Rechercher
Rechercher

Nos Lecteurs ont la Parole

La léthargie élevée à la dignité d’une faculté d’adaptation

C’est parce que nous sommes soumis, qu’ils sont devenus bourreaux.

C’est parce que nous sommes subjugués, qu’ils sont devenus omnipotents.

La reptation résignée des agneaux sacrificiels vers l’autel n’a jamais calmé le courroux des dieux, au contraire, elle les rend plus voraces.

Nous devons à la fois nous faire exorciser de notre culture de l’indolence et faire exorciser le pays des satans de l’oligarchie.

Cette oligarchie a tissé sa toile d’araignée sur l’ensemble du pays et elle est tout aussi fourbe que rusée. Elle maîtrise l’art d’étirer toujours plus l’élastique, sans atteindre le point de rupture.

Nous sommes cet élastique qui, fort de sa faculté d’adaptation, ne casse jamais au visage de ses tortionnaires. Faculté d’adaptation, est-ce une bénédiction ou une malédiction qui nous frappe d’hébétude et nous donne bonne conscience dans notre inertie ? Nous sommes victimes d’un génocide, oui un génocide économique et financier. Que faisons-nous? Nous faisons preuve de plus d’élasticité, hélas, et notre patience pusillanime n’a pas de limites.

En 1963, le Liban était classifié comme l’un des trois pays les plus prospères du monde. Aujourd’hui, il est l’un des trois pays les plus endettés du monde. Aux prochaines olympiades de la corruption et de la gabegie, nous revendiquerons et récolterons par acclamation les trois médailles, or, argent et bronze.

La Constitution et la loi sont entre les mains des jongleurs maléfiques du pouvoir, un accordéon extensible et compressible à volonté.Les princes de l’église, les muftis, imams et autres ulémas, quant à eux, se sont arrogé, sans opposition aucune, le pouvoir souverain de transcender les lois, pour assurer l’immunité et l’impunité à leurs protégés.

Qu’avons-nous fait ? Obédience jusqu’à l’abnégation totale.

En iconoclastes imaginatifs, nos politiciens ont poussé l’hérésie au point de concevoir et d’appliquer le concept unique de « démocratie consensuelle », l’oxymoron par excellence. Ces deux concepts, on ne peut plus incompatibles, ont vu leur mariage, de « nécessité » diront certains faiseurs de systèmes, conçu en catimini et célébré discrètement dans les coulisses du pouvoir. Ce concept absurde, fièrement « made in Lebanon », est devenu le mètre étalon de toutes les décisions politiques.

Quand nous nous insurgeons contre cette aberration, les sculpteurs du pouvoir rétorquent « spécificité libanaise oblige ».

Spécificité libanaise, que de crimes commis ouvertement en ton nom !

Le 17 octobre de l’an dernier, un million de Libanais ont vaincu la culture de la peur, surmonté les divisions confessionnelles pour confronter la hiérarchie déliquescente. Résultat : un repli tactique du pouvoir qui a offert, à titre de lot de consolation, la démission d’un gouvernement alors en état de décomposition avancée ! Repli provisoire, car le Premier ministre évincé par le peuple se voit confier un peu plus d’un an plus tard, jour pour jour, la mission de former le prochain gouvernement.

Albert Einstein aurait dit à peu près : « Le comble de la stupidité consiste à refaire sans cesse la même chose et espérer des résultats différents. »

Dans son élan évanescent de générosité, le régime a acquiescé à la demande du soulèvement et conclu un contrat pour un audit juricomptable avec une société internationale. L’authenticité de cette volonté s’exprime on ne peut mieux par le contrat signé. Une véritable passoire qui était un mort-né et, d’ailleurs, qui a rendu l’âme quelques semaines après sa naissance. Pour se racheter un peu de crédibilité et faire amende honorable, suite à l’explosion du 4 août, l’État libanais a promis une enquête approfondie et des résultats sous cinq jours. Nous sommes pratiquement cinq mois plus tard et toujours rien. Même pas un acte de contrition, même pas une journée de deuil national, les politiciens continuant avec une insensibilité totale leur partie de ballon chasseur cherchant à se blanchir les mains par bouc émissaire interposé.

Les inexpugnables requins de l’oligarchie continueront à défendre férocement leurs « acquis ». Cessons d’essayer de ménager la chèvre et le chou et nous, les victimes du génocide économique et physique (explosion meurtrière du 4 août), réclamons à l’unisson l’intervention des Nations unies pour la mise sous tutelle du Liban. Rien d’autre ne peut mettre fin à notre descente irréversible aux enfers.

Vigny à la fin de son poème, la Mort du Loup, s’exprime ainsi :

(...) « Puis après comme moi, souffre et meurs sans parler. »

Nous ne mourrons pas et certainement pas en silence !

Les fondations du temple du chaos sont déjà ébranlées, faisons que l’effondrement s’ensuive!

La mise sous tutelle du Liban est la seule voie pacifique, embrassons-la avec passion.

Avocat, membre du barreau du Québec-Canada

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

C’est parce que nous sommes soumis, qu’ils sont devenus bourreaux.C’est parce que nous sommes subjugués, qu’ils sont devenus omnipotents.La reptation résignée des agneaux sacrificiels vers l’autel n’a jamais calmé le courroux des dieux, au contraire, elle les rend plus voraces. Nous devons à la fois nous faire exorciser de notre culture de l’indolence et faire exorciser le pays...

commentaires (1)

Depuis le temps que je vous connais vous n’ avez eu de cesse d’ impressionner par votre intransigeance sur les principes , votre capacité légendaire d’ analyse , votre sens de l equitable mais aussi votre refus de l’ acceptation du fait accompli... reflets éloquents de votre article ci haut . La question serait donc la suivante : Nos valeurs appartiennent elles vraiment à cette région du monde ? Alain Moujaes

Moujaes Alain G

15 h 34, le 05 janvier 2021

Tous les commentaires

Commentaires (1)

  • Depuis le temps que je vous connais vous n’ avez eu de cesse d’ impressionner par votre intransigeance sur les principes , votre capacité légendaire d’ analyse , votre sens de l equitable mais aussi votre refus de l’ acceptation du fait accompli... reflets éloquents de votre article ci haut . La question serait donc la suivante : Nos valeurs appartiennent elles vraiment à cette région du monde ? Alain Moujaes

    Moujaes Alain G

    15 h 34, le 05 janvier 2021

Retour en haut