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Nos Lecteurs ont la Parole

Tragédie confessionnelle

Comme dans les tragédies grecques, il y a l’unité de lieu, de temps et d’action.

Le lieu est chargé de symboles et de fiel. Ces faubourgs sont l’endroit où un funeste autobus palestinien canardé par des miliciens en 1975 déclencha la guerre civile et détruisit le Liban. Chaque Libanais a son souvenir et ses blessures dans ces quartiers. Moi-même ai failli y laisser ma vie en traversant cette ligne de démarcation sous les tirs en 1989 pour me rendre en France. Revoir ces rues en guerre nous fait donc tous frissonner. Le temps, ce sont ces quelques heures courtes mais suffisantes pour réveiller les bons vieux démons confessionnels et s’assurer que la détestation d’autrui, la déshumanisation d’un concitoyen juste à cause de sa religion présumée sont toujours aussi tenaces. L’action est parfaitement menée, un parti qui se croit au-dessus des lois essaye d’intimider la justice, un autre qui saisit l’opportunité pour montrer lâchement ses petits muscles avec des francs-tireurs embusqués, puis la riposte ridicule et disproportionnée des miliciens ineptes canardant des immeubles vides comme pour libérer leur testostérone.

À tous ceux qui y ont vu autre chose qu’une mascarade, je dis qu’ils sont dupes du jeu des seigneurs de la guerre en mal de popularité. Je dis aux chrétiens dont l’inconscient craintif s’est rassuré que l’Iran ne pouvait pas envoyer ses sbires impunément dans leurs quartiers qu’ils se trompent amèrement, et que tirer sur ses concitoyens est un crime sans excuse. Qu’il n’y avait rien de légitime ou d’héroïque dans ce que ces francs-tireurs « chrétiens » ont fait. Je n’y vois que de la provocation, du meurtre, de la lâcheté. Je dis aussi aux autres que leur arrogance et leur dogmatisme nous entraînent dans cette dialectique. Que leur confessionnalisme et leur utilisation toxique de la religion réveillent les pires peurs et démons. Que leurs intimidations et gesticulations contre un simple juge démontrent leur faillite morale.

Puis j’invite enfin tout le monde à regarder la liste des victimes et pleurer avec moi tous ces jeunes, qu’ils aient pris des armes ou pas. Ils sont morts pour rien, si ce n’est défendre un député corrompu ou protéger un quartier d’une menace inexistante. Quelles qu’eussent été leurs motivations, qu’ils s’appellent Hassan, Hussein, Mohammad, Élie, Georges ou François, ils sont tombés bêtement sur l’autel de ce Liban divisé. Une fois de plus, la vraie guerre n’est pas entre chrétiens et musulmans, elle est entre ceux qui veulent la peur et la sédition pour dominer et s’enrichir et les autres, cette majorité trop silencieuse qui n’en peut plus de ces caïds sectaires. Ce nouveau Liban balbutiant aura-t-il enfin le courage de se réveiller ?

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Comme dans les tragédies grecques, il y a l’unité de lieu, de temps et d’action. Le lieu est chargé de symboles et de fiel. Ces faubourgs sont l’endroit où un funeste autobus palestinien canardé par des miliciens en 1975 déclencha la guerre civile et détruisit le Liban. Chaque Libanais a son souvenir et ses blessures dans ces quartiers. Moi-même ai failli y laisser ma vie en...

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