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Moyen-Orient - Société

L’abandon d’un traité protégeant les femmes divise les féministes turcs

La Convention d’Istanbul datant de 2011 réprime la violence domestique et les abus similaires, y compris le viol conjugal et la mutilation génitale féminine.

L’abandon d’un traité protégeant les femmes divise les féministes turcs

Des militantes féministes manifestant, le 25 mars 2021, contre la décision du président turc de se retirer de la Convention d’Istanbul qui lutte contre les violences faites aux femmes. Ozan Kose/AFP

La décision du président Recep Tayyip Erdogan de retirer la Turquie d’un traité de lutte contre les violences faites aux femmes a beau avoir provoqué une onde de choc, certaines associations féministes conservatrices l’ont accueillie avec « compréhension ».

C’est notamment le cas de l’association Femmes et Démocratie (KADEM) dont la vice-présidente n’est autre que la fille cadette du président turc, Sumeyye Erdogan.

L’argument avancé par la présidence pour justifier ce retrait a en effet trouvé écho auprès de certaines organisations conservatrices comme KADEM : préserver les valeurs familiales face à ceux qui cherchent à « normaliser l’homosexualité » au nom du traité abandonné, qui prohibe plus généralement toute discrimination basée sur « le genre ».

Connu sous le nom de Convention d’Istanbul, ce traité du Conseil de l’Europe datant de 2011 oblige les gouvernements à adopter une législation réprimant la violence domestique et les abus similaires, y compris le viol conjugal et la mutilation génitale féminine. Son abandon par la Turquie a été annoncé dans un décret de M. Erdogan publié dans la nuit du 19 au 20 mars.

Ce retrait, décidé alors que les féminicides n’ont cessé d’augmenter depuis une décennie en Turquie, a suscité la colère des organisations de défense des droits des femmes et des critiques de l’Union européenne, de Washington et du Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU.

Ni pour ni contre

Mais pour Derya Yanik, avocate et membre du conseil d’administration de KADEM, l’association faite par certains milieux entre la convention et la défense des droits des LGBT était devenue « un poids difficile à porter » dans un pays largement conservateur. « De notre point de vue, la Convention d’Istanbul était un instrument pour combattre les violences faites aux femmes. Mais certains groupes l’ont associée aux droits des LGBT. C’est un des facteurs qui ont nui au traité », affirme Mme Yanik.

Si ses propos ressemblent à une défense des justifications avancées par Ankara, Mme Yanik tient à préciser que KADEM n’est « ni pour ni contre » la Convention d’Istanbul. Elle fait valoir que la Turquie est déjà dotée d’une législation pour protéger les femmes, ce qui rend selon elle le traité moins indispensable. « On a prétendu qu’en cas de retrait de la Convention d’Istanbul, il n’y aurait plus de moyens pour protéger les femmes. Mais ce n’est pas le cas », affirme l’avocate.

Reprenant à son compte les arguments des autorités turques, Mme Yanik considère que le traité « imposait » la défense des LGBT comme « le nouveau normal ».

Tuées, voilées ou pas

La décision du chef de l’État turc a provoqué des manifestations à travers la Turquie de femmes qui se sentent menacées par l’abandon du traité dans un pays où la mentalité patriarcale est encore prédominante.

Plus de 300 femmes ont été tuées l’année dernière en Turquie, selon la plateforme « Nous allons arrêter les féminicides ». Environ 38 % des femmes en Turquie ont affirmé avoir été au moins une fois victimes de violences conjugales, selon les données de l’Organisation mondiale de la santé, alors que le taux se situe aux alentours de 25 % pour l’Europe.

Une femme voilée qui a participé à l’une des manifestations dans un quartier conservateur d’Istanbul, Aysel Ozbey, 43 ans, estime que le retrait de la Turquie du traité est « un putsch contre les femmes » par M. Erdogan. « Nous sommes tuées indépendamment de notre langue, notre religion ou notre race, ou encore du fait que nous soyons conservatrices ou pas, que nous portions le voile ou pas », affirme-t-elle.

Pas de leçons de morale

Pour Rumeysa Camdereli, fondatrice de Havle, un groupe qui se présente comme féministe et musulman, prétendre que la Convention d’Istanbul impose à la Turquie l’acceptation du style de vie des LGBT est ridicule. « Certains pensent que les gens deviendront homosexuels après avoir lu le traité. Ce n’est même pas un argument qui vaut la peine d’y répondre », sourit-elle. Pour Mme Camdereli, les femmes en Turquie ont besoin de « protections légales et pas de leçons de morale ».

Selon les défenseurs des droits des femmes, les lois existantes sont mal appliquées par les forces de l’ordre et la justice en Turquie, alimentant ainsi une culture d’impunité pour les auteurs des violences. Mme Camdereli refuse cependant de tomber dans « le désespoir » et reste convaincue qu’il faut poursuivre la lutte.

« C’est la violence masculine qui détruit la famille, pas le traité », affirme-t-elle.

Fulya OZERKAN/AFP

La décision du président Recep Tayyip Erdogan de retirer la Turquie d’un traité de lutte contre les violences faites aux femmes a beau avoir provoqué une onde de choc, certaines associations féministes conservatrices l’ont accueillie avec « compréhension ».
C’est notamment le cas de l’association Femmes et Démocratie (KADEM) dont la vice-présidente n’est autre que...

commentaires (1)

ON COMPREND MIEUX QUE LE NEO SULTAN RECEP ERDOGAN 1er DE SON NOM SE FOUT COMPLETEMENT DE FAIRE EVOLUER LA TURQUIE VERS LE MODERNISME , TANT QUE CELA FAIT SON JEU, Y COMPRIS SON INTEGRATION DANS 'L'UE .

Gaby SIOUFI

11 h 43, le 02 avril 2021

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Commentaires (1)

  • ON COMPREND MIEUX QUE LE NEO SULTAN RECEP ERDOGAN 1er DE SON NOM SE FOUT COMPLETEMENT DE FAIRE EVOLUER LA TURQUIE VERS LE MODERNISME , TANT QUE CELA FAIT SON JEU, Y COMPRIS SON INTEGRATION DANS 'L'UE .

    Gaby SIOUFI

    11 h 43, le 02 avril 2021

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