Vous semblez avoir une actualité foisonnante en ce moment avec la sortie quasi simultanée de votre nouvel album First Noël et de votre livre sur l’improvisation. Parlez-nous d’abord de votre CD. Est-ce votre récente paternité qui est à l’origine de votre envie de revisiter à la sauce jazzy les chants de Noël de votre enfance ?
Cet album est un mélange entre musique classique, chants de Noël, musiques jazz, chants orientaux, et un peu de pop. Le tout arrangé à ma façon avec trompette, piano, guitare et huit voix magnifiques de femmes. L’album a été enregistré en grande partie à l’église Saint-Julien-le-Pauvre à Paris. Et la raison pour laquelle j’ai eu envie d’enregistrer cet album est la naissance de mon fils Nael. J’avais envie de lui offrir un premier Noël magique. Nous vivons dans un monde terriblement violent, et il n’y a rien d’autre à offrir à nos enfants qu’un peu de douceur pour leur donner envie de vivre dans ce monde de fous.
En écoutant des extraits sur Spotify, on est justement ébloui par la formidable douceur du son, cet apaisement magique, qui émane de votre trompette. Est-ce aussi pour briser la réputation d’antidouceur de cet instrument que vous avez eu envie de « trompettiser » ces mélodies ?
Non, pas vraiment. J’ai toujours aimé cet aspect-là de cet instrument. La trompette est un instrument méconnu en Orient, mais extrêmement à la mode aux États-Unis, en Amérique du Sud ou en Europe. Cela provient, en grande partie, du fait qu’on n’a jamais eu de vrais bons professeurs, sauf depuis une vingtaine d’années. Dans la tête des gens, la trompette, c’est un instrument fort, qui casse les oreilles, et qu’on joue pour les mariages et les enterrements. Mais c’est faux.
Le lancement de cet album s’accompagne-t-il d’une tournée de concerts en cette période des fêtes ?
Nous avons fait plusieurs concerts de Noël, mais avec cet album, je pense qu’il y en aura chaque année !
Et dans le même registre musical : à quand une collaboration sur un album Ibrahim Maalouf-Hiba Tawaji ?
Nous avons déjà collaboré ! Avec Matthieu Chédid lors de la création à l’Olympia de la chanson Mappemonde, à l’occasion du concert de levée de fonds « Unis pour le Liban » sur France 2 le 1er octobre 2020 pour venir en aide aux victimes de l’explosion du 4 août. Nous collaborons régulièrement, notamment sur son prochain album.
De jazzman, on vous découvre aussi auteur. Vous venez de publier « Petite philosophie de l’improvisation » aux éditions Équateurs/Mister Ibé. Racontez-nous comment est né l’idée de cet ouvrage ? Y a-t-il un événement qui a provoqué en vous le déclic de son écriture ? Ou était-ce un sujet auquel vous pensiez depuis longtemps ?
J’ai commencé à écrire ce livre il y a pratiquement sept ans. Mais les tournées, la famille et les albums m’ont empêché d’avancer à la bonne vitesse. Et puis j’ai rencontré une éditrice extraordinaire, Jeanne Pham Tran, qui m’a encouragé et aidé à le terminer. Elle me posait des questions, coupait dans mon texte, restructurait un peu tout. Et c’est ainsi que finalement j’ai pu le terminer.
À qui pensez-vous vous adresser à travers ce livre ?
À tout le monde. Ce sont des réflexions qui s’adressent à toute personne, musicienne ou pas, qui connaît mon travail ou non, mais qui simplement souhaite essayer de comprendre pourquoi j’insiste autant pour réintégrer cette discipline qui semble si anodine dans l’enseignement.
Justement, vous qui êtes passé maître dans l’improvisation musicale, quelle part allouez-vous à l’improvisation dans votre vie quotidienne, personnelle et familiale ?
L’improvisation est partout dans la vie. Pas uniquement dans la mienne, mais chez tout le monde. Et c’est dans les pays qui traversent des crises importantes – comme c’est le cas du Liban aujourd’hui qui traverse sa crise la plus lourde – qu’on se rend compte à quel point la population doit improviser chaque jour pour réussir à trouver des solutions pour nourrir ses enfants, éduquer ses jeunes, réparer sa maison et sa voiture, se soigner, etc. En ce sens, les Libanais savent particulièrement improviser…
S’il ne fallait retenir qu’une seule phrase de votre « Petite philosophie de l’improvisation », ce serait laquelle ?
Seul on va plus vite, à plusieurs on va plus loin. Nous avons besoin de réapprendre à trouver nos dénominateurs communs pour construire une société harmonieuse.
commentaires (3)
Bravo et bon courage à vous 2. Vous êtes la fierté du Liban. Ca redonne un peu, un visage moderne du pays, alors que certains veulent l'enfoncer et en faire un gaza bis quémendant et vivant aux crochets de la communauté internationale.
LE FRANCOPHONE
17 h 26, le 28 décembre 2021