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Nos Lecteurs ont la Parole

Je fais le pari du Liban

Retomber des grands hommes politiques d’hier à ceux qui les ont suivis, c’est tomber de la réalité dans le néant, du sommet d’une montagne dans un gouffre. Quels personnages peuvent intéresser en dehors d’eux ? De qui et de quoi peut-il être question après de pareils hommes ? Comment nommer les politiciens d’aujourd’hui en place des anciens ?

Que reste-t-il de la solidarité sociale et de la souveraineté économique quand des usines ferment et des milliers d’emplois et d’employés sont jetés à la pâture ? Quand les centrales électriques sont sacrifiées aux impératifs supérieurs de la profitabilité ? Le malheur est que ce système fait fi des vraies règles du jeu de la politique. Que l’organisation de la cité et le gouvernement d’un pays nécessitent le recours à une gestuelle, à un style, nul ne peut en disconvenir. Mais ceux-ci doivent rehausser l’action, venir à l’appui d’une conception et d’une vision et non en tenir lieu.

Quelle peut être alors la raison d’être d’un engagement ? Où est la dignité des hommes politiques s’ils n’ont plus de solutions alternatives à proposer à ce qui s’accomplit ? Par essence, la démocratie se différencie du totalitarisme par l’existence de solutions multiples à une même réalité.

La République suppose l’alternative, l’autre politique. De Gaulle l’avait compris ; il consultait périodiquement les Français par référendum.

Aujourd’hui, faire de la politique, ce n’est plus être pour ou contre quelque chose, c’est gérer sa carrière dans un univers borné, comme on gère un portefeuille de valeurs sur un marché financier.

Réhabiliter la politique, c’est d’abord réintroduire le débat. Faire accepter l’idée qu’il n’y a pas qu’une seule voie possible pour le Liban.

Je suis républicain parce que je crois à la liberté du citoyen de choisir pour son pays son propre modèle d’organisation de la vie collective, de participer à l’élaboration des lois et d’accepter leur respect, une fois celles-ci votées. Je crois qu’une communauté n’a de sens qu’à partir du moment où elle repose sur un contrat social et politique accepté par tous. Si tel n’est pas le cas, la minorité du moment n’a aucune raison de se soumettre à la majorité.

Un jour, mon père me remet le texte de cette conférence donnée par Renan en 1882. Une phrase m’a frappé : « La nation est une âme, un plébiscite de tous les jours. »

Mais le contrat social et politique ne s’improvise pas. Il ne se décide pas un beau matin dans un conclave de dirigeants politiques ou de financiers internationaux. Il ne peut être imposé du dehors sans que les peuples n’aient été consultés ou associés. Il est le résultat non seulement de l’histoire, mais du lien affectif et social qui existe entre les hommes qui vivent dans un même pays. Lien fragile, entretenu par des institutions, réaffirmé à l’occasion des grands moments de notre vie publique, un lien qu’on ne peut rompre à la légère, au bénéfice d’un idéal improbable ou indéfini.

Pour une série de raisons, le bien national est en train de se distendre peut-être de manière irrémédiable. À l’intérieur, les ferments de la discorde sont là : régions où le droit ne règne plus, progrès de l’intégrisme, carences de notre modèle scolaire d’intégration par l’instruction, absence de récompense du mérite et de l’effort, urbanisme trop souvent déshumanisé.

Le Liban est un État exsangue, dont l’énergie s’est concentrée sur la réduction de son train de vie et non sur la création de richesses. Le tableau est sombre. Mais en politique, la volonté, la cohésion, le savoir-faire des hommes peuvent y remédier.

Ayons foi. Non, ne nous laissons pas abattre. Désespérer, c’est déserter. Regardons l’avenir. L’avenir, on ne sait quelles tempêtes ou quelles explosions nous séparent du « Port ». Mais un port lointain et radieux. On l’aperçoit – l’avenir, répétons-le, c’est la République pour tous. Ajoutons, l’avenir, c’est la paix avec tous. Fort d’une conviction républicaine, je me refuse au pessimisme. Avec d’autres et beaucoup d’autres, je fais le pari du Liban.

Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « courrier » n’engagent que leurs auteurs et ne reflètent pas nécessairement le point de vue de L’Orient-Le Jour. Merci de limiter vos textes à un millier de mots ou environ 6 000 caractères, espace compris.

Retomber des grands hommes politiques d’hier à ceux qui les ont suivis, c’est tomber de la réalité dans le néant, du sommet d’une montagne dans un gouffre. Quels personnages peuvent intéresser en dehors d’eux ? De qui et de quoi peut-il être question après de pareils hommes ? Comment nommer les politiciens d’aujourd’hui en place des anciens ? Que reste-t-il de la solidarité...

commentaires (1)

J aurais bien aimer partager votre espoir , mais si le passé est guarant du futur je ne vois pas comment notre peuple dénude ‘de tout civisme pourrait relancé ce beau pays qu est le nôtre . Adieu veau , vache , cochon , couve ......

Robert Moumdjian

04 h 25, le 03 novembre 2020

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Commentaires (1)

  • J aurais bien aimer partager votre espoir , mais si le passé est guarant du futur je ne vois pas comment notre peuple dénude ‘de tout civisme pourrait relancé ce beau pays qu est le nôtre . Adieu veau , vache , cochon , couve ......

    Robert Moumdjian

    04 h 25, le 03 novembre 2020

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