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Économie - Monnaie

Vers une modification quotidienne des tarifs des carburants

Le prix du pain a été abaissé hier soir pour répercuter les récentes fluctuations de la livre sur son coût de fabrication.

Vers une modification quotidienne des tarifs des carburants

Au Liban, les prix des carburants ont été amendés trois fois en deux jours. Photo « L’OLJ »

Dans un Liban en crise depuis 2019, les fluctuations du taux dollar/livre sur le marché des changes ainsi que les ajustements des prix qu’elles entraînent deviennent de plus en plus pénibles à suivre. Trois jours après avoir dépassé un nouveau record, à 33 000 livres pour un dollar, le taux appliqué par les bureaux de change légaux comme ceux du marché noir a nettement décroché hier, passant sous la barre des 28 000, pour ensuite camper entre 27 000 et 29 000 livres, selon les chiffres relayés par le site lirarate.org.

C’est la journée qu’a choisie le ministère de l’Énergie et de l’Eau pour commencer à mettre en œuvre une demande formulée par les distributeurs de carburants depuis un certain temps, à savoir modifier quotidiennement les tarifs en livres des carburants, contre deux fois par semaine actuellement. Si chacune des décisions du ministère amendant ces tarifs précise que les modifications sont applicables dès leur publication, une source au ministère a précisé que la seconde grille tarifaire publiée dans la journée – la troisième depuis jeudi – ne serait pas mise en œuvre avant aujourd’hui.

Pas de changement des prix en dollars
L’information a été confirmée à L’Orient-Le Jour par le porte-parole des propriétaires de station-service Georges Brax et par le président du syndicat des distributeurs de bonbonnes de gaz Jean Hatem. « Il est tout de même très embêtant que le ministère n’ait pas modifié la date. Il y a un risque que des clients se fâchent en pensant que nous essayons de les voler », a objecté ce dernier.

Pour mémoire

Soubresauts de la livre, flambée des carburants, menaces sur le pain : journée banale dans un Liban infernal

La source au ministère a pour sa part ajouté que celui-ci comptait suivre la situation pendant un moment, avant de décider de changer définitivement le rythme de publication des tarifs. Enfin, il n’est pas clair pour le moment si un changement de la méthodologie utilisée pour suivre les cours mondiaux des carburants concernés en dollars est aussi à attendre. Pour l’heure, le ministère se base sur des indices moyens et n’amende les prix en dollars de l’essence, du mazout et du gaz qu’une fois par semaine. Ces derniers sont toujours fixés pour cette fin de semaine, par kilolitre, à respectivement près de 600 et 615 dollars le kilolitre (sans compter le supplément de transport de 325 000 livres par kilolitre) et 1 037 dollars la tonne (selon les données rapportées par Jean Hatem, sans inclure les frais de douane). La bonne surprise – relative – pour le consommateur final, c’est que les prix en livres ont en revanche enregistré deux baisses successives en une journée (même si la seconde baisse doit être actée aujourd’hui). Acheter 20 litres d’essence 95 octane coûte désormais 369 200 livres, soit 8 600 livres de moins que jeudi (-2,3 % depuis jeudi). La facture pour la même quantité de super atteint 381 800 (-8 800, ou -2,3 %, également depuis jeudi). Passé au-dessus de la barre des 400 000 livres jeudi, le prix en livres des 20 litres de diesel vendus par les stations aux véhicules qui en consomment affiche désormais 362 800 livres (soit -47 200, ou -11,5 %). Enfin, la bonbonne standard de gaz d’une dizaine de kg doit être vendue 319 600 livres ce week-end (-39 900, ou -11,1 %). Mais il reste à savoir si les stations-service appliqueront ces tarifs, ce qui ne semble pas gagné. Dans un communiqué publié hier soir, le syndicat a en effet rejeté la tarification, lui reprochant notamment de ne pas tenir compte de leurs coûts de remplacement. Les importations d’essence bénéficient toujours du mécanisme de subvention de la Banque du Liban (BDL), dont la voilure a été sévèrement réduite avec le temps.

Retirer des livres du marché

La BDL a en effet accepté – jusqu’à vendredi – de fournir 85 % des montants facturés aux importateurs par les fournisseurs étrangers à un taux moins élevé que celui du marché. S’il s’agit généralement de celui fixé la veille par la BDL via sa plateforme Sayrafa, le taux relayé hier par Georges Brax était de 24 600 livres pour un dollar, soit le taux de Sayrafa de lundi soir. Ce dernier est 100 livres moins élevé que celui de 24 700 livres enregistré mercredi soir et qui n’a pas été mis à jour jeudi, les banques étant fermées. Les 15 % restants des factures doivent être fournies en dollars par les importateurs soit en les déboursant directement, soit en les achetant sur le marché des changes à un taux moyen que le ministère a évalué à 28 336 livres (contre 31 237 hier matin et 32 187 jeudi).

En début de soirée, le ministère de l’Économie et du Commerce a emboîté le pas à celui de l’Énergie en amendant les prix du pain arabe. Le petit paquet de 350 grammes se vend désormais en boulangerie à 5 500 livres (contre 6 000 les 345 g lors de la dernière modification mercredi). Le paquet moyen a désormais un poids de 830 g à 9 000 livres (contre 835 à 10 000). Enfin, le grand paquet de 1 075 g se vend désormais à 11 000 livres (contre 1 050 à 12 000 ). Les revendeurs peuvent généralement appliquer des prix légèrement plus élevés.

Ces baisses ainsi que le regain relatif de forme de la monnaie nationale face au dollar surviennent au lendemain d’une journée marquée par la mobilisation des chauffeurs routiers pour protester contre les conséquences de la volatilité de la monnaie et les ajustements par le ministère de l’Énergie des prix des carburants qui en résultent. Relativement timide, le mouvement avait tout de même paralysé une partie de l’économie (livraisons de carburants, d’eau potable, écoles ou encore banques). Le rassemblement des propriétaires de générateurs privés au Liban, dirigé par Abdo Saadé, avait lui aussi donné de la voix pour manifester son mécontentement, menaçant de plonger le pays dans le noir « d’ici à un ou deux jours ». Une prise de position qui n’a pas fait l’unanimité vu que plus tard au cours de la même journée, un collectif rassemblant des exploitants de certaines localités de Baabda (Aramoun, Bchamoun, Khaldé ou encore Sahra Choueifate) s’est ouvertement désolidarisé des menaces de Abdo Saadé tout en appelant les autorités à intervenir pour régler la situation.

Les facteurs du léger rebond de la livre sont, eux, complètement opaques, bien qu’ils semblent liés au fait que la BDL a récemment autorisé les banques à lui acheter plus de dollars au taux de Sayrafa pour honorer les demandes des clients, un mécanisme lié à l’application de la circulaire n° 161. Publiée en décembre et devant en principe s’appliquer jusqu’à fin janvier, elle permet aux clients victimes des restrictions mises en place par les banques depuis le début de la crise de convertir et retirer en dollars une partie de leurs fonds en livres, le tout au taux de Sayrafa de la veille. Dans un entretien à l’agence Reuters hier, le gouverneur de la BDL Riad Salamé a expliqué que ces mesures visaient à réduire la quantité de livres en circulation sur le marché. « L’impact de ces mesures dépendra de la quantité de dollars que la BDL, dont les réserves de devises sont au plus bas, pourra injecter sur le marché », a analysé une source financière.

Dans un Liban en crise depuis 2019, les fluctuations du taux dollar/livre sur le marché des changes ainsi que les ajustements des prix qu’elles entraînent deviennent de plus en plus pénibles à suivre. Trois jours après avoir dépassé un nouveau record, à 33 000 livres pour un dollar, le taux appliqué par les bureaux de change légaux comme ceux du marché noir a nettement...

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