
Le ministre libanais des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib, à Moscou, le 22 novembre 2021. Photo EVGENIA NOVOZHENINA / POOL / AFP
Le ministre libanais des Affaires étrangères, Abdallah Bou Habib, a affirmé vendredi n'avoir reçu "aucun signe diplomatique du retour des ambassadeurs (du Golfe) au Liban", en dépit de la récente ouverture de ces monarchies à l'égard de Beyrouth. Il a également soutenu ne "pas être prêt à accepter une guerre civile pour appliquer la résolution 1559" de l'ONU qui appelle au désarmement du Hezbollah, une requête de la communauté internationale comprise dans la feuille de route arabe remise par le Koweït aux autorités libanaises pour rétablir les liens entre les deux parties.
Les relations entre le Liban et les pays du Golfe ont connu un sérieux coup depuis octobre dernier, sur fond de divergences sur le rôle du Hezbollah pro-iranien dans la région. Le chef de la diplomatie du Koweït avait remis au Liban une feuille de route qui porte, entre autres, sur le désarmement du parti chiite, un sujet qui divise la classe politique locale.
Le Premier ministre, Nagib Mikati, avait déclaré, il y a une semaine, au Qatar où il s'était réuni avec plusieurs responsables arabes, que les monarchies du Golfe allaient rétablir leurs relations avec le Liban. Selon des informations obtenues par L’Orient-Le Jour, une réunion du Conseil de coopération du Golfe (CCG) devait se tenir dimanche dernier et déboucher sur un retour des ambassadeurs du CCG qui avaient quitté Beyrouth en octobre. Cette réunion a toutefois été reportée en raison des rencontres, en Israël, entre les ministres des Affaires étrangères des États-Unis, d’Israël, des Émirats arabes unis, du Maroc, de Bahreïn et d’Égypte. L’ambassadeur d’Arabie saoudite, Walid Boukhari, devait être de retour cette semaine à Beyrouth, et celui du Koweït aussi.
Arsenal du Hezbollah
"Nous n'avons reçu jusque-là aucun signe diplomatique du retour des ambassadeurs (du Golfe) au Liban", a souligné M. Bou Habib, lors d'une émission télévisée sur la chaîne Al-Horra. Il a également indiqué que la réponse du Liban "a été saluée au Koweït", assurant "ne pas avoir reçu des réserves de ce pays ni de l'Arabie saoudite".
Interrogé au sujet de l'application de la résolution 1559 qui porte sur "le désarmement et la dissolution de toutes les milices" et l’extension du contrôle du gouvernement libanais sur tout son territoire, le chef de la diplomatie a évoqué le risque d'une guerre civile dans le pays qui empêcherait le respect de cette revendication. "Je suis en faveur de la présence d'une seule armée au Liban, mais je ne suis pas prêt à accepter une guerre civile pour appliquer cette résolution", a-t-il soutenu. "Nous devons nous asseoir ensemble et réfléchir avec les pays arabes et l'ONU aux moyens d'exécuter la 1559", a-t-il plaidé.
Frontière maritime
Abordant le tracé de la frontière maritime avec Israël, le ministre a souligné qu'il s'attend à ce que le Liban soumette sa réponse à la dernière proposition de l'émissaire américain, Amos Hochstein, au cours du mois d'avril.
Les autorités libanaises devaient rendre leur réponse à l'émissaire fin mars, mais il semble qu’une nouvelle fois les tiraillements politiques locaux aient eu raison de l’avancée de cette question dans le cadre de laquelle un bras de fer évident oppose le président Michel Aoun au Hezbollah, qui accuse les autorités d’avoir revu leurs ambitions à la baisse et estime que ce dossier sera reporté jusqu’à après les législatives.
Interrogé au sujet d'une potentielle visite en Syrie en vue d'étudier le dossier du rapatriement des réfugiés syriens, le ministre a dit qu'il le fera lorsqu'il percevra un signe positif qui sert l'intérêt des Libanais. Il a ajouté que la communauté internationale finance la poursuite de la présence des réfugiés au Liban. Ce dossier a été remis sur le tapis, notamment par M. Aoun, à un moment où le monde est occupé par l’afflux de réfugiés ukrainiens en Europe suite à l'invasion russe.
Revenant sur le projet de nominations et permutations diplomatiques attendu depuis plusieurs mois, M. Bou Habib a déploré que les quotes-parts entravent ce processus et promis toutefois de trouver des solutions avant la prochaine réunion du Conseil des ministres. Il a enfin souligné que les préparatifs logistiques pour le vote des expatriés aux législatives du 15 mai sont achevés.
C’est le Liban qui doit donner des réponses aux pays qui ne veulent plus coopérer avec lui et pas l’inverse, d’une part, et de l’autre la résolution 1559 doit être implémenter in extenso pour que le peuple libanais puisse redevenir un exemple de démocratie pour toute la région. Le dossier de délimitation des eaux doit être réglé au plus tôt, les compromis sont absolument nécessaires pour que l’on puisse exploiter le gaz et le pétrole pour peu qu’il y en ait. Le retour des réfugiés syriens ne peut se faire tant qu’un boucher règne à Damas. La reconstruction de ce pays ne pourra se faire sans cela à moins que les Etats-Unis ne baissent les bras.
16 h 23, le 03 avril 2022