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Nos Lecteurs ont la Parole

Quand revient l’hiver

Trois mois déjà. Trois lunes. Aucun soleil.

Pas de soleil là où les hommes meurent sans recevoir justice. Là où les enfants épousent la terre, emportant avec eux la promesse des génies « assassinés ». Pas de soleil là où les jeunes sont ensevelis sous des tonnes d’insouciance. Là où des sans-abri « par force » sont abandonnés à leur sort. La pluie, fidèle au rendez-vous, leur sera impitoyable. Un vieillard en plus ou en moins, qui s’en soucie vraiment ? Angine de poitrine ou famine... Qui en tiendra compte ?

Un nombre, nous ne serons jamais qu’un nombre. Pour servir et non pour être servis. Un peuple fait de numéros, de matricules anonymes ; alors, disparaître au port ou à l’aéroport, qu’est-ce que ça fait ?

Et tandis que des avides du pouvoir se battent pour s’arracher un privilège, une population dépense ce qui lui reste de papiers dévalués pour ne pas mourir deux fois. Une population qui rendra Sisyphe jaloux. Des familles, des vieillards, des solitaires attendent ces travaux promis qui stagnent dans les tiroirs de la bureaucratie ou, pire, dans les coffres vidés d’une nation agonisante. De la poudre aux yeux, il en existe, quelques centimes jetés comme de la morphine pour apaiser la colère devenue un monstre. Des ministères incapables se font la concurrence de l’inefficacité sur le terrain. Et ces gens, cloîtrés dans des maisons aux baies vitrées béantes, espèrent toujours voir arriver les mesures de secours efficaces et durables, mais l’attente sera longue, les décideurs au pays du Cèdre sont morts depuis longtemps.

D’autre part, des organisations et des particuliers ont fait de leur mieux et même davantage. Mais que peuvent-ils accomplir là où tout un gouvernement a échoué ?

Qui s’occupera du suivi pour accompagner ces sinistrés que le mauvais temps fait trembler ?

Qui leur assurera une continuité décente sans mendier et quémander ? Comment guérir les blessures de ces oubliés, de ces laissés-pour-compte, ces morts-vivants, dont les pertes morales et matérielles ont dépassé l’imagination la plus fertile ? Dans l’histoire moderne de notre Liban, il y aura deux moments : avant et après le 4 août.

Et la prestation pour l’après-4 août est plus décevante que celle d’avant. Les maisons qui s’effondrent sous la pluie de novembre laissent présager les conséquences d’un hiver qui sera plus amer que toutes les années parce qu’il revêt le visage de ce vieillard de 91 ans en pleurs, demandant la protection de son gouvernement et qui désespère, de ces femmes sans ressources qui insistent pour rester dans leurs domiciles délabrés, même si elles vont y mourir, et peut-être, qui sait, pour y mourir et en finir !

Quand revient l’hiver avec tout son attirail de guerre contre les démunis de notre nation et que le spectacle des routes inondées et bouchées nous flanque un « déjà-vu » pénible, ayons une pensée pour ces personnes qui verront la pluie et le froid s’installer sans permission dans leur home, « unsweet » home, et sans vouloir jouer ni les superwomen ni les supermen, faisons en sorte que nos frères dans l’humanité ne soient pas une fois de plus dénudés. Chacun comme il peut, chacun autant qu’il peut. Aussi et surtout, ... sans jamais rien attendre de nos élus noyés dans leur délire narcissique impuissant.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Trois mois déjà. Trois lunes. Aucun soleil. Pas de soleil là où les hommes meurent sans recevoir justice. Là où les enfants épousent la terre, emportant avec eux la promesse des génies « assassinés ». Pas de soleil là où les jeunes sont ensevelis sous des tonnes d’insouciance. Là où des sans-abri « par force » sont abandonnés à leur sort. La pluie, fidèle...

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