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Environnement - Déchets

Les ordures brûlées à l’air libre affectent gravement les habitants du Liban-Nord

Les résidents d’un village du Koura portent régulièrement plainte, mais ce sont en fait quatre cazas de la région qui souffrent depuis plus d’un an de la fermeture de la décharge informelle de Adwé, sans qu’une solution ne soit trouvée.

Les ordures brûlées à l’air libre affectent gravement les habitants du Liban-Nord

La fumée qui se dégage de la décharge à Kousba, dans le Koura, vue depuis Ras Kifa (caza de Zghorta). Photo Michael Jebrine

Plus d’un an après la fermeture de la décharge informelle de Adwé, au Liban-Nord, qui desservait les quatre cazas de Zghorta, Koura, Bécharré et Minié-Denniyé, les habitants de cette région souffrent toujours de l’absence de gestion des déchets et de l’inaction politique sur ce dossier.

Ras Kifa et Daraya, deux villages dans le caza de Zghorta, font particulièrement les frais de cette situation écologique désastreuse. Leurs habitants se plaignent depuis plus de neuf mois de l’incinération des déchets à l’air libre dans une décharge sauvage située à Kousba, dans le caza du Koura. La fumée qui se dégage des déchets incendiés dans la décharge de Kousba pollue régulièrement l’air de ces deux villages limitrophes du caza du Koura.

Depuis la terrasse de sa maison, Michael Jebrine a pris quantité de photos très nettes de la fumée s’échappant de la vallée en face de lui. Ce jeune habitant de Ras Kifa était assis un jour sur sa terrasse, lorsqu’il a vu un message posté par la municipalité de Kousba sur son compte Facebook, comportant des photos d’un sublime coucher du soleil aperçu depuis la localité. « J’ai tout de suite pris des photos de la fumée qui défigure le paysage de notre côté, à Ras Kifa, et je les ai postées sur leur page, en réponse à leur publication initiale », raconte-t-il à L’Orient-Le Jour.

Joint au téléphone par notre journal, le président du conseil municipal de Ras Kifa, Chahid Saliba, affirme avoir déposé une plainte à ce sujet auprès du mohafez du Liban-Nord Ramzi Nohra il y a dix mois. « Aucune mesure n’a été prise pour arrêter l’incinération des déchets à Kousba », déplore-t-il. Le conseil municipal de Ras Kifa a déposé une autre plainte, plus récente, auprès du ministère de l’Environnement, dans l’espoir qu’une décision sera prise cette fois-ci.

Selon M. Saliba, la municipalité de Kousba a démenti avoir jamais eu recours à l’incinération des déchets. Il assure que, selon elle, la décharge brûle d’elle-même (en raison du gaz méthane qui se dégage naturellement des ordures). « Je comprends qu’on estime que les déchets brûlent d’eux-mêmes lorsque le feu éclate au centre ou au fond de la décharge, peut-être en raison de la chaleur et des gaz qui s’en dégagent, mais lorsque c’est la surface de la décharge qui s’enflamme, il est peu probable que l’incendie ne soit pas provoqué », explique le président du conseil municipal de Ras Kifa.


La fumée qui se dégage de la décharge à Kousba, dans le Koura, vue depuis Ras Kifa (caza de Zghorta). Photo Michael Jebrine


Une toxicité inégalée
Interrogé à ce sujet par L’OLJ, le président du conseil municipal de Kousba, Jreige Akl, dément catégoriquement toute responsabilité de la municipalité dans l’incinération des déchets. « Nous-mêmes souffrons de la pollution résultant des incendies dans cette décharge vieille de 70 ans, et nous nous empressons de les éteindre au moyen de citernes d’eau », affirme-t-il. Toujours selon lui, cette décharge est fermée et n’accueille plus les déchets du village. « J’ai transformé un terrain qui m’appartient personnellement en un lieu de stockage de déchets, appelé communément parking », depuis la fermeture de Adwé, dit-il.

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Selon Michael Jebrine, les habitants de son village et des villages voisins en ont ras le bol. « Les habitants, et surtout les jeunes, ont exprimé leur mécontentement sur Facebook, où ils mènent une minicampagne contre la municipalité de Kousba qu’ils appellent à arrêter l’incinération des déchets », dit-il. « Les habitants n’ont reçu aucune réponse de la part des autorités concernées », ajoute-t-il. L’habitant de Ras Kifa exprime par ailleurs ses doutes vis-à-vis du caractère naturel et non provoqué des incendies, en réponse à l’argument avancé par Jreige Akl. « Pourquoi ces incendies s’arrêtent-ils pendant quelques jours ou une semaine, à chaque fois qu’une plainte est déposée ? Est-ce une coïncidence ? » s’interroge-t-il.

Les habitants ont raison d’être inquiets, au vu des conséquences sanitaires de l’incinération sauvage des déchets. Najat Aoun Saliba, directrice du Centre de conservation de la nature à l’Université américaine de Beyrouth et spécialisée dans la pollution de l’air, certifie que l’incinération des déchets à l’air libre, surtout à proximité des quartiers résidentiels, est d’une toxicité sans égale. « Brûler des déchets est tellement toxique pour les hommes que cela équivaut à leur inoculer du poison à l’aide d’un respirateur », s’indigne-t-elle. La fumée qui se dégage de l’incinération des déchets, note-t-elle encore, contient des métaux lourds qui aggravent la pollution de l’air. Toujours selon Mme Aoun Saliba, cette pollution ne touchera pas seulement la génération actuelle, mais aussi les générations futures, puisque les matières toxiques inhalées par les femmes seront transmises à leurs enfants au cours de la grossesse. « Nous sommes en train de nuire à des générations qui ne sont même pas nées ! » martèle-t-elle.

Dans les autres cazas
La non-résolution de la crise des déchets, depuis la fermeture de la décharge informelle de Adwé en 2019, ne touche pas uniquement le caza du Koura, mais l’ensemble des quatre cazas concernés. À Bécharré, un lieu de stockage a été aménagé dans la localité de Barhelyoun pour recevoir les déchets du caza, mais la municipalité risque de ne plus pouvoir payer au promoteur les frais du ramassage et du transport des ordures. « Aujourd’hui, nous payons le promoteur en livres libanaises fixées au taux de change officiel, mais la situation va bientôt changer et nous ne pourrons plus dans ces conditions continuer à assumer le ramassage et le transport des déchets, d’autant que les conseils municipaux ne sont plus subventionnés par l’État depuis 2018 », explique à L’Orient-Le Jour Élie Makhlouf, président de l’Union des municipalités de Bécharré.

À Zghorta, la situation n’est pas meilleure. En novembre dernier, dans une tentative de débarrasser les rues de Zghorta des déchets amassés, les autorités locales ont pris la décision de les stocker dans un terrain du village de Bchennine, au grand dam des habitants. Cette décharge sauvage de Bchennine, qui reçoit jusqu’à présent une grande partie des déchets, est édifiée directement au-dessus de la source d’eau d’un fleuve qui arpente plusieurs régions.

Joint au téléphone par L’OLJ, le président de la municipalité Antonio Frangié assure que les déchets du village sont soit triés dans un centre aménagé récemment par la municipalité, soit déversés dans la décharge sauvage de Bchennine, soit encore transportés en dehors du caza vers Beyrouth, sans préciser le lieu exact. « Aucune crise de déchets ne se profile à l’horizon dans notre caza », assure M. Frangié. Selon lui, il manque encore l’aval du ministère de l’Environnement pour qu’un terrain à Hwakir, Denniyé (enclavé dans le caza de Zghorta), soit aménagé et transformé en décharge.

Plus d’un an après la fermeture de la décharge informelle de Adwé, au Liban-Nord, qui desservait les quatre cazas de Zghorta, Koura, Bécharré et Minié-Denniyé, les habitants de cette région souffrent toujours de l’absence de gestion des déchets et de l’inaction politique sur ce dossier. Ras Kifa et Daraya, deux villages dans le caza de Zghorta, font particulièrement les frais de...

commentaires (2)

QUEL BORDEL QUE CETTE ETERNELLE HISTOIRE DES DECHETS AU LIBAN. LES CATINS DONT LES FESSES CHAUFFENT LES BANCS DE LA GROTTE ALIBABIENNE FERAIENT BIEN DE REMUER LE PEU DE MATIERE GRISE DE LEURS BOITES CRANIENNES,,, SI MATIERE IL Y EN A !

LA LIBRE EXPRESSION

14 h 19, le 20 juillet 2020

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Commentaires (2)

  • QUEL BORDEL QUE CETTE ETERNELLE HISTOIRE DES DECHETS AU LIBAN. LES CATINS DONT LES FESSES CHAUFFENT LES BANCS DE LA GROTTE ALIBABIENNE FERAIENT BIEN DE REMUER LE PEU DE MATIERE GRISE DE LEURS BOITES CRANIENNES,,, SI MATIERE IL Y EN A !

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 19, le 20 juillet 2020

  • Les incinérateurs de déchets existent depuis plus de cent ans et en plus de nos jours on peut récupérer la chaleur des gaz et fumées pour en faire, par exemple, de l’électricité. Cela se fait dans beaucoup de pays ! Pourquoi pas au Liban ? Nos édiles et nos politiciens ne peuvent corrompre les installateurs des incinérateurs et/ou récupérer des commissions pérennes et juteuses et donc rien n’est fait ? Bien triste tout ça !

    TrucMuche

    12 h 34, le 20 juillet 2020

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