Des transporteurs routiers ont manifesté mercredi matin à travers le territoire libanais afin de protester contre la détérioration de leurs conditions de vie et de travail au vu de l'effondrement du pays et de l'absence de réformes pour ce secteur. Initialement prévu pour trois jours, ce mouvement qui devait se poursuivre jeudi a été annulé en fin de journée.
Le président du syndicat des transporteurs routiers, Bassam Tleiss, avait appelé à une grève générale les mercredi 2, jeudi 3 et vendredi 4 février afin de rappeler à l’ordre le gouvernement qui "ne respecte pas l’accord du 26 octobre 2021" portant sur la réallocation d’un prêt de de 295 millions de dollars de la Banque mondiale, approuvé en 2018, au bénéfice du secteur des transports publics, dans un contexte d'effondrement économique.
"Chance au gouvernement"
Mais mercredi après-midi, M. Tleiss, réputé proche du président du Parlement, Nabih Berry, a annoncé l'annulation de la grève de jeudi, affirmant vouloir donner une chance aux autorités qui, selon lui, ont évoqué le dossier durant le Conseil des ministres qui s'est tenu en journée. "Nous avons été informés que nos demandes ont été discutées pendant le Conseil des ministres" qui s'est tenu mercredi en journée, a affirmé le président du syndicat des transporteurs routiers, Bassam Tleiss, au cours d'une conférence de presse. Il s'est déclaré prêt à "donner une chance d'une journée au gouvernement" et a ainsi demandé aux chauffeurs d'annuler la manifestation de demain. La Fédération des syndicats du secteur tiendra une conférence de presse jeudi à 11h afin de décider des prochaines étapes.
En matinée, à Beyrouth, la circulation a été bloquée au niveau de l'avenue Béchara el-Khoury, à Hamra, en face du siège de la Banque du Liban, au croisement de Borj el-Ghazal et sur l'autoroute du quartier dit de la Quarantaine. Dans la banlieue sud de la capitale, le carrefour dit des "Kafaat" a été bloqué, tout comme celui de l'ambassade du Koweït.
Dans le Kesrouan, des protestataires ont bloqué l'autoroute de Nahr el-Kalb dans les deux sens de la circulation, ce qui a provoqué des embouteillages. Dans le Mont-Liban, l'autoroute de Dora ainsi que l'intersection de Mkallès ont été bloquées.
"Soutien pour pouvoir continuer"
A Saïda, des chauffeurs de taxis, de bus et de camions se sont rassemblés à l'entrée nord de la ville et ont garé leurs véhicules aux bords de la route sans bloquer la circulation, alors que l'armée libanaise était déployée sur les lieux. Les écoles publiques ont fermé leurs portes dans la région conformément à la décision du ministre de l'Education. Des transporteurs routiers se sont également regroupés aux entrées des villes de Tyr et de Nabatiyé.
Dans la grande ville du Sud, Ibrahim el-Boukhari, membre du syndicat des chauffeurs de taxis, a plaidé en faveur de meilleurs soutiens aux transporteurs routiers. "Le secteur des transports a besoin de soutien pour pouvoir continuer", a-t-il affirmé. Il a également déploré le fait que les dépenses des chauffeurs sont en dollars pour réparer leurs véhicules alors qu'ils sont payés en livres libanaises, dans un pays où la monnaie nationale a perdu plus de 90% de sa valeur en plus de ans.
A Tripoli, des chauffeurs ont bloqué, dès 5h du matin, la route menant de Tripoli à Beyrouth en face de l'hôtel Palma, rapporte notre correspondant dans la région Michel Hallak. La circulation a également été interrompue sur l'autoroute de Tripoli au niveau de la localité de Douar Salam et de l'autoroute du Koura. Le chef du syndicat général des chauffeurs du Nord, Chadi el-Sayyed, a regretté que "tous les citoyens se trouvent dans la même situation" dans un pays en pleine crise. Des ouvriers du port de Tripoli (Nord) ont, en solidarité avec le secteur des transports, tenu un sit-in devant le siège de leur syndicat. Ils ont notamment dénoncé la suppression des subventions qui étaient accordées, jusqu'à il y a quelques mois, sur les produits de nécessité comme le carburant et les médicaments.
Le secteur du transport routier avait déjà observé le 13 janvier dernier une journée de grève pour faire pression sur le gouvernement, mais sans résultat.
La Banque mondiale estime que le PIB par habitant au Liban a chuté de 40% entre 2018 et 2020, un effondrement d'une brutalité que l'on n'observe habituellement que "lors des conflits ou des guerres", selon l'institution, pour qui la crise libanaise pourrait être l'une des trois plus importantes depuis 1850.
Akid,bien dit,Michel Trad.
21 h 56, le 02 février 2022