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Nos Lecteurs ont la Parole

« J’ai maximum besoin d’argent »

C’était dans les années 80. Beyrouth-Ouest essayait vainement de retrouver le faste du « Saint-Germain-des-Prés » du Moyen-Orient. Les vents violents avaient bien soufflé et balayé les restes d’Occident de ce quartier.

Non loin de Hamra, j’étais frappé par la devanture d’une boutique d’habillement affichant ce nom : Paul Jardin. À coup sûr, son propriétaire n’avait peut-être pas fait d’études de marketing, mais il avait un don certain pour donner un nom bien français à son magasin.

Paul Jardin. Qui dit Paul dit Pierre. Qui dit Jardin dit Cardin. Et hop, le tour était joué. Et de un.

À la télé – mais était-ce à la radio ? –, il avait balancé son premier slogan mortel : « J’ai maximum besoin d’argent », qui ne laissait aucun doute sur les motifs de son entreprise et nous laissait, nous public, hilare à chaque annonce.

Son affaire devait bien marcher, car plus tard, il avait lancé son deuxième slogan : « J’ai akidement besoin d’argent », en réponse à une question : « … Mais M. Paul Jardin qu’est-ce qui fait que vous cassiez ainsi vos prix ? »

Akidement : expression franbanaise du meilleur cru. En fait, la contraction composée de « akid », « sûr » en arabe, et « ement » de « sûrement » en français. Le maître de la pub, une fois de plus, frappait fort.

Une nuit, comme cela arrivait parfois à Beyrouth, nous avions entendu un « BOUM », assourdissant, et dont l’écho retentissait encore, quelques secondes après, dans les rues de la ville. Le lendemain matin, nous constations, au hasard de nos périples urbains, que le magasin Paul Jardin avait été soufflé par une explosion.

Plasticage. Sans doute les milices. Elles se chargeaient de récolter leur dîme, d’un bureau à l’autre, d’une boutique à l’autre, en faisant du porte-à-porte.

Peut-être étaient-elles au fait de la réussite commerciale de notre Paul Jardin, et n’avaient-elles pas été satisfaites de leur récolte chez notre marchand entreprenant.


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C’était dans les années 80. Beyrouth-Ouest essayait vainement de retrouver le faste du « Saint-Germain-des-Prés » du Moyen-Orient. Les vents violents avaient bien soufflé et balayé les restes d’Occident de ce quartier. Non loin de Hamra, j’étais frappé par la devanture d’une boutique d’habillement affichant ce nom : Paul Jardin. À coup sûr, son propriétaire...

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