Raï : La préservation de l'argent de la population est sacrée

Le patriarche maronite, Béchara Raï, a affirmé dimanche que la préservation de l'argent de la population était "sacrée", alors que le pays fait face depuis 2019 à une crise économique et financière inédite et que les dépôts en banques de nombreux Libanais sont inaccessibles depuis, certains experts estimant que ces montants n'existent même plus. Entre-temps, l'Etat tente de faire adopter une loi pour formaliser le contrôle des capitaux , imposé illégalement depuis trois ans par les banques, mais ce texte, qui constitue l'une des réformes réclamées par le Fonds monétaire international (FMI) pour débloquer une assistance financière, est critiqué de tous bords et interviendrait trop tard, selon des experts.

"Le gouvernement est tenu de clarifier à la population l'avenir de son argent et l'impact de toute nouvelle législation en la matière, ainsi que les conséquences que celle-ci aura sur la liberté d'en disposer", a martelé le cardinal Raï, lors de son homélie dominicale au patriarcat de Bkerké. "Les gens et les formations politiques ont le droit de s'opposer à tout ce qui est flou et confus et qui touche aux droits de la population, ainsi qu'au système économique libre. Si l'accord avec le FMI est une chose souhaitable, la sauvegarde des droits et de l'argent de la population est sacrée", a prévenu Mgr Raï.

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Le projet de loi du gouvernement sur le contrôle des capitaux a été envoyé aux commissions parlementaires pour qu'elles se prononcent là-dessus. Toutefois, les députés ne sont toujours pas parvenus à unifier leur position à cet égard, alors que, parallèlement à ces réunions, des sit-in près du Parlement ont eu lieu ces derniers jours, plusieurs députés ayant été chahutés par les manifestants.

Explosion au port, Ghada Aoun et législatives

Sur un autre plan, le cardinal maronite a une nouvelle fois critiqué, sans les nommer, "ceux qui entravent l'enquête sur le crime de l'explosion au port de Beyrouth", en allusion aux responsables politiques et sécuritaires de tous bords, poursuivis par le juge Tarek Bitar, et qui tentent de bloquer l'investigation. "Pourquoi certaines personnes détenant des informations et des photos ont été assassinées ? Et pourquoi certains suspects poursuivis sont en cavale ?", s'est demandé le patriarche. Il a également critiqué, sans la nommer, la procureure générale près la cour d'appel du Mont-Liban, Ghada Aoun, réputée proche du chef de l'Etat, Michel Aoun, et qui poursuit le gouverneur de la Banque du Liban (BDL), Riad Salamé, et son entourage, alors que Mgr Raï prend la défense du chef de la BDL. "Vous les juges qui fabriquez les dossiers à la demande de ceux qui ont du pouvoir, mettant en échec le système et défigurant l'image de la justice", a-t-il ainsi lancé.

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Mgr Raï a ensuite abordé la question des élections législatives du 15 mai, appelant la population à "voter pour ceux qui répondent à ses besoins et à un Parlement qui soit à la hauteur des défis, notamment l'élection d'un président de la République à la date prévue" en octobre. Il a enfin présenté ses condoléances aux proches des victimes du naufrage d'un bateau de migrants qui a coulé samedi soir au large de Tripoli, au Liban-nord, faisant au moins six morts, selon un bilan provisoire.

Pour sa part, le métropolite grec-orthodoxe de Beyrouth, Elias Audi, qui célébrait le dimanche de Pâques de la communauté, a appelé les Libanais à "libérer le pays de ceux qui le prennent en otage". "Utilisez vos voix pour réclamer des comptes et obtenir vos droits", a-t-il plaidé, en amont des législatives. "L'explosion (au port de Beyrouth le 4 août 2020) n'est pas la seule à tuer. L'humiliation, la faim et le désespoir tuent aussi. Ne vous laissez pas soumettre", a-t-il plaidé auprès de ses fidèles. "Faites travailler votre conscience, car le salut est entre vos mains (...)", a conclu Mgr Audi en s'adressant aux électeurs.