La liste des officiels saoudiens accusés de corruption par Riyad continue de s’allonger. Selon un décret royal publié lundi soir par l’agence officielle SPA, six fonctionnaires saoudiens ont été limogés, dont deux membres de la famille royale. Une décision prise selon les résultats d’une enquête menée par l’Autorité de contrôle et de lutte contre la corruption (Nazaha), appuyée par des éléments fournis par le prince héritier Mohammad ben Salmane, dans le but de faire la lumière sur des « transactions financières suspectes détectées au ministère de la Défense ».
Figure visée la plus remarquée, le prince Fahd ben Turki ben Abdelaziz, commandant des forces conjointes de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite opérant au Yémen. Il a soudainement été démis de ses fonctions et il est désormais sous le coup d’une enquête. Engagé avec les Émirats arabes unis au Yémen, le royaume saoudien appuie depuis 2015 le gouvernement du président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi, face aux rebelles houthis soutenus par l’Iran. « Le timing du limogeage du prince Fahd pourrait être en lien avec les défaites accumulées à la frontière avec le Yémen au cours de ces derniers mois, soit pour le tenir pour responsable, soit pour s’en débarrasser et avancer sur le dossier yéménite », fait remarquer Yasmine Farouk, chercheuse au Centre Carnegie, contactée par L’Orient-Le Jour. Marié à la fille du roi Abdallah et ancien commandant des forces terrestres royales saoudiennes, le prince Fahd avait été nommé à la tête de la coalition en février 2018 dans le cadre d’un large remaniement politique d’une partie de hauts commandants militaires orchestré par le dauphin saoudien.
Le sexagénaire a aussitôt été remplacé par le lieutenant-général Mutlaq ben Salim al-Azima, ancien commandant du Bouclier de la Péninsule, force militaire conjointe mise en place par les pays du Conseil de coopération du Golfe, et conseiller militaire auprès du ministère saoudien de la Défense. Son fils, le sous-gouverneur de la région d’al-Jouf, le prince Abdelaziz ben Fahd, est également visé par le décret.
Luttes d’influence
Selon le décret, la Nazaha doit désormais « mener à bien les procédures d’enquête avec tous les responsables militaires et civils concernés, prendre les mesures juridiques nécessaires à leur encontre et soumettre les résultats ». « La corruption au sein du ministère de la Défense n’est pas un secret à Riyad, et implique des milliards de dollars pendant des décennies. On se souvient de l’affaire d’al-Yamamah, par exemple », rappelle Yasmine Farouk. Conclue en 1985, cette série de contrats de vente d’armement entre le Royaume-Uni et l’Arabie saoudite fait l’objet d’allégations de corruption selon lesquelles des pots-de-vin auraient été versés à des responsables saoudiens par l’entreprise britannique BAE Systems, grâce à une caisse noire dans des banques suisses. L’affaire a été classée sans suite par la justice britannique en 2006.
Alors que Riyad se livre officiellement à une lutte accrue contre la corruption depuis les impressionnantes purges du Ritz-Carlton en novembre 2017, mêlant hommes d’affaires saoudiens et membres de la famille royale, l’argument sert également à la famille régnante de prétexte pour écarter les personnes perçues comme trop menaçantes pour le pouvoir. Nommé au poste de prince héritier cinq mois plus tôt, MBS aurait été à l’origine de ces arrestations afin d’éliminer ses rivaux potentiels et de consolider son assise dans la cour royale. Une politique qui tranche avec son discours de souverain moderne et réformateur, cristallisé par son projet de réformes sociales et de diversification économique, Vision 2030. Un an plus tard, l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi dans le consulat de son pays à Istanbul parachève de tirer un trait sur cette image aux yeux de la communauté internationale.
« Cette manière d’accuser publiquement les princes, d’enquêter sur eux, de détruire leur image publique et leur branche familiale est quelque chose qui dépasse la lutte contre la corruption », souligne Yasmine Farouk. « En frappant fort, MBS a pratiquement mis fin aux luttes de pouvoir entre les différentes branches de la famille royale qui pouvaient avoir de l’influence au sein du système saoudien, de l’État et de la cour », poursuit-elle.
Plus récemment, l’ancien dauphin saoudien Mohammad ben Nayef, son fils Nawaf et le frère du roi, le prince Ahmad ben Abdelaziz, ont été arrêtés et accusés de corruption et d’avoir fomenté un complot pour renverser MBS. Craignant pour la santé de leur client, les avocats de Mohammad ben Nayef ont lancé une offensive médiatique la semaine dernière, confiant au quotidien britannique Financial Times que l’ancien prince héritier était toujours détenu dans un lieu inconnu et n’avait pas eu accès à des soins médicaux depuis cinq mois.
UN MBS CHEZ NOUS AURAIT EPURE LES TRAFICANTS BIEN CONNUS ET ARMES ET LES CORROMPUS DES BARGES TURQUES, DE L,EDL ET DES PORTS ET DE L,AEROPORT ET DES PASSAGES FRONTALIERS. ETC... ETC... ETC...
16 h 27, le 02 septembre 2020