À quelques mois de l’ouverture officielle de la campagne électorale pour les élections législatives, le secrétaire général du Hezbollah a déclaré lundi « la guerre... médiatique ». Officiellement, il s’agit de faire le point sur la couverture « des médias de l’axe de la résistance » pendant les derniers affrontements à Gaza et Jérusalem le mois dernier, en mettant l’accent sur l’importance de leur rôle dans les guerres modernes. Mais au-delà de ce développement précis, Hassan Nasrallah a pratiquement jeté les fondements d’une stratégie médiatique collective pour faire face à ce qu’il appelle « la propagande et la désinformation » des médias du camp adverse.
Sous le titre « La Palestine remporte la victoire », un congrès élargi s’est donc tenu lundi en fin d’après-midi pour « renouveler le discours médiatique et gérer les nouvelles confrontations », en présence de nombreuses figures de la presse et des médias, du représentant du chef de l’État Rafic Chelala, du conseiller du Premier ministre démissionnaire Khodr Taleb, du président de la commission parlementaire de l’Information, le député Hussein Hajj Hassan, du président du syndicat des rédacteurs Joseph Kossaïfi et de la responsable de l’information au Courant patriotique libre Rindala Jabbour.
Pour que le Hezbollah décide d’organiser un congrès consacré aux questions médiatiques, c’est qu’il leur accorde désormais une grande importance.
Pour la première fois depuis sa prise en charge du Hezbollah après l’assassinat de son prédécesseur Abbas Moussaoui en juin 1991, Hassan Nasrallah a mis ainsi la guerre médiatique au même plan que la guerre militaire. Il avait certes déjà évoqué à plusieurs reprises la guerre psychologique, mais lundi, c’est directement aux médias et à leurs représentants qu’il s’est adressé pour marquer leur rôle-clé dans les guerres. Tout en analysant la couverture médiatique des derniers affrontements à Gaza et Jérusalem, il a souligné l’impact des médias d’abord sur le moral des troupes, ensuite sur la mobilisation de l’opinion publique locale et internationale. Il a ainsi laissé entendre qu’une victoire militaire, si elle parle d’elle-même sur le terrain, reste toujours insuffisante si elle ne s’accompagne pas d’une prise de conscience populaire de sa réalité. De l’avis de nombreux observateurs, c’est une évolution majeure dans l’approche du secrétaire général du Hezbollah, qui avait l’habitude de concentrer ses discours davantage sur les rapports de forces à l’œuvre, les capacités militaires, la puissance technique et l’élément humain. C’est un peu comme s’il donnait à ses auditeurs un avant-goût de ce que seront les prochaines confrontations, qui se joueront sur les petits écrans et sur les réseaux sociaux, bien plus que sur les champs de bataille. D’ailleurs, tout en reconnaissant la place qu’occupent les médias traditionnels (presse écrite, radio et télévision), Hassan Nasrallah a consacré une partie de son discours aux réseaux sociaux et à l’importance qu’ils ont dans le monde d’aujourd’hui. Les affrontements qui se déroulent sur ces réseaux sont donc à ses yeux aussi importants désormais que ce qui se passe sur les fronts militaire et politique.
Le congrès élargi qui s’est tenu lundi et qui a suivi le discours du leader chiite était ainsi consacré à unifier les efforts de tous les acteurs médiatiques proches de la résistance dans le cadre d’une stratégie visant à affronter le camp adverse. Cette initiative a d’ailleurs été précédée d’une rencontre de coordination entre les médias proches du Hezbollah et ceux proches du CPL pour tenter de mettre au point un plan d’action en vue de faire face à la prochaine étape. Il y a eu aussi des rencontres avec des représentants d’autres médias et d’autres parties politiques, toujours dans le même but.
Dans son discours de lundi, Hassan Nasrallah a pratiquement résumé le contenu de ces débats et présenté une sorte de feuille de route en plusieurs points, basée sur une idée principale, celle de ne plus se contenter d’être sur la défensive mais de passer désormais à l’attaque. Le secrétaire général du Hezbollah l’a clairement dit : Ce camp, dans toute sa diversité, n’a pas les mêmes moyens financiers et techniques que le camp adverse, mais cela ne l’empêche pas d’avoir des éléments de force qu’il devrait utiliser. D’abord, il a le droit de son côté, si on parle du conflit israélo-palestinien et du refus des Israéliens de faire la moindre concession. Ensuite, il dispose d’une cause fédératrice qui, en dépit de toutes les tentatives visant à l’occulter et à pousser les peuples de la région à s’occuper de leurs problèmes intérieurs, reste vivace dans les cœurs et les esprits arabes, il s’agit de la cause palestinienne. Enfin, il a, selon « le sayyed », l’honnêteté dans la transmission de l’information qui le rend plus crédible auprès des partisans du camp adverse que les médias de celui-ci.
Dans ce même contexte, Hassan Nasrallah a aussi souligné l’importance pour les médias de ne pas mettre en avant les points faibles du camp dit de la résistance, mais plutôt ceux du camp adverse. D’abord pour ne pas démoraliser les partisans, et ensuite pour semer le doute chez ceux qui appuient l’adversaire. Il a ainsi repris une stratégie qui consiste, pour un chef militaire, à ne jamais divulguer ses points forts et ses points faibles en pleine bataille et à se concentrer plutôt sur ceux de l’adversaire.
Après le discours qui s’est achevé vers 18 heures, les participants au congrès ont échangé des idées pendant plus de deux heures. Les différents orateurs ont parlé de leurs expériences respectives pour tirer les leçons du passé. Des idées ont été lancées et discutées. Même si les prochaines législatives n’ont à aucun moment été clairement évoquées, le congrès étant consacré à la cause palestinienne, elles étaient malgré tout présentes dans tous les esprits, d’autant que beaucoup parmi les présents sont convaincus que les moyens médiatiques qui seront déployés par le camp hostile au Hezbollah (et au CPL) pendant les campagnes électorales devraient être considérables.
commentaires (18)
Que nous apprend de nouveau cet article ? Much ado about nothing.
Citoyen Lambda
14 h 03, le 08 juillet 2021