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Nos Lecteurs ont la Parole

Le 8 mars des Libanaises

La journée commence par une pluie torrentielle d’images représentant des bouquets de fleurs roses sur un fond rose bonbon et des souhaits succulents à l’eau de rose. À force de recevoir ces éloges et souhaits transférés et retransmis à l’infini, sur tous les réseaux sociaux, les Libanaises finissent par croire qu’elles ont l’adoration qui n’est due qu’à Dieu. Sublime journée, comme celle de la fête des Mères ! Des célébrations ! Elles jubilent ! C’est leur fête ! Tout a l’air d’être bien ! Même parfait ! Elles vivent, le temps d’une matinée, dans le meilleur des mondes possible, « un nouvel eldorado » ! Et elles oublient dans l’ivresse des festivités que leur 8 mars est boiteux. Elles oublient que les droits des femmes au Liban sont amputés. Elles oublient que cette société patriarcale les accable. Elles oublient qu’elles sont toujours hors de la vie politique, sans liberté, aliénées par des pratiques, des us et coutumes plus vieux que le plus vieux métier du monde. Elles oublient que leur très cher Premier ministre puise son inspiration de leur condition. C’est évident ! Il les comprend très bien ! En fin connaisseur de leur situation, il compare Beyrouth à une femme divorcée, il reconnaît que c’est une femme mal aimée… et reconnaît qu’elle est une femme brisée et détruite. Mais quand même, il lui demande de subir en silence la violence et de supporter, de se taire pour le bien commun ou le bien des hommes !

Elles oublient que le député pour lequel certaines femmes ont voté s’indigne et s’oppose à la loi qui interdit la violence conjugale en disant : « L’homme ne peut plus éduquer sa femme ! » Comme si, l’éducation des femmes est un droit naturel divin accordé au mari. Elles oublient que les filles mineures risquent le mariage mortel. Elles oublient que le fameux oracle s’inspire de leur malheur, pour prédire l’avenir noir du pays. Ces hommes, conscients des dérives, ferment les yeux, se bouchent les oreilles et espèrent que cette journée sera comme les autres, silencieuse, calme et douce comme une voix féminine. Cependant, il y a le bruit d’une mer houleuse dans les esprits des femmes libres et révoltées. Brisant le silence comme les vagues quand elles s’abattent sur la plage, des militantes dénoncent, s’indignent. C’est le mouvement qui précède la révolte, c’est le rythme montant en crescendo, c’est le calme doux qui précède la tempête. Ce sont ces femmes-là – la mère, la sœur, la fille – qui ressemblent à la mer, et qui n’accepteront jamais de rester silencieuses. Elles sont la voix grondante de « liberté et égalité » qui guidera les femmes dans cette marche pour réaliser ce 8 mars rêvé et tant attendu.

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

La journée commence par une pluie torrentielle d’images représentant des bouquets de fleurs roses sur un fond rose bonbon et des souhaits succulents à l’eau de rose. À force de recevoir ces éloges et souhaits transférés et retransmis à l’infini, sur tous les réseaux sociaux, les Libanaises finissent par croire qu’elles ont l’adoration qui n’est due qu’à Dieu. Sublime...

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