Un court texte en hommage à ceux qui quittent ce monde dans la dignité, le dernier rêve...
Alphonse, 92 ans, souffre depuis des années de ses pertes de mémoire. Depuis une semaine, son organisme exténué lutte contre une bronchite majeure. Il fait partie de ces vieux seniors libanais qui, faute de moyens essentiels, prient de ne plus être davantage humiliés. Sur un lit d’hôpital et sous un respirateur, il déplie son coin préféré, le paradis des moments inoubliables. Ils réaniment les battements de son cœur. Ainsi, il rencontre un espace d’images animées où, à dix ans, la tête entre les mains, ses yeux d’enfant pétillaient à la vue du bois en flammes dans la cheminée. Faute de mieux, il griffonne sur un bout de papier quelques mots à son infirmière :
« Saint Nicolas me dit : ‘‘Cher ami, je connais ton profond souhait. D’un geste, ton message ira au ciel à travers la nuit enneigée.’’ » Simon, le fils, vient d’arriver. Il constate à travers le regard de son père comme un tracé de flocons de neige. D’un coup, Alphonse verse des larmes alors qu’il regarde un bus qui arrive. Les passagers sont les anges du ciel. Eux lui offrent ce qu’il aime le plus, les plats délicieux aux formes ovales, aux arômes et saveurs cuisinés, la soupe à l’oignon, le gigot d’agneau, les profiteroles, le vin et le champagne à gogo. Minuit sonné, on célèbre la naissance de Jésus ! Grand-père baisse les paupières et s’en va sur un traîneau céleste !
Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.
commentaires (0)
Commenter