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Nos Lecteurs ont la Parole

La « régression féconde » revisitée

La « régression féconde ». L’expression est de l’intellectuel algérien Lahouari Addi. Son idée énoncée en 1992 était simple : laissez-les (les islamistes) gouverner et le peuple algérien comprendra que les promesses démagogues et radicales de ce parti étaient inapplicables et les discréditeraient une fois pour toutes, en levant ainsi l’hypothèque islamiste.

« Donnez-leur le pouvoir et ils se mettront rapidement hors jeu. » Sauf qu’ici, ce n’est plus l’Algérie de 1992 et l’heure n’est plus aux islamistes. Ici on est au Liban de 2021 à l’heure du Courant patriotique libre, du moins en apparence. Précisons d’emblée qu’on ne sort jamais indemne d’une catastrophe d’une telle ampleur et le parti au pouvoir risque d’en faire les frais. Qui sautera en premier ? Qu’importe, du moment où cela aboutira à la chute du système en entier. Mais on n’est pas encore là, et le système poursuit sa marche implacable sur le dos des pauvres gens.

Le terme « régression féconde » fait aussi écho à la théorie de la « destruction créatrice » développée par l’économiste Schumpeter. Sauf que la création n’a plus droit de cité dans le Liban de 2021 ; elle doit céder à une destruction destructrice et la « régression féconde » devient stérile. Dans cette longue marche de la régression stérile, une seule constance : la nécessité de cohabiter avec le Hezbollah. Or le discours, les dogmes et les ambitions de ce parti sont incompatibles avec l’État de droit et le sujet de droit. C’est toute l’incongruité de cette cohabitation. Sous l’occupation syrienne, fruit d’un statu quo international, la prédation financière pouvait s’acclimater d’un colonialisme religieux et l’accumulation d’argent par les uns était le pendant de l’accumulation d’armes par les autres, sous le regard bienveillant de la communauté internationale. Le retrait des troupes syriennes du Liban avec sa kyrielle d’assassinats politiques devait sonner le glas de ce système. Mais ce dernier va être maintenu sous perfusion jusqu’à son effondrement officiel en 2019. Entre-temps, les choses ont commencé à bouger dans la région et l’intégration régionale par la dette a cédé la place à une intégration économique à long terme, dont l’aboutissement serait la paix entre les pays du Golfe et Israël. Le Liban a pris le chemin de la guerre et s’est vu mis à l’écart des circuits de capitaux.Après l’effondrement et l’explosion, c’est la crise de la marginalisation régionale et internationale qui s’est pointée à grands pas. La stratégie «  attrape-tout  » du Courant patriotique libre a réussi quand il était dans l’opposition. Mais une fois au pouvoir il avait tout faux. Il n’a pas créé le système de corruption légalisée, c’est vrai, mais il l’a exploité sans vergogne et s’il est responsable de quelque chose, c’est bien de la corruption de la possibilité d’une alternative au Liban. Coincé entre le marteau de son alliance avec le Hezbollah à l’heure où l’hégémonie des armes, alliée à la famine d’argent, menace de changer l’image du Liban, et l’enclume de son incompétence, mélange de suffisance, de dogmatisme et d’aveuglement, il semble qu’il ne fera pas long feu. Le pire, c’est que sa déchéance risque de paver la voie au retour des vieilles fripouilles, mélange de chefs de guerre mafieux et escrocs en costume-cravate. Puis ça recommence.L’important pour eux, c’est que le système perdure alors qu’il est intrinsèquement incapable de continuer. Tout comme dans la danse «  Moon Walk  » inventée par Michael Jackson ; pendant longtemps nous avons eu la sensation que l’on avance alors qu’en fait, on recule. C’est très beau de vivre dans l’illusion, mais la réalité nous rattrape d’une façon ou d’une autre. Pour cela, il est devenu urgent d’agir afin de sortir de la régression stérile et d’imaginer un futur autrement.

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La « régression féconde ». L’expression est de l’intellectuel algérien Lahouari Addi. Son idée énoncée en 1992 était simple : laissez-les (les islamistes) gouverner et le peuple algérien comprendra que les promesses démagogues et radicales de ce parti étaient inapplicables et les discréditeraient une fois pour toutes, en levant ainsi l’hypothèque islamiste....

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