Rechercher
Rechercher

Moyen-Orient - Éclairage

Pour MBS, la fin de la traversée du désert ?

Après trois ans d’isolement sur la scène internationale, le prince héritier saoudien a reçu la visite d’Emmanuel Macron samedi dernier, rompant ainsi avec le statut de paria qui le suivait depuis l’assassinat de Jamal Khashoggi en octobre 2018.

Pour MBS, la fin de la traversée du désert ?

Le prince héritier saoudien Mohammad ben Salmane recevant le président français Emmanuel Macron à Djeddah, en Arabie saoudite, le 4 décembre 2021. Bandar al-Jaloud/Saudi Royal Palace/AFP

G20 de 2018 à Buenos Aires : le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammad ben Salmane (MBS), semble mal à l’aise parmi les autres dirigeants du groupe des pays les plus riches du monde. Certains l’évitent, le président français lui fait la morale devant les caméras, seul Vladimir Poutine s’enthousiasme en le voyant et le salue chaleureusement d’une tape dans la main restée dans les mémoires. Sur la photo de famille traditionnelle, il est placé à l’extrémité de la deuxième rangée, loin des principaux dirigeants de la planète. Près de deux mois plus tôt, le journaliste saoudien Jamal Khashoggi était brutalement assassiné au consulat du royaume à Istanbul. Des rapports de services de renseignements, notamment la CIA, pointaient du doigt la responsabilité de MBS à travers son approbation. Si l’administration américaine de Donald Trump défendait encore son partenariat stratégique avec cet allié de poids au Moyen-Orient, le début de l’isolement du dauphin saoudien sur la scène internationale était acté. Trois ans plus tard, Emmanuel Macron est le premier chef d’État occidental à rendre visite à MBS depuis l’assassinat de Jamal Khashoggi, marquant ainsi une rupture avec son statut de paria international.

Lire aussi

L’accord Macron-MBS sur le Liban : une brèche dans un rideau de fer

Samedi dernier, le président français a été accueilli au palais royal de Djeddah par une longue poignée de main, scrutée de très près, avec le prince héritier saoudien. De nombreuses photos officielles des deux hommes souriant côte à côte ont cherché à faire oublier les vidéos de la discussion tendue entre les deux dirigeants au sommet du G20 de Buenos Aires. Une occasion attendue du côté du royaume depuis longtemps pour modifier enfin l’image du dauphin saoudien sur la scène internationale, alors que le sommet du G20 sous la présidence de Riyad l’année dernière s’était tenu virtuellement en raison de la pandémie de Covid-19. « Mohammad ben Salmane va se servir de la poignée de main française pour dire que l’assassinat de Jamal Khashoggi a été oublié et que la guerre au Yémen a le soutien de l’Occident », décrypte Bruce Riedel, ex-responsable au sein de la CIA et chercheur à la Brookings Institution.

Une réhabilitation longtemps désirée

Préparant sa réhabilitation, le prince héritier a fait profil bas et a joué le temps long. Il a notamment réussi à dissocier la politique étrangère saoudienne de sa personne, tout en tentant de faire bonne figure sur la scène internationale ces dernières années. Pour des raisons de sécurité interne liées aux attaques répétées de missiles et drones des groupes houthis, et du fait d’une pression internationale accrue, le prince héritier a notamment fait de la sortie du conflit au Yémen une priorité de son action extérieure, alors que le royaume wahhabite y mène une coalition en appui aux forces gouvernementales depuis 2015 contre les rebelles houthis soutenus par Téhéran. Malgré le dialogue direct entamé avec l’Iran par l’intermédiaire de Bagdad pour trouver une sortie de crise à ce dossier, les efforts menés en ce sens ont jusque-là échoué, les combats s’intensifiant autour de la ville de Ma’rib, dernier bastion du gouvernement dans le Nord.

Pour mémoire

La veuve de Khashoggi exhorte les Etats-Unis à exiger des comptes de l'Arabie Saoudite

La réhabilitation du prince héritier par Emmanuel Macron serait donc moins liée aux avancées de l’Arabie saoudite sur les sujets épineux tels que le respect des droits humains ou la guerre au Yémen qu’à « l’espoir que le président avait de régler des dossiers importants avec le concours de l’Arabie saoudite, notamment la crise avec le Liban », affirme Anne Gadel, consultante spécialiste du Moyen-Orient et membre de l’Observatoire Afrique du Nord-Moyen-Orient de la Fondation Jean Jaurès à Paris. Dans ce contexte, le dirigeant français a soutenu que « le dialogue avec l’Arabie saoudite est une nécessité », alors qu’aucune mention n’a été faite des droits de l’homme dans la déclaration conjointe entre la France et l’Arabie saoudite à l’issue de leur rencontre – suscitant de nombreuses critiques du côté des ONG et des activistes. Par cette visite, c’est le prisme de la realpolitik qui a donc prévalu : car autant sur le plan politique qu’économique, Riyad reste un acteur incontournable sur les scènes régionale et internationale. Le souverain wahhabite est le gardien des deux saintes mosquées de La Mecque et Médine, faisant de l’Arabie saoudite le leader du monde sunnite. En tant que premier pays exportateur de pétrole brut, qui possède 15 % des réserves pétrolières prouvées dans le monde, le royaume est également un poids lourd dans l’économie mondiale, qui repose encore essentiellement sur les énergies fossiles.

Partenaire indispensable

« In fine, les dirigeants occidentaux reprendront langue avec Mohammad ben Salmane, qui deviendra selon toute vraisemblance roi à la mort de son père Salmane et qui a verrouillé tous les accès au pouvoir politique, policier et économique autour de lui. Même les États-Unis en sont conscients, malgré le “recalibrage” de Biden à l’encontre du dauphin saoudien, en ne lui imposant pas de restrictions financières dans le cadre du “Khashoggi Ban” », soutient Anne Gadel. Alors que son prédécesseur entretenait une relation privilégiée avec l’héritier saoudien, le président américain avait souhaité s’en distancier à son arrivée à la Maison-Blanche en début d’année. Il avait notamment rendu public un rapport confidentiel des renseignements sur l’affaire Khashoggi qui incriminait directement MBS, et avait décidé l’arrêt du soutien militaire direct des États-Unis à la coalition dans le conflit yéménite. « Biden ne rencontrera pas lui-même le prince héritier, car cela le clouerait au pilori au sein du Parti démocrate. Il autorise à la place son cabinet à le faire », précise Bruce Riedel. L’administration démocrate adopte ainsi une posture pragmatique au regard de l’importance stratégique de son allié traditionnel dans le Golfe. « Le président américain affronte son plus grand défi au Sénat, où son contrat d’armement de près de 660 millions de dollars avec les Saoudiens est en grande difficulté », poursuit l’ancien responsable des renseignements, en référence à l’accord pour une vente de missiles air-air bloqué par des sénateurs en raison du rôle de Riyad dans la guerre au Yémen.

Pour mémoire

Fin de la détente entre Riyad et Téhéran

« Les discussions actuelles sur le nucléaire iranien pourraient accélérer un changement de situation », souligne Anne Gadel, en référence à la position de l’actuel locataire de la Maison-Blanche. Alors que les négociations de Vienne sont suspendues jusqu’à mercredi, la diplomatie régionale s’active pour préparer la suite d’un probable échec du retour à l’accord de 2015 – dont les États-Unis s’étaient retirés unilatéralement en 2018 sous la présidence Trump. Au cœur de la tournée entamée hier par Mohammad ben Salmane dans le Golfe pour discuter des dossiers régionaux en vue du 42e sommet du Conseil de coopération du Golfe qui se tiendra à Riyad le 14 décembre, le dossier du nucléaire iranien pourrait ainsi être un moyen de plus de se montrer indispensable.

G20 de 2018 à Buenos Aires : le prince héritier d’Arabie saoudite, Mohammad ben Salmane (MBS), semble mal à l’aise parmi les autres dirigeants du groupe des pays les plus riches du monde. Certains l’évitent, le président français lui fait la morale devant les caméras, seul Vladimir Poutine s’enthousiasme en le voyant et le salue chaleureusement d’une tape dans la main...

commentaires (3)

MON MOT PUBLIE APRES MAINTES PROTESTATIONS.

LA LIBRE EXPRESSION

13 h 56, le 07 décembre 2021

Tous les commentaires

Commentaires (3)

  • MON MOT PUBLIE APRES MAINTES PROTESTATIONS.

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 56, le 07 décembre 2021

  • pourquoi tenir a faire de la visite de m.Macron en arabie saoudite & de l'appel fait a Mikati , tenir a en faire un exploit, un gain politique a ce dernier ? je n'y vois qu'un coup porte a m.aoun, etun geste de mansuetude au profit de mikati. pour ce qui est du reste, seul MBSaura reussi son coup et pt't aussi macron au cas ou il aura reussi a faire gagner des sous a l';industrie de l'armement francaise.

    Gaby SIOUFI

    10 h 00, le 07 décembre 2021

  • LECTEURS, HIER JE N,AI FAIT QU,UN SEUL COMMENTAIRE SUR MACRON ET MBS ET LES NOTRES. CENSURE ! JE DEFIE L,OLJ DE LE PUBLIER DANS CET ARTICLE ET D,EXPLIQUER AUX INTERNAUTES POURQUOI MA LIBRE EXPRESSION QUI EST LA MEME TOUJOURS ET PUBLIEE A ETE HIER CENSUREE. QUI PROTEGE-T-IL ? AYEZ L,AMABILITE DE PUBLIER CETTE NOTE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    05 h 06, le 07 décembre 2021

Retour en haut