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Monde - Analyse

L’Europe recherche nouveau leader, désespérément

L’Europe recherche nouveau leader, désespérément

Emmanuel Macron et Angela Merkel le 18 novembre à Berlin. Photo d’archives AFP

Emmanuel Macron, Mario Draghi ou Olaf Scholz ? Qui pour remplacer Angela Merkel comme locomotive de l’Europe après le vide laissé par le départ de la chancelière au terme de 16 années au pouvoir ?

La compétition pour le leadership est ouverte en vue de 2022 mais, selon des experts, aucun d’entre eux ne risque d’en avoir seul la capacité, tant les problèmes de l’UE sont profonds, du recul de l’État de droit au risque de marginalisation géopolitique.

Angela Merkel, remplacée début décembre par le social-démocrate Olaf Scholz à la tête du gouvernement allemand, a marqué l’Europe de son empreinte en aidant à maintenir sa cohésion dans une longue série de crises.

Selon une récente enquête du think tank European Council on Foreign Relations, les citoyens européens, s’ils le pouvaient, voteraient à 41 % pour Angela Merkel comme présidente de l’Europe, contre seulement 14 % Emmanuel Macron.

Opportunité pour Macron

Le chef de l’État français se voit néanmoins offrir un tremplin avec la présidence semestrielle de l’UE que Paris assurera à partir de janvier. Il a affiché ses ambitions en disant vouloir œuvrer pour « une Europe puissante dans le monde, pleinement souveraine, libre de ses choix et maîtresse de son destin ».

La départ de Mme Merkel « pourrait permettre à la vision française » de l’Europe de s’imposer, confirme Alexandre Robinet-Borgomano, dans une note d’analyse publiée par l’Institut Montaigne.

Emmanuel Macron peut prendre les rênes en main, « si après avoir été réélu président de la République française, il construit avec le chancelier allemand le leadership qui fait cruellement défaut à l’Europe, dont il peut être, à la fois, la figure de la jeunesse et celle de l’expérience », acquiesce l’ancien Premier ministre français Jean-Pierre Raffarin, mardi dans le journal L’Opinion. « L’atout politique et international d’Emmanuel Macron, c’est d’être à la fois le plus jeune et le plus expérimenté », ajoute-t-il.

Le traité franco-italien que M. Macron vient de signer avec Mario Draghi n’est dans ce contexte pas passé inaperçu, au moment où se nouent de nouvelles alliances dans l’Europe post-Brexit. Dans la foulée, les deux hommes ont lancé un appel commun à assouplir les règles budgétaires européennes. Une initiative de nature à déplaire aux pays du nord de l’Europe, plus orthodoxes sur les finances publiques. D’autant que le chef du gouvernement italien, surnommé « Super Mario » après son passage à la tête de la Banque centrale européenne, est lui aussi considéré comme un candidat potentiel au leadership européen.

« Mario Draghi pourrait combler le vide laissé par Angela Merkel en tant que bâtisseur de consensus » dans l’UE « et contrairement à l’approche de Merkel, il pourrait injecter un nouveau dynamisme en matière d’intégration européenne dans les domaine économique ou de défense », indique Nicoletta Pirozzi, du think tank Istituto Affari Internazionali de Rome. Néanmoins, M. Draghi pourrait se rabattre en 2022 sur le poste de chef de l’État italien, fonction aux prérogatives limitées.

Le président français, lui, va affronter sur le plan intérieur une année 2022 difficile avec le scrutin présidentiel au printemps à l’issue très incertaine et où l’UE ne joue jusqu’ici qu’un rôle mineur. Ce contexte n’est pas propice aux grands chantiers européens.

Quid d’Olaf Scholz ? En Allemagne, longtemps surnommée la « grande Suisse » pour sa propension à se focaliser sur sa prospérité économique sans trop s’engager sur les grandes questions internationales, les lignes bougent. « Nous voulons accroître la souveraineté stratégique de l’Union européenne », souligne ainsi le programme du nouveau gouvernement à Berlin. En outre, Olaf Scholz aura pour lui d’assurer à partir de janvier la présidence du G7. Mais pour assumer le leadership européen, le nouveau chancelier, qui se présente en héritier de Mme Merkel, devra se faire violence. Il va lui falloir rompre avec le « merkélisme », cette diplomatie de recherche permanente du compromis, d’attentisme dans les crises et de priorité donnée aux intérêts économiques, y compris avec les régimes autoritaires comme la Russie et la Chine. Car ce système atteint ses limites. « Il ne devrait pas réussir à survivre à Merkel » car il ne permet pas de « régler bien des défis de l’Europe, tels que la pandémie, le changement climatique et la compétition géopolitique internationale », jugent Piotr Buras et Jana Puglierin dans leur analyse de l’ECFR (Conseil européen en relations étrangères).

Europe sans tête ?

Emmanuel Macron, partisan de solutions plus vigoureuses, est-il dans ce contexte le mieux placé ? « Même si un leadership de Macron reste une option (...) elle est peu probable » en raison des difficultés qu’il aura à forger « les alliances » nécessaires, avertit le professeur Sebastian Reiche. Paris reste souvent soupçonné de vouloir utiliser l’Europe pour défendre surtout ses intérêts.

Helen Thompson se montre encore plus pessimiste. « Fragilisée par la rivalité entre les États-Unis et la Chine, profondément divisée sur le plan interne (...) l’Union européenne ne peut pas être dirigée à l’heure actuelle, personne ne va devenir le nouveau Mme Merkel », juge la professeure de Cambridge.

Yacine LE FORESTIER/AFP

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