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Moyen-Orient - Éclairage

Face à la guerre en Ukraine, les Émirats naviguent entre leurs partenaires

Les EAU s’étaient d’abord abstenus deux fois au Conseil de sécurité de l’ONU. Mercredi soir, ils ont pourtant fait volte-face en votant pour la condamnation de l’invasion russe en Ukraine. Une voix qui se module au gré des intérêts émiratis.

Face à la guerre en Ukraine, les Émirats naviguent entre leurs partenaires

Une résolution condamnant l’invasion russe en Ukraine a été adoptée à une écrasante majorité de 141 pays lors de l’Assemblée générale exceptionnelle des Nations unies, mercredi 2 mars 2022 à New York. Michael M. Santiago/Getty Images/AFP

Ce vote sonne comme un retour au bercail. Alors que la plupart des pays arabes avaient jusque-là évité de prendre position par rapport à la guerre en Ukraine, la majorité a voté mercredi soir en faveur de la résolution onusienne exigeant le retrait immédiat et inconditionnel des forces russes, à l’exception notable de la Syrie. Alliés stratégiques de Washington, les Émirats arabes unis (EAU) étaient notamment attendus au tournant, du fait de leurs deux abstentions précédentes sur le dossier ukrainien au Conseil de sécurité de l’ONU, où ils siègent temporairement jusqu’à fin 2023. Dimanche dernier, le conseiller diplomatique du président émirati, Anwar Gargash, déclarait sur son compte Twitter que « prendre parti conduirait uniquement à plus de violence ». Si tout semble désormais rentré dans l’ordre, les tensions et les frustrations entre les deux partenaires persistent néanmoins en coulisses, selon le site d’information Axios. Tout en se montrant optimiste, l’ambassadeur émirati à Washington, Youssef al-Otaïba, confirmait hier que la relation entre les deux alliés était en ce moment soumise à « une épreuve de résistance ».

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Sur les 193 États membres de l’ONU, une majorité écrasante de 141 pays a voté mercredi soir en faveur d’une résolution non contraignante appelant au retrait immédiat des forces russes d’Ukraine, lors de l’Assemblée générale exceptionnelle convoquée pour l’occasion. S’il souligne l’isolement international du Kremlin, ce vote a également prouvé la capacité des Occidentaux à finalement rassembler leurs alliés, ce qui ne semblait pas gagné d’avance. Au Moyen-Orient notamment, le silence qui a résonné la semaine dernière face à l’invasion de l’Ukraine par Vladimir Poutine a laissé un goût amer à Washington. Parmi ses alliés traditionnels, aucun – en dehors du Liban officiel – ne s’est montré enclin à répondre aux appels occidentaux à condamner l’attaque russe sur son voisin. Au lendemain du début de la guerre, les EAU, seul pays de la région siégeant actuellement au Conseil de sécurité de l’ONU, s’étaient abstenus lors du vote d’une résolution pour exiger l’arrêt immédiat de l’attaque et le retrait des troupes russes, à la grande déception de leur allié américain. Une position qu’ils ont maintenu dimanche dernier, lors d’un vote procédural – pour lequel Moscou ne pouvait cette fois pas utiliser son droit de veto en tant que membre permanent du Conseil de sécurité – afin de porter la crise ukrainienne devant l’Assemblée générale des Nations unies, une première depuis 40 ans.

Une approche transactionnelle

« Il y a deux théories sur les abstentions émiraties au Conseil de sécurité. La première est qu’ils n’ont pas apprécié certains positionnements américains et voulaient ainsi prouver qu’ils pouvaient voter différemment. La seconde est que c’était un mouvement tactique avant le vote d’une résolution sur les houthis », indique une source diplomatique à L’Orient-Le Jour, qui a requis l’anonymat. Lundi dernier, cette résolution proposée par la fédération émiratie a ainsi été adoptée à la majorité, emportant le soutien de la Russie comme des États-Unis. Qualifiant pour la première fois les houthis de terroristes, elle doit étendre un embargo sur les armes, précédemment restreint à certains de ces chefs, à l’ensemble du groupe yéménite soutenu par Téhéran dans sa lutte contre les forces progouvernementales, elles-mêmes appuyées par une coalition menée par l’Arabie saoudite et à laquelle participent les EAU. Si Moscou et Abou Dhabi ont démenti tout échange de voix lors de ces différents votes, la Russie s’était néanmoins abstenue l’année dernière lors du renouvellement des sanctions onusiennes concernant le Yémen. De même, avant de changer apparemment d’avis sur la question, les Émiratis avaient voté en faveur d’une réunion du Conseil de sécurité de l’ONU le 31 janvier dernier pour discuter de la situation en Ukraine. « Des négociations ont probablement eu lieu dans le contexte actuel », mentionne le diplomate précité.

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Si son approche peut paraître transactionnelle, la fédération émiratie s’attelle néanmoins à garder autant que possible ses distances face aux belligérants de ce conflit qui se déroule aux confins de l’Europe. Abou Dhabi s’est ainsi contenté de mentionner vaguement la « situation en Ukraine », sans évoquer de responsabilités, pour annoncer mercredi une aide humanitaire de 5 millions de dollars qui doit transiter par l’ONU pour les civils ukrainiens. La prudence est de mise parmi tous les alliés de Washington dans la région, alors que la plupart ont opéré ces dernières années une diversification de leurs alliances face au désengagement américain, entamé sous la présidence de Barack Obama. Dans le Golfe notamment, la confiance des dirigeants dans leur partenaire s’est ébranlée depuis la défaillance du parapluie sécuritaire américain face à l’attaque de 2019 sur les installations pétrolières de la société saoudienne Aramco, revendiquée par les rebelles houthis et attribuée par Donald Trump, alors président, à leur parrain iranien.

Attitude de défiance

Abou Dhabi, qui a fait à son tour l’objet en janvier d’attaques répétées sur son territoire en provenance du Yémen, avait demandé à Joe Biden de remettre les houthis sur la liste américaine des groupes terroristes, dont il les avait rayés à son arrivée à la Maison-Blanche, afin de faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire dans le pays. À ce jour, l’administration démocrate continue d’affirmer que cette demande est en cours d’examen, sans franchir le pas. Agacés par la pression américaine pour mettre un terme au contrat avec le géant des télécommunications chinois Huawei concernant le déploiement de la 5G sur son territoire, les EAU avaient précédemment suspendu les négociations pour l’achat d’avions de combat F-35 pour environ 23 milliards de dollars. Mardi, dans un geste de bonne volonté, Washington a réitéré son engagement à vendre à son partenaire stratégique ces avions ainsi que des drones armés. Autre allié des États-Unis qui adopte une position défiante dans cette crise, l’Arabie saoudite de Mohammad ben Salmane. Malgré les pressions américaines pour faire baisser les prix des hydrocarbures, en forte hausse depuis le début de la crise ukrainienne, Riyad a réitéré cette semaine son engagement à s’en tenir au plan de l’OPEP+ d’augmenter la production mensuelle de seulement 400 000 barils, en coordination étroite avec Moscou. La Russie, qui dispute à l’Arabie saoudite son statut de premier producteur mondial de pétrole, est devenue ces dernières années un partenaire incontournable pour influer sur les prix du brut. Si les pays producteurs du Golfe profitent certainement d’un baril qui a atteint hier les 115 dollars, c’est aussi une carte dont dispose le royaume wahhabite contre Joe Biden. Depuis le début de son mandat, ce dernier refuse de s’adresser directement au prince héritier, qu’il accuse d’avoir approuvé l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi dans le consulat de son pays à Istanbul en 2018. Dans un article du magazine The Atlantic paru hier, Mohammad ben Salmane affirme « tout simplement se ficher » que le président américain puisse mal le comprendre, laissant entendre que s’aliéner Riyad n’est pas dans l’intérêt américain.

Le Koweït, victime d’une invasion de l’Irak en 1990, avait été le seul pays du Golfe à dénoncer explicitement Moscou, dès le début de l’offensive.

Ce vote sonne comme un retour au bercail. Alors que la plupart des pays arabes avaient jusque-là évité de prendre position par rapport à la guerre en Ukraine, la majorité a voté mercredi soir en faveur de la résolution onusienne exigeant le retrait immédiat et inconditionnel des forces russes, à l’exception notable de la Syrie. Alliés stratégiques de Washington, les Émirats arabes...

commentaires (1)

ils ont de la chance de n'avpoir pas - encore- goute a une invasion etrangere de leurs etats. pt't qu'ils avient oublie la menace de celle des mollahs neo persans ?

Gaby SIOUFI

10 h 58, le 04 mars 2022

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Commentaires (1)

  • ils ont de la chance de n'avpoir pas - encore- goute a une invasion etrangere de leurs etats. pt't qu'ils avient oublie la menace de celle des mollahs neo persans ?

    Gaby SIOUFI

    10 h 58, le 04 mars 2022

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