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Moyen-Orient - Éclairage

Le Nobel de littérature Orhan Pamuk à nouveau ciblé par la justice turque

Le romancier fait l’objet d’une enquête judiciaire pour « insulte au fondateur de la République, Mustafa Kemal, et au drapeau national » suite à la parution de son dernier ouvrage, « Veba Geceleri ».

Le Nobel de littérature Orhan Pamuk à nouveau ciblé par la justice turque

Le romancier turc Orhan Pamuk, prix Nobel de littérature 2006, pose pour une interview dans sa maison à Istanbul, le 2 février 2015. Ozan Kose/AFP

Des procès surréalistes intentés à des artistes sous couvert d’insulte à l’identité nationale turque en vue de les censurer : le scénario est récurrent. La dernière victime en date n’est autre que Orhan Pamuk, premier auteur turc lauréat du prix Nobel de littérature, en 2006. Visé par une enquête judiciaire ouverte lundi par le parquet d’Istanbul, le célèbre écrivain est soupçonné d’avoir insulté Mustafa Kemal, dit Atatürk – père fondateur de la Turquie moderne dont l’héritage est revendiqué par des personnalités politiques de tout bord à l’instar de Recep Tayyip Erdogan – ainsi que le drapeau national.

Il lui est reproché de s’être supposément inspiré de Mustafa Kemal pour le héros de sa dernière fiction parue en mars dernier en Turquie et intitulée Veba Geceleri (Les nuits de la peste), afin de mieux pouvoir dénoncer le « père des Turcs ». Selon les mots de Tarcan Tülük, un avocat de la ville d’Izmir à l’origine de la plainte, certaines phrases du roman pourraient « inciter à la haine et l’hostilité des lecteurs ». Alors qu’elle se déroule en 1901 dans une province imaginaire de la Turquie ottomane en prise à une pandémie, l’histoire donne notamment à voir un jeune officier nommé Kamil, devenant l’objet d’un culte après avoir mené une révolution et dont il est interdit de se moquer.

Dans le viseur du régime

Ce n’est pas la première fois qu’Orhan Pamuk se retrouve face à la justice turque. Un an avant de décrocher le Nobel de littérature, le romancier originaire d’Istanbul avait déjà été poursuivi pour « insulte à la nation » après avoir déclaré à un journal suisse qu’« un million d’Arméniens et 30 000 Kurdes avaient été tués » en Turquie entre 1915 et 1917. Depuis, Orhan Pamuk est dans le viseur des nationalistes turcs et du régime de Recep Tayyip Erdogan.

En mars dernier, peu après la parution de son dernier ouvrage, une première enquête avait été ouverte contre Orhan Pamuk dans le sillage de la plainte de Tarcan Tülük, encarté par ailleurs au parti conservateur et laïc Parti démocrate (PD). L’affaire avait toutefois abouti à un non-lieu après que le Prix Nobel eut assuré dans sa déposition n’avoir « jamais écrit de texte impliquant Mustafa Kemal Atatürk ». Le juge avait alors déclaré que « la personne dépeinte dans le roman, si elle est Atatürk, est en tout cas aimée par la population locale ». Bien décidé à parvenir à ses fins, Tarcan Tülük a fait appel de la décision. Sa nouvelle plainte a cette fois-ci été acceptée par le juge chargé du dossier, estimant que « certaines phrases du livre pourraient, en effet, être considérées comme des insultes ». Orhan Pamuk sera ainsi entendu prochainement devant la cour civile d’Istanbul, où sa maison d’édition, Yapi Kredi, pourrait également être appelée à la barre.

Liberté de pensée

Si les comparutions qui visaient l’auteur en 2005 avaient été abandonnées sous la pression des opinions publiques européennes et internationales – alors que le reis cherchait à l’époque à adhérer à l’UE – cette nouvelle enquête judiciaire n’a pas manqué de déclencher une vague d’indignation en Turquie et à l’international. « Nous pouvons aimer Orhan Pamuk comme nous pouvons ne pas l’aimer, nous pouvons aimer ses écrits comme nous pouvons ne pas les aimer, nous pouvons trouver ses pensées justes comme nous pouvons être en désaccord avec ce qu’il dit ; mais le soutenir jusqu’au bout, c’est défendre la liberté de pensée et la démocratie qui sont en train d’être détruites dans ce pays », a notamment fustigé l’écrivaine turque Oya Bayda dans les colonnes du site d’information proche de la gauche libérale, T24. Le romancier, qui vit entre Istanbul et New York, où il enseigne la littérature à l’université de Columbia, s’est engagé par la suite en faveur de nombreux combats pour les libertés comme le mouvement protestataire turc mobilisé en 2013 sur la place Taksim.

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Loin d’être isolé, le cas d’Orhan Pamuk rappelle notamment celui d’Ahmet Altan, prix Femina de littérature étrangère 2021, incarcéré sans aucun fondement en 2016 pour avoir prétendûment participé au putsch manqué en juillet de la même année et finalement libéré par les autorités turques en avril 2021 ; ou encore celui de l’auteure Aslı Erdoğan, emprisonnée pendant plus de quatre mois durant la même période en raison de son soutien à la minorité kurde. Ces dernières années, le pouvoir n’a eu de cesse de censurer les voix critiques pour des motifs arbitraires. Depuis la tentative avortée de coup d’État, au moins 30 maisons d’édition turque ont ainsi été fermées par décrets gouvernementaux, indique l’Association des éditeurs turcs. Selon la même source, plus de 670 livres auraient en outre été confisqués pour avoir diffusé la « propagande d’une organisation terroriste ».

Des procès surréalistes intentés à des artistes sous couvert d’insulte à l’identité nationale turque en vue de les censurer : le scénario est récurrent. La dernière victime en date n’est autre que Orhan Pamuk, premier auteur turc lauréat du prix Nobel de littérature, en 2006. Visé par une enquête judiciaire ouverte lundi par le parquet d’Istanbul, le célèbre écrivain...

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C,EST LA DEMOPARTIE DE L,APPRENTI MINI SULTAN OTTOMAN ERDO. CE NOM EST BEAU EN ARABE.

LA LIBRE EXPRESSION

15 h 14, le 11 novembre 2021

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Commentaires (1)

  • C,EST LA DEMOPARTIE DE L,APPRENTI MINI SULTAN OTTOMAN ERDO. CE NOM EST BEAU EN ARABE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 14, le 11 novembre 2021

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