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Politique - Enquête sur l'explosion au port de Beyrouth

Raï dénonce "ceux qui bloquent le Conseil des ministres", le camp du Hezbollah pointe du doigt le juge Bitar

"Nous ne patienterons pas longtemps face au blocage du pays", prévient le mufti jaafarite, proche du Hezbollah.

Raï dénonce

Des partisans du Hezbollah, d'Amal et des Marada, manifestant le 14 octobre 2021 devant le palais de Justice de Beyrouth, contre le juge Tarek Bitar, en charge de l'enquête sur l'explosion du 4 août 2020 au port. Photo REUTERS/Mohamed Azakir

L'enquête sur l'explosion meurtrière au port de Beyrouth continue de diviser profondément le Liban, en grave crise politique, et aucun signe d'un retour aux réunions du Conseil des ministres, suspendues depuis deux mois, ne semble attendu. Dimanche, des responsables religieux opposés au Hezbollah l'ont implicitement accusé de cette paralysie, alors que le camp du parti chiite a, une nouvelle fois, pointé du doigt le juge Tarek Bitar, en charge de l'investigation sur le drame du 4 août 2020.

Lors de son homélie dominicale, le patriarche maronite, Béchara Raï, a appelé "les responsables, surtout ceux qui utilisent leur pouvoir politique pour entraver les réunions du Conseil des ministres et la poursuite de l'enquête judiciaire sur la catastrophe du port, à écouter la voix de Dieu, afin que l'Etat reprenne sa marche", dans une critique claire du Hezbollah et de ses alliés. 

Test

Le gouvernement de Nagib Mikati, formé le 10 septembre dernier, ne s'est plus réuni depuis la mi-octobre, en raison de conflits politiques internes au sujet de l'enquête sur les explosions meurtrières du port. Le tandem chiite Amal-Hezbollah boycotte, en effet, le gouvernement jusqu'à ce que le juge Bitar, en charge de l'instruction, soit dessaisi du dossier. Les dirigeants chiites, ainsi que d'autres responsables politiques poursuivis, notamment l'ancien Premier ministre Hassane Diab et l'ex-ministre de l'Intérieur Nouhad Machnouk, demandent que la Haute Cour chargée de juger les présidents et les ministres soit mise en place, et estiment que le magistrat est incompétent à ce niveau.

M. Bitar, qui a repris son enquête après des semaines de suspension à cause de recours intentés contre lui par les dirigeants poursuivis, a demandé vendredi l'arrestation immédiate du député et ancien ministre Ali Hassan Khalil (Amal), qui refuse d'être interrogé. Pointées du doigt pour négligence criminelle, les autorités sont accusées par les familles des plus de 200 victimes et des ONG d'ingérence politique pour torpiller l'enquête et éviter des inculpations. L'énorme déflagration d'août 2020 a été déclenchée par un incendie dans un entrepôt qui abritait des tonnes de nitrate d'ammonium stockées "sans mesures de précaution", de l'aveu même des autorités.

"Le pays ne peut pas fonctionner sans un pouvoir exécutif qui décide, effectue des réformes, exécute les décisions internationales et contrôle le travail des ministres. Il est inconcevable d'accepter un gouvernement qui se sabote. Ce blocage est-il un test pour anticiper les réactions en cas de blocage des élections législatives et présidentielle ? prévues en 2022, s'est demandé le patriarche maronite. 

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Les législatives, prévues initialement en mai 2022 mais finalement fixées au 27 mars prochain, sont perçues par nombre de Libanais comme un premier tremplin vers le changement auxquels ils aspirent. Le nouveau Parlement doit également élire en octobre prochain un successeur au président de la République, Michel Aoun. Mais dans un pays en grave crise politique et coutumier des blocages et des reports d'élections, de sérieuses craintes sont exprimées quant à un torpillage de ces deux échéances électorales. Toutefois, le Hezbollah a affirmé dimanche, dans une tentative d'apaiser les craintes, qu'il était en faveur des législatives dans les délais prévus par la Constitution.

"Nous refusons catégoriquement le blocage du Conseil des ministres en violation de la Constitution, par la force et dans une volonté claire d'entrave, pour des objectifs suspects et non nationaux, contraires aux intérêt de l'Etat et de la population", a prévenu le cardinal Raï.

Le métropolite grec-orthodoxe de Beyrouth, Elias Audi, lui aussi fervent critique du Hezbollah, a estimé qu'il est "désormais inacceptable que le gouvernement reste paralysé et soumis à une minorité politique qui se comporte comme si elle constituait la majorité au pouvoir". 

"Nous n'étions pas étonnés de voir les tentatives de cacher la vérité et protéger les criminels, nous sommes habitués à cela", a regretté Mgr Audi, lors d'une messe à la mémoire du journaliste et député Gebran Tuéni, assassiné dans un attentat à la bombe en décembre 2005.

"Pire qu'une guerre planétaire"

A l'opposé, le ministre de la Culture, Mohammad Mortada, affilié au mouvement Amal du président de la Chambre, Nabih Berry, a estimé samedi que la justice "subissait un hold-up de la part de ceux qui affirment agir en vertu de cette justice", ce qui constitue une critique claire du juge Bitar. "Le plus dangereux, c'est que certains médias présentent cela comme une bouée de sauvetage, alors qu'il (le juge Bitar, ndlr) ne poursuit pas les vrais coupables et cherche, lui et ses maîtres, à inciter la sédition (...)", selon le ministre.

Le mufti jaafarite, Ahamd Kabalan, proche du Hezbollah, est allé encore plus loin en lançant des menaces voilées à ses adversaires. Il a d'abord dénoncé "un blocage politique du pays par un juge, alors que le Liban connaît un effondrement financier et social existentiel. Cela est pire qu'une guerre planétaire contre le Liban", a même estimé dimanche le dignitaire chiite. "Malgré cela, ce juge reste soutenu par des forces éphémères. (...) Le pays est actuellement otage des mentalités des ambassades et des forces internationales et régionales qui cherchent à régler des comptes dans ce pays (...). Mais nous ne patienterons pas longtemps face au blocage du pays et l'usure de la population (...)", a mis en garde le cheikh Kabalan.

Le directeur de la Sûreté générale, Abbas Ibrahim, qui figure parmi les responsables poursuivis dans le cadre de l'enquête, a estimé, pour sa part, que "le gouvernement ne restera pas paralysé par le maintien ou non du juge d'instruction en place". "Une solution à travers la loi peut être trouvée", a-t-il estimé dans un entretien au journal Al-Charq al-Qatari.

"Le Parlement est attendu pour trancher ce débat. Voilà où réside la solution, en respectant la séparation des pouvoirs, car le gouvernement n'est pas compétent pour se mêler du travail de la Justice. Mais le Parlement, en tant que pouvoir législatif, peut déterminer la compétence de l'organe chargé de juger les présidents, les ministres et les députés, qu'il s'agisse de la Haute cour chargée de juger les présidents, ou du juge auprès de la Cour de justice", a estimé le général Ibrahim, proche du Hezbollah.

L'enquête sur l'explosion meurtrière au port de Beyrouth continue de diviser profondément le Liban, en grave crise politique, et aucun signe d'un retour aux réunions du Conseil des ministres, suspendues depuis deux mois, ne semble attendu. Dimanche, des responsables religieux opposés au Hezbollah l'ont implicitement accusé de cette paralysie, alors que le camp du parti chiite a,...

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Bien dit, Mme. Zayyat!

Jean-Paul Khayat

19 h 03, le 13 décembre 2021

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Commentaires (10)

  • Bien dit, Mme. Zayyat!

    Jean-Paul Khayat

    19 h 03, le 13 décembre 2021

  • Leur pancartes brandies avec fierté en disent long sur l’idée qu’ils se font de la justice. Ils préfèrent leurs justiciers d’un autre âge qui punissent sans autre forme de procès d’une exécution rapide pour ne pas être confrontés à leurs contradictions se faisant passer pour des vertueux alors qu’ils ne sont que de véritables assassins. Il n’y a pas un pour racheter l’autre ça commence par les discours de leur leader souterrain pour finir avec des soit disant dignitaires qui n’ont rien de digne en eux ni dans leur comportement. L’OLJ, vous pouvez censurer, il fallait que ça sorte. Voilà c’est dit.

    Sissi zayyat

    15 h 07, le 13 décembre 2021

  • Amal hezbollah and theirs acolytes are a lost cause they are hopless they sap wreak havoc ans sabotage the state and accuse others of their CRIMES. They are mastrers of spin.

    EL KHALIL ABDALLAH

    10 h 30, le 13 décembre 2021

  • Kabalan dénonce "un blocage politique du pays par un juge"! Où a-t-til vu ça? Est-ce que Bitar s'est jamais mêlé du gouvernement? Est-ce lui qui a donné l'ordre aux ministres chiites de faire la grève? On a l'impression de revenir dix ans en arrière lorsque les ministres se mêlaient, cette fois, de l'enquête sur l'assassinat de Hariri.

    Yves Prevost

    07 h 36, le 13 décembre 2021

  • Rai et Audi defendent le Liban alors que les “ responsables” , chef de l’etat et premier ministre plient l’echine devant la milice illegale. Les hordes des chiaa chiaa ont modifie le Liban de nos ancetres. Des ennemis , teleguides et finances par un Iran retrograde et sectaire. Face a cette bande de renegats le juge Bitar redonne au pays l’espoir perdu.

    Goraieb Nada

    07 h 10, le 13 décembre 2021

  • Pourquoi Amal et Hezbollah ont peur du juge Bitar ? Parce que ils ne sont pas clean

    Eleni Caridopoulou

    19 h 18, le 12 décembre 2021

  • Ne seriait-il pas plus exact de se référer aux responsables politiques "poursuivis" mais plutôt aux responsables politiques "coupables" ...?

    Remy Martin

    17 h 05, le 12 décembre 2021

  • RAI, N,INDIQUE PAS SIMPLEMENT. NOMME. LA CLARTE ET LA VERITE DOIVENT ETRE DITES. LA TRINITE DIABOLIQUE DU MAL NE CONNAIT PAS DE DIEU. C,EST UNE HERESIE QUE D,USER DU NOM DE DIEU POUR DES ACTES DIABOLIQUES.

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 54, le 12 décembre 2021

  • CEUX QUI ONT BLOQUE POUR DEUX DECENIES ET BLOQUENT TOUJOURS TOUS LES GOUVERNEMENTS ET LES INSTITUTIONS DU PAYS OSENT ESSAYER DE CHARGER LE BLAME SUR LES DOS D,AUTRUI. L,OBSCURANTISME DANS TOUS SES ETATS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    16 h 41, le 12 décembre 2021

  • C’est le pays qui ne patientera plus face à la milice traître !

    LeRougeEtLeNoir

    16 h 39, le 12 décembre 2021

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