« Le système veut faire chuter le peuple. » « Il est inutile de bloquer les routes. Pour que votre révolution réussisse, allez manifester devant les maisons des responsables. » « Conversation entre Nabih Berry et Saad Hariri : “Nabih, où es tu ? Moi, je suis arrivé.” “Je suis devant la mosquée al-Amine”. »
Ces quelques tweets tintés de l’habituel sens de l’humour des Libanais illustrent bien le spectacle quelque peu absurde qui a été donné hier au Liban lors de la mobilisation dans la rue de syndicalistes rejoints par certains partis politiques. Ce ne sont plus les Libanais plombés par la crise économique inédite que subit le Liban depuis plus d’un an et demi, à cause des mauvais choix politiques du pouvoir en place, qui manifestent dans la rue. Ce sont les composantes de ce pouvoir qui manifestent contre ce même pouvoir dont ils font partie intégrante depuis des années...
C’est face à ce revirement surprenant que certains internautes s’indignaient hier. Mais pour les partis politiques, l’appel de la Confédération générale des travailleurs au Liban à la grève et aux rassemblements populaires hier, pour protester contre la détérioration violente de la situation économique et sociale, est une occasion d’évaluer leur popularité à moins d’un an des législatives prévues pour mai 2022. Une opportunité qui s’est présentée à l’heure où les détracteurs de la thaoura lui reprochent son incapacité à faire descendre les Libanais massivement dans la rue, en dépit de leur calvaire quotidien.
Il s’agissait donc pour les composantes de la classe dirigeante de tenter de jouer les opposants, et d’affirmer, une nouvelle fois, leur capacité à attirer un public, même si celui-ci est frappé de plein fouet par la crise.
Sauf que ces partis ne s’attendaient probablement pas à ce que leurs sympathisants répondent si timidement aux appels à la mobilisation. À Tarik Jdidé, grand fief beyrouthin du courant du Futur, seules quelques dizaines de personnes ont répondu favorablement à l’appel lancé mercredi par le directoire du parti haririen. Dans la banlieue sud de Beyrouth, bastion du Hezbollah et du mouvement Amal, la vie suivait presque normalement son cours…
Comment expliquer cela ? Interrogée par L’Orient-Le Jour, Paula Yacoubian, députée démissionnaire de Beyrouth (société civile), ne mâche pas ses mots : « Il s’agissait là d’une véritable mascarade. » « Le pouvoir en place se prend pour l’opposition. Il se moque de ce qui reste de son public », s’indigne-t-elle. La députée démissionnaire s’empresse, toutefois, d’assurer que « désormais, les Libanais ne sont pas dupes de ce genre de manœuvres ». « Ils s’entendent tous pour préserver leurs intérêts, aux dépens du peuple libanais. Mais cela ne passera plus », affirme Mme Yacoubian.
Les opposants face au défi de l’unification
Salah Honein, ex-député de Baabda et figure hostile à l’écrasante majorité de la classe dirigeante, partage le même point de vue. « Ils (les partis au pouvoir) sont habitués à s’entendre pour empêcher la reddition des comptes », souligne M. Honein, rappelant que ces protagonistes ont mis en place des gouvernements d’union nationale « pour empêcher la Chambre de demander des comptes ». Il est donc normal de les trouver ensemble dans la rue. Pour M. Honein, « les partisans et sympathisants des partis n’ont pas répondu à leurs appels parce que ceux-ci enchaînent les échecs ». Pour l’ancien député, cette situation met tous les opposants à la ligne politique actuelle face au défi de s’unifier : « L’opposition devrait unifier ses rangs et présenter des alternatives sérieuses », dit-il. Mais Paula Yacoubian est consciente que « les partis au pouvoir ne permettront pas à leurs détracteurs de s’unifier. Ils formeront eux-mêmes des listes de soi-disant opposants pour nous empêcher de nous unir. Il faut être vigilants. »
La grève lancée par la CGTL – dont certains responsables gravitent dans l’orbite de Nabih Berry – est intervenue alors que le bras de fer autour de la formation du gouvernement bat son plein entre la présidence de la République, d’une part, et le tandem Berry-Hariri, de l’autre. Pour ces trois grandes parties, elle représentait un moyen de presser pour la mise sur pied de la nouvelle équipe ministérielle et se laver les mains du blocage, comme l’ont montré les communiqués du Futur et du CPL, exhortant leurs bases populaires à prendre part à la grève. Lors d’un discours hier, le chef de la CGTL, Béchara el-Asmar, s’est dans ce contexte défendu, assurant que la centrale syndicale qu’il dirige n’est guidée par aucun parti politique. Une réponse indirecte à ses détracteurs qui l’accusent d’être proche du président de la Chambre.
Ces quelques tweets...
commentaires (4)
le asmar en question et ses semblables ont vraiment du toupet. ce qu'ils font ressemble a ce que pti gendre avait fait a tripoli & au chouf , a tenter de rallier plus de citoyens niais a sa personne - en vain . comment ces gens la esperaient rallier les citoyens a leur appel a la greve et aux manifestations, eux qui sont ouvertement accuses d'etre les serfs de Kellon ? est ce arrogance de leur part ou simplement ils se plient aux ordres de leurs seigneurs et maitres
Gaby SIOUFI
10 h 29, le 18 juin 2021