Les partisans du courant du Futur, fondé par Rafic Hariri et dirigé aujourd'hui par son fils Saad, étaient plutôt déçus mardi après l'énoncé du verdict du Tribunal spécial pour le Liban. Ce dernier a rendu coupable un des quatre membres présumés du Hezbollah jugés pour leur participation à l'attentat qui a coûté la vie à l'ancien Premier ministre et de 21 autres personnes, le 14 février 2005 à Beyrouth, et acquitté trois autres.
Le principal suspect dans l'affaire, Salim Ayyash, 56 ans, a été reconnu coupable d'"homicide intentionnel" et d'avoir été à la tête de l'équipe qui a mené l'attaque. Les trois autres hommes, Hussein Oneissi, 46 ans, Assad Sabra, et Hassan Habib Merhi ont, eux, été acquittés. Moustapha Badreddine, le principal suspect décrit comme le "cerveau" de l'attentat par les enquêteurs, est mort depuis et n'a donc pas été jugé. Les juges du TSL ont prononcé leur décision en l'absence des suspects. Aucun d'eux n'ayant été remis au tribunal, ils ont été jugés par contumace.
A Tariq Jdidé, l'un des fiefs beyrouthins du Futur, la déception est immense, selon notre journaliste sur place Suzanne Baaklini. Certaines personnes parlent de "trahison" à l'encontre de Rafic Hariri, d'autres de "marché politique". "Même le poste de gendarmerie de Tarik Jdidé aurait fait mieux", explique un militant interrogé. "Tout le monde sait qui a tué Rafic Hariri, et cela ne peut pas être un seul homme", dit un autre.
"Il y a une certaine déception chez les gens. Nous nous attendions à des sanctions plus importantes", explique Wissam, un militant du Futur, originaire de Békaa-Ouest, près de la tombe de Rafic Hariri dans le centre-ville de Beyrouth, saluant le fait que "c'est la première fois que les responsables d'un assassinat politique sont jugés". "Cela montre que le TSL est apolitique et indépendant, et se base sur des preuves (...) malgré les critiques contre le TSL du Hezbollah, du 8 Mars et de tous ceux qui gravitent autour de l'axe syro-iranien", a-t-il ajouté. "Le fait que des individus du Hezbollah aient été reconnus coupables fait porter au parti chiite une responsabilité morale, politique, sécuritaire et politique dans ce qui s'est passé", a-t-il déclaré.
"Nous savions que le TSL n'avait pas pour objet de lancer des accusations politiques contre des pays ou des organisations, mais de juger des personnes", explique Ines, une autre partisane du Futur. "Le tribunal a certes expliqué qu'il n'avait pas assez de preuves contre certains, mais Salim Ayyache a été reconnu coupable pour cinq chefs d'accusation. Si Moustapha Badreddine avait pu être jugé, on aurait peut-être trouvé des preuves contre lui. Ces deux hommes ne viennent pas de nulle part. Ce sont des membres du Hezbollah", a-t-elle déclaré, saluant néanmoins une "décision importante pour la vérité et la justice".
Un membre "ne prend pas de décision de ce type tout seul"
"Ce verdict a acté qu'il s'agissait d'un assassinat politique", a déclaré à L'Orient-Le Jour l'ancien ministre de l'Environnement, Mohammad Rahhal, membre du Futur, qui se trouvait avec d'autres responsables du parti, à l'instar de la sœur de Rafic, Bahia Hariri, mais aussi des partisans devant la tombe de l'ancien Premier ministre, dans le centre-ville de Beyrouth. "Depuis le début, le TSL a été clair en expliquant qu'il ne portait pas des accusations politiques, mais il est évident que le membre d'un parti ne prend pas de décision de ce type tout seul", a-t-il ajouté, dénonçant les projets de l'axe syro-iranien.
Maya, 30 ans, réside dans la Békaa. "Je considère que 15 ans, c'est long pour le verdict, et je ne suis même pas sûre que le verdict soit juste car j'ai l'impression qu'on a beaucoup parlé d'absences de preuves suffisantes", a déclaré cette militante du Futur à notre correspondante dans Sarah Abdallah, écartant l'éventualité d'une sédition ou d'une guerre interne. Selon notre correspondant à Saïda (Liban-Sud), Mountasser Abdallah, qui a interrogé des partisans du Futur, ces derniers ont eux aussi exprimé une grande déception quant au verdict.
Les partisans du Hezbollah satisfaitsDans la banlieue sud de Beyrouth, fief du Hezbollah, c'est une ambiance complètement différente. Des tirs de joie et des feux d'artifice ont ainsi été entendus après l'énoncé du verdict. Selon notre journaliste sur place, le verdict y a été bien accueilli, d'aucuns estimant que ce jugement a "rendu justice à la vérité". Les personnes interrogées ont expliqué qu'elles savaient que le Hezbollah n'avait rien à voir avec l'assassinat de Rafic Hariri, accusant Israël, l'Arabie saoudite ou d'autres pays du Golfe qui avaient intérêt à sa mort car il s'était rapproché du leader du parti chiite, Hassan Nasrallah, quelques temps avant l'attentat.
Rafic Hariri, chef de file de la communauté sunnite qui avait des liens étroits avec les Etats-Unis, des pays occidentaux et des alliés sunnites dans le Golfe, était considéré comme une menace pour l'influence de l'Iran et de la Syrie au Liban. Lors de la séance du prononcé du verdict, à Leidschendam, près de La Haye, le tribunal a cependant estimé qu'il n'y avait pas de "preuves" de la responsabilité directe des dirigeants de la Syrie et du Hezbollah dans l'assassinat. Le tribunal estime "que la Syrie et le Hezbollah auraient pu avoir des raisons d'éliminer M. Hariri et ses alliés politiques cependant, il n'existe aucune preuve de quelque implication que ce soit de la direction du Hezbollah dans le meurtre de M. Hariri et il n'y a pas non plus de preuve directe d'une implication syrienne", a déclaré le juge président David Re, en lisant un compte-rendu de la décision.
Ce monsieur a donc commis ce crime en solitaire Et ce selon le verdict du tribunal pour le Liban Avec plusieurs kilos de TNT ... parodie de justice Je conseille à ces juges la lecture de la pièce de théâtre « la panne « De Friedrich Dürrenmatt Fadi Labaki
11 h 12, le 20 août 2020