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Nos Lecteurs ont la Parole

Allumer les étoiles

Comme des lumières qui s’éteignent par manque d’électricité et comme ceux qui s’en vont une fois que les lumières du sapin sont rangées. Comme les yeux qui se ferment pour oublier qu’ils sont en train de souffrir et ceux qui se ferment pour ne plus se rouvrir. Comme les cœurs qui se déchirent et comme les cœurs qui ne savent plus s’ouvrir pour laisser entrer l’amour. Comme tous ces rêves qui se meurent brûlés lorsqu’ils flirtent avec la réalité, et dont le froid et l’indifférence balaient les restes cendrés. Comme tout cela, il n’y a plus d’étoiles dans le ciel ce soir, il n’y a plus de lumières pour éclairer le vide et le noir.

Et petit à petit, ce sont toutes les étoiles de la ville qui s’éteignent. Tous les petits commerçants qui avouent leur défaite et ferment. Toutes les boîtes dans lesquelles danser aidaient à oublier le jour après la nuit. Et toutes les écoles qui cessent d’enseigner faute d’effectifs et de moyens, et qui s’éteignent et éteignent avec elles tous ces jeunes esprits à qui il faudrait apprendre à penser et non pas à partir. Et toutes nos retrouvailles sont une joie provisoire qui nous déborde dans l’âme, et tous nos au revoir affament nos cœurs et entachent nos rapports de jalousie, car le ciel de ceux qui nous quittent est, quant à lui, toujours rempli alors qu’ici il n’y a plus d’étoiles ce soir, et plus de lumières pour éclairer le vide et le noir.

Le pire reste encore que ces étoiles se meurent et s’éteignent sans cris ni révolte, dans le silence pesant des regrets. Comme si nous nous étions révoltés dans une autre vie, dans une autre réalité. C’est le silence qui vient après le vacarme des chants de la révolution et des marches pour la réforme et pour notre libération. C’est le silence qui étouffe et qui ne laisse aucune lueur d’espoir et d’esprit résister.

Mais qu’est-ce que le silence sinon la mort lente et assurée de demain, de celui de nos enfants et de notre identité citoyenne ? Qu’est-il à part le rappel noir d’une victoire de l’obscurantisme sur toutes les valeurs de la république et sur nos libertés individuelles ? Qu’est-il ce silence à part l’absence de musique, l’absence de révolte ? Qu’est-il ce silence à part lâcheté, fatigue et perte d’espoir ?

Je dis que si nous sommes voués à partir, n’acceptons pas de partir en silence. C’est ce silence qui éteint les lumières et vide le ciel de ses étoiles, c’est ce silence qui effacera l’histoire et qui les laissera la réécrire comme ils l’entendent.

Et je dis qu’il n’est de révolte d’un système sans profonde révolte individuelle. Il n’existe pas de résistance « impatiente », jamais de changement durable sans attente, et jamais de guerre gagnée sans la douleur de quelques batailles perdues. Ce sera dans les urnes, puis dans les mains levées au Parlement, puis dans les tribunaux de la justice que se fera le changement. C’est la révolte des esprits qui sera définitive et qui saura rallumer les étoiles dans le ciel.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Comme des lumières qui s’éteignent par manque d’électricité et comme ceux qui s’en vont une fois que les lumières du sapin sont rangées. Comme les yeux qui se ferment pour oublier qu’ils sont en train de souffrir et ceux qui se ferment pour ne plus se rouvrir. Comme les cœurs qui se déchirent et comme les cœurs qui ne savent plus s’ouvrir pour laisser entrer l’amour. Comme...

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