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Dernières Infos - Détention de l'opposant émirati Ahmed Mansoor

Un haut-responsable des Emirats visé par une plainte en France

Un haut-responsable des Emirats visé par une plainte en France

L'opposant émirati Ahmed Mansoor. Photo d'archives AFP

Un haut responsable des Emirats arabes unis chargé des forces de sécurité, et par ailleurs délégué au comité exécutif d'Interpol, est visé depuis lundi en France par une plainte pour "tortures" à l'encontre de l'opposant Ahmed Mansoor, détenu à l'isolement depuis plus de quatre ans.

Dans cette plainte déposée au tribunal judiciaire de Paris, l'ONG Gulf Centre for Human rights (GCHR) accuse le major général émirati Ahmed Nasser Al-Raisi d'"actes de torture et de barbarie" contre M. Mansoor, emprisonné depuis mars 2017, a appris vendredi l'AFP auprès de son avocat.

Militant des droits humains, l'opposant a été arrêté en 2017 et condamné à dix ans de prison en 2018 pour avoir, selon les autorités, critiqué le pouvoir émirati et terni l'image de son pays sur les réseaux sociaux. Selon la plainte, consultée par l'AFP, il est détenu à Abou Dhabi "dans des conditions moyenâgeuses constitutives d'actes de tortures".

Depuis le 20 mars 2017, M. Mansoor est "maintenu à l'isolement" dans la prison d'Al-Sadr, soit "bien au-delà du seuil de 15 jours fixé par les normes internationales", dans une cellule de 4m2, "sans matelas ni protection contre le froid", ni "accès à un médecin, à l'hygiène, à l'eau et aux installations sanitaires".

L'ONG considère que le rôle de M. Al-Raisi, inspecteur général du ministère de l'Intérieur émirati chargé du contrôle des forces de sécurité depuis 2015, "est établi" dans les actes de tortures subis par Ahmed Mansoor. Il a, par ses fonctions, "directement supervisé la répression accrue des droits et libertés et de leurs défenseurs aux Emirats arabes unis, et en premier lieu Ahmed Mansoor", avance-t-elle.

Outre ses hautes fonctions dans son pays, M. Al-Raisi est actuellement délégué au comité exécutif d'Interpol, basé à Lyon (sud-est). Selon l'ONG et certains médias, il serait candidat pour le poste de président de l'agence internationale de police criminelle, à pourvoir en novembre prochain.

Contacté par l'AFP, un porte-parole d'Interpol n'a pas été en mesure de confirmer cette information, indiquant que les candidatures "ne sont officiellement présentées et acceptées qu'à partir de l'ouverture de l'Assemblée générale", prévue du 23 au 25 novembre.

Compétence universelle

M. Mansoor "est détenu dans des conditions inhumaines depuis 2017, soit plus de quatre années", a déclaré à l'AFP Me William Bourdon, avocat de GCHR. "Ce qui ne peut être qualifié que d'actes de torture doit aujourd'hui être fermement dénoncé et condamné par la justice".

La "venue prochaine" de M. Al-Raisi "sur le territoire national dans le cadre de sa campagne pour accéder à la présidence de l'agence, établie à Lyon, est de nature à rendre possible des poursuites en France en application du principe de compétence universelle", a-t-il affirmé.

La justice française peut en effet poursuivre les auteurs des crimes les plus graves - crimes contre l'humanité, de guerre ou actes de torture - s'ils passent ou résident sur le territoire français, quels que soient le lieu des crimes et la nationalité des auteurs ou victimes. Selon le porte-parole d'Interpol toutefois, "il n'existe pas d'obligation de voyager pour un candidat à un poste du Comité exécutif" et donc de se rendre en France pour l'Assemblée générale cet automne. Contactée par l'AFP, l'ambassade des Emirats à Paris a indiqué qu'aucun de ses représentants n'était habilité à parler à la presse.

L'arrestation de M. Mansoor en mars 2017 avait suscité une vague de protestations des principales organisations internationales de défense des droits humains, dont Amnesty International. L'opposant a observé deux grèves de la faim depuis son incarcération.

Dans un communiqué publié en janvier 2020, le ministère émirati des Affaires étrangères avait estimé que les affirmations des ONG sur le sort réservé à M. Mansoor étaient "sans fondement".

Lauréat 2015 du prix Martin Ennals, du nom d'un ancien secrétaire général d'Amnesty, M. Mansoor avait déjà été condamné à trois ans de prison en 2011 - au début des Printemps arabes - pour avoir "utilisé internet pour insulter les dirigeants des Emirats arabes unis". Il avait finalement été libéré la même année à la faveur d'une grâce présidentielle, mais il avait été privé de son passeport et interdit de voyage à l'étranger.

Un haut responsable des Emirats arabes unis chargé des forces de sécurité, et par ailleurs délégué au comité exécutif d'Interpol, est visé depuis lundi en France par une plainte pour "tortures" à l'encontre de l'opposant Ahmed Mansoor, détenu à l'isolement depuis plus de quatre ans.Dans cette plainte déposée au tribunal judiciaire de Paris, l'ONG Gulf Centre for Human rights (GCHR)...