrent majeur. Pour atteindre cet objectif, il faudrait cependant contrer les barrières psychologiques, mais aussi culturelles, qui expliquent l’apathie ou l’abstentionnisme déclaré chez certains. Car pour de nombreux électeurs, le changement reste une affaire de mentalité et d’éducation politique dont nombre de Libanais, qui sont aujourd’hui en dessous du seuil de pauvreté, ne jouissent pas nécessairement.

« Dégâts irréversibles »

Pour Karim Bitar, politologue, il s’agit de deux sociologies électorales assez différentes. « Les Libanais sur place sont pris à la gorge par leurs problèmes sociaux et économiques, en dehors de quelques élites chez lesquelles on trouve encore cet esprit de changement qui est celui de la diaspora », dit-il. Une situation qui les place, de toute évidence, dans une dynamique de survie et d’intérêt.

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C’est le cas notamment dans les régions périphériques comme Tripoli, où les gens qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts sont toujours dépendants des réseaux clientélistes, explique le politologue. C’est aussi, souligne le politologue, une question d’éducation politique qui fait défaut, beaucoup d’entre eux étant des « esprits captifs qui vivent toujours dans le culte de la personnalité de tel ou tel leader traditionnel ». Un cercle vicieux de la misère couplé à un manque de culture politique que l’establishment s’est évertué à perpétuer. L’autre obstacle est de nature psychologique. La violence inouïe de la catastrophe économique, couplée à la violence de la contre-révolution menée par le Hezbollah, puis celle de l’explosion à Beyrouth du 4 août 2020, « a créé une colère et un sentiment d’insécurité, comme si tout le pays est une bombe à retardement », souligne M. Majed. « Pour certains Libanais de l’intérieur, les dégâts sont irréversibles. Pour d’autres, il faut encore un peu de temps pour qu’ils puissent sortir de cette phase traumatisante dans laquelle ils vivent », analyse le politologue.

Par contre, pour ceux qui ont quitté le pays ou ceux qui étaient encore à l’extérieur, les effets ne sont pas les mêmes. « Certes, il existe chez eux une rage similaire, mais aussi un sentiment de culpabilité du fait qu’ils sont loin et qu’ils ne souffrent pas comme ceux du Liban ; cela rend les jeunes plus acharnés et plus déterminés à exprimer leur colère et leur désir de changer les choses », ajoute-t-il. Pour autant, les Libanais de la diaspora continuent de miser sur une réaction contraire, qui extirperait les électeurs hésitants de leur apathie et dissuaderait les abstentionnistes dans une volonté de survie politique, et surtout par un effet incitatif provoqué par les appels des mouvements réformateurs de la diaspora.

« C’est un spectacle qui fait chaud au cœur. L’espoir est de retour. » C’est par cette phrase érigée en leitmotiv que nombre de Libanais, résidant au pays ou à l’étranger, ont décrit le spectacle qui s’est offert à eux vendredi et surtout dimanche, alors que près de 130 000 électeurs de la diaspora se sont rendus aux urnes. Le taux de participation, aux...

commentaires (5)

On attend avec impatience D imanche, ce jour fatidique duquel on attend un miracle qui aura lieu ou pas mais on moins on saura à quoi s’en tenir et les libanais n’auront plus le droit de se plaindre de leur vie misérable si les résultats ne sont pas à la hauteur de leur espérance. Ils aurait choisi leur mort plutôt que leur renaissance et une vie digne. J’en tremble a l’idée qu’une faction des libanais pousserait leur connerie jusqu’à préférer leur mort à celle de leurs tortionnaires et ainsi prolonger l’agonie du pays et des autres libanais qui se battent pour eux en espérant qu’ils se réveillent enfin. L’erreur n’est plus permise, votez tous pour le pays et son drapeau et non pour les mercenaires et les vendus.

Sissi zayyat

17 h 55, le 10 mai 2022

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Commentaires (5)

  • On attend avec impatience D imanche, ce jour fatidique duquel on attend un miracle qui aura lieu ou pas mais on moins on saura à quoi s’en tenir et les libanais n’auront plus le droit de se plaindre de leur vie misérable si les résultats ne sont pas à la hauteur de leur espérance. Ils aurait choisi leur mort plutôt que leur renaissance et une vie digne. J’en tremble a l’idée qu’une faction des libanais pousserait leur connerie jusqu’à préférer leur mort à celle de leurs tortionnaires et ainsi prolonger l’agonie du pays et des autres libanais qui se battent pour eux en espérant qu’ils se réveillent enfin. L’erreur n’est plus permise, votez tous pour le pays et son drapeau et non pour les mercenaires et les vendus.

    Sissi zayyat

    17 h 55, le 10 mai 2022

  • JE NE COMMENTE PLUS QUE TRES RAREMENT. MES COMMENTAIRES MEME LES PLUS BENINS SANS CRITIQUE ET JAMAIS D,INSULTE SONT PRESQUE TOUJOURS CENSURES. A QUOI BON PERDRE MON TEMPS. C,EST LA DEMOCRATIE ET LA LIBRE EXPRESSION COMME VUES ET COMPRISES PAR L,OLJ.

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 27, le 10 mai 2022

  • Vivement dimanche! Et qu'on en finisse avec ce cirque qui, finalement, ne va aboutir qu'à un Parlement semblable à tous ceux qui l'ont précédé...

    Georges MELKI

    10 h 02, le 10 mai 2022

  • Les urnes contanant les votes des Libanais de l'etranger ont ete confiees a Riad Salame, a la BDL Parions qu'avant la fin de la semaine il les aura videes de leur substance.

    Michel Trad

    09 h 37, le 10 mai 2022

  • Peut-être est-ce aussi parce que les libanais de la diaspora ont expérimenté les processus démocratiques dans leurs différents pays d’accueil, notamment en Occident. Ils savent donc qu’une voix dans les urnes, ça compte, et que le changement ne se fait pas nécessairement par le biais d’un conflit armé. Nous avons encore cette chance inouïe pour un pays du Moyen-Orient de pouvoir voter. Pourquoi s’en priver ?

    Esber Arwad

    09 h 02, le 10 mai 2022

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